LOUIS XIV, LES PERSONNALITES
FENELON

 

PRELAT ENCENSE, PUIS DECHU

Aristocrate d'une exquise politesse et de belles manières, François de la Mothe Fénelon, doté de grandes qualités humaines et animé d'une foi sincère, connaît tous les honneurs à partir d'août 1687. Mais, huit ans plus tard, ses prises de position religieuses et politiques lui vaudront la disgrâce et l'exil.

François Salignac de la Mothe Fénelon a commencé sa carrière sous les meilleurs auspices. Né dans le Périgord le 6 août 1651, il a été ordonné prêtre en 1676. Entré en relation avec le duc Paul de Beauvillier, gendre du ministre Colbert et proche conseiller du roi, dont il est devenu le directeur de conscience, il a été nommé en août 1689 précepteur du jeune duc Louis de Bourgogne, fils du Grand Dauphin et petit-fils de Louis XIV.

Le précepteur du duc de Bourgogne n'a pas été choisi seulement à cause de ses appuis, mais aussi pour ses mérites. "Saint Louis n'aurait pas mieux choisi. Cet abbé de Fénelon est un des sujets les plus rares pour l'esprit, le savoir et la piété", souligne la Marquise de Sévigné, lors de sa nomination. Doté d'une sérieuse formation humaniste, Fénelon est également rompu à l'art de la prédication, qu'il a brillamment décrit dans ses Dialogues sur l'éloquence en général et sur celle de la chaire en particulier, écrits entre 1681 et 1686. Ses nombreux sermons attestent la hauteur de sa pensée et de son talent d'orateur. Mais il ne se contente pas de faire montre de virtuosité : vertueux, sensible et pénétrant, il est, de l'avis de tous ceux qui le fréquentent, animé d'une foi sincère et profonde.
Reçu à l'Académie Française en1693, Fénelon devient archevêque de Cambrai en février 1695. Proche de la Marquise de Maintenon et de son entourage dévot, introduit à Saint Cyr, la maison d'éducation fondée par l'épouse du roi, il est l'objet de tous les honneurs et bénéficie de la pleine confiance de Louis XIV. C'est alors que tout bascule. Il prend le parti du quiétisme, doctrine mystique condamnée par son ami Jacques Bénigne Bossuet, évêque de Meaux, l'un des prélats les plus écoutés du pouvoir. Dès lors, "l'Aigle de Meaux" et le "Cygne de Cambrai" vont s'affronter; et la position particulièrement en vue des deux protagonistes va amener le roi à se mêler de cette affaire qui fait scandale. Bossuet signale les dangers de cette déviance du christianisme dans une brochure que le souverain se fait lire dans son carrosse, avant de reprocher à Madame de Maintenon d'avoir favorisé la nomination de Fénelon à l'archevêché de Cambrai et plaidé pour qu'il soit sacré à Saint Cyr par Bossuet! La marquise, qui s'inquiète de l'influence exercée dans son école par la grande prêtresse du quiétisme, Jeanne Marie Guyon, ne se fait pas trop prier pour désavouer Fénelon.

Le 1er août 1697, le prélat est prié de quitter la Cour. Exilé dans son diocèse de Cambrai, il se voit retirer ses titres et pensions. A cette disgrâce s'ajoute, en mars 1699, la condamnation par le pape Innocent XII de son Explication des maximes des saints sur la vie intérieure, qu'il a écrite deux ans plus tôt pour justifier ses positions et répondre à ses détracteurs. Cette même année 1699, la défaveur de Fénelon est aggravée par la publication des Aventures de Télémaque. Ce roman sur l'éducation d'un jeune prince est lu comme une dénonciation du régime de Louis XIV, lequel ne peut accepter la description d'une cité, critique implicite de son gouvernement.
Dans son exil, Fénelon continue, dans de nombreux écrits critiques et réformateurs, à manifester la même liberté d'esprit, à militer en faveur d'une monarchie s'appuyant sur la justice et tempérée par les conseils. Le roi lui interdit de revenir à Paris et étend sa disgrâce à ses proches, ce qui lui inspire un "Prenez garde! J'ai la peste!" humoristique, ainsi que cette fière déclaration : "Mon zèle, quoique ignoré du roi, suffira pour ma consolation le reste de ma vie". A ceux qui lui conseillent de faire amende honorable, il répond : "Je serais bien malheureux et indigne de mon ministère, si ma conscience ne suffisait pas pour me déterminer". Désormais, l'archevêque vit dans la piété, se contente de peu. Se consacrant à ses ouailles, il témoigne aux pauvres et aux malades une compassion et une générosité qui lui valent l'admiration et l'adoration des habitants de son diocèse. Durant la guerre de Succession d'Espagne, il héberge les soldats, nourrit la population, fait envoyer ses blés à Paris. Il ne sera cependant jamais rappelé à la Cour et mourra le 7 janvier 1715 dans sa bonne ville de Cambrai.

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