HENRI IV, SA VIE
CATHERINE DE BOURBON, LA PETITE SOEUR D'HENRI IV
Catherine de Bourbon, l'unique soeur d'Henri IV, est la digne héritière de sa mère, Jeanne d'Albret. Cultivée et raffinée, femme politique avisée, elle n'a jamais renié sa foi calviniste. Fidèle soutien de son frère dans les pires épreuves, elle a été bien mal récompensée : en 1592, le roi a impitoyablement contrarié le seul grand amour de sa vie.
Née le 7 février 1559 à
Paris, Catherine de Bourbon, contrairement à Henri, son robuste frère
de cinq ans son aîné, est de santé fragile. Petite, malingre,
un peu boiteuse, un peu voûtée, elle souffrira toute sa vie de
rhumes, bronchites et autres affections pulmonaires. Elle a à peine connu
son père, Antoine de Bourbon Vendôme, mort trois ans après
sa naissance. En revanche, elle est très liée avec sa mère,
Jeanne d'Albret. La reine de Navarre ne se sépare jamais de cette enfant
dont les nombreux jouets et "poupines" l'accompagnent dans tous ses
déplacements.
Catherine a été élevée avec
tous les raffinements dus à son rang. Comme sa mère et sa grand-mère,
Marguerite de Navarre, elle a le goût de la littérature, rime avec
élégance et parle plusieurs langues. Jeanne d'Albret lui a aussi
transmis sa force de caractère et sa foi calviniste. Une foi ardente
que, malgré toutes les pressions, elle ne reniera jamais : "Je
ne serai jamais d'une religion où il me faudrait croire que ma mère
est damnée", dira-t-elle.
Catherine
a treize ans quand Jeanne d'Albret meurt. Celle-ci a confié sa tutelle
à Henri. La jeune fille devra terminer son éducation dans le Béarn,
sans être approchée par d'autres femmes que des "réformées
de bonne meurs, jusqu'à ce qu'elle soit mariée à un prince
protestant". La Saint Barthélemy, quelques semaines plus tard,
en décide autrement. L'adolescente, présente à la Cour
pendant les massacres du 24 août 1572, restera dans cette société
hostile au côté de son frère pendant quatre ans.
Au printemps
1576, le roi de Navarre, qui a réussi à s'évader, envoie
deux de ses compagnons chercher sa cadette à la Cour. Catherine peut
de nouveau pratiquer le calvinisme au grand jour. Elle est présente le
13 juin dans le temple de Niort quand, après plusieurs semaines d'incertitude,
son frère abjure solennellement le catholicisme, la religion obligée
de sa captivité.
En 1582, Henri donne à sa soeur
la lieutenance générale dans le Béarn, où Catherine
exercera une sorte de régence pendant ses absences. "Madame",
comme on l'appelle désormais, est toujours fille. A l'automne 1587, après
sa victoire à Coutras, Henri regagne le Béarn. Le 9 novembre,
il retrouve sa soeur à Navarrenx. Il est accompagné de leur jeune
cousin, le comte Charles de Soissons, fils de Louis de Condé et demi-frère
du cardinal de Bourbon, qu'il veut présenter à Catherine. Malgré
la volonté posthume de Jeanne d'Albret, il lui a déjà été
proposé une dizaine de prétendants de tous âges, nationalités
et religions.
Celui-ci est catholique, mais bel homme, racé et auréolé,
lui aussi, de la victoire de Coutras. C'est le coup de foudre! Le couple de
tourtereaux se forme sous l'oeil complice d'Henri et de sa maîtresse,
Corisande, une amie de longue date de Catherine.
Pourtant le roi de Navarre
change bientôt d'avis et se prend à détester Soissons, qu'il
décrit comme "froid, retenu, circonspect, dissimulé, amateur
du faste et des formalités". Cette soudaine antipathie est-elle
due à une incompatibilité d'humeur? A la jalousie d'Henri à
l'égard de ce trop brillant cousin? A la crainte d'être trahi?
Soissons est-il suspect de jouer double jeu? En août 1588, Charles, qui
doit sentir cette animosité, quitte prudemment le Béarn, au prétexte
d'aller convaincre Henri III de résister aux ligueurs. Il ne reverra
Catherine que quatre ans plus tard.
En 1592, Henri est roi de France, mais
il doit encore conquérir son royaume. Charles de Soissons est désormais
un rival dangereux : un Bourbon catholique que certains modérés
sont prêts à accepter sur le trône. Au printemps, Henri est
furieux d'apprendre qu'à l'instigation de Corisande le comte a quitté
le siège de Rouen pour accourir dans le Béarn et a échangé
des promesses de mariage avec Catherine. Sa réaction est brutale : il
les traite comme des rebelles ayant signé un engagement dont le choix
n'appartient qu'au roi. Le 6 avril 1592, le premier président du conseil
souverain de Navarre réçoit ses ordres et fait séparer
le couple, au grand désespoir de la princesse. Henri IV avertit Corisande
que "toutes personnes qui voudront
brouiller ma soeur avec moi, je ne leur pardonnerai jamais".
Catherine,
qui a vu sa vie entimentale brisée par les ambitions de son frère,
s'aigrit. En 1598, le roi l'invite à épouser l'héritier
du duché de Lorraine, le duc de Bar. Consciente du fait que, à
quarante ans, c'est sa dernière chance de convoler, elle cède,
même si le prétendant est fervent catholique. Malgré l'opposition
du pape Clément VIII, les noces sont célébrées à
Saint Germain en Laye, le 31 janvier 1599. Son époux, persuadé
que leur mariage n'est pas valide, mène la vie dure à l'obstinée
huguenote, dont la santé s'en ressent. Quand, en décembre 1603,
Rome promet enfin d'accorder sa dispense, Catherine n'a plus que quelques mois
à vivre.