LOUIS XIV, LES ARTS ET LES SCIENCES
GASSENDI, PRETRE, PHILOSOPHE ET ASTRONOME
A la fois homme de science et homme d'Eglise, Gassendi compte parmi les plus grands savants du XVIIème siècle. Ami de l'astronome italien Galilée, critique du philosophe René Descartes, il verra sa carrière officielle couronnée en 1645, lorsqu'il sera nommé professeur de mathématiques au Collège royal.
Pierre Gassend, dit Gassendi, est né à
Champtercier, près de Digne, le 22 janvier 1592. Fils de paysan, il a
été remarqué par Antoine de Boulogne, l'évêque
de Digne, qui lui permit d'acquérir une solide formation intellectuelle.
Diplômé de l'université d'Aix en Provence, il a été
ordonné prêtre en 1617 et, passant la plus grande partie de sa
vie dans une tranquille retraite, il s'est adonné à l'étude
des philosophes de l'Antiquité et des mathématiques, aux observations
astronomiques, à la prédication religieuse et aux oeuvres de charité.
Une vie régulière que viennent interrompre de temps en temps des
voyages à Paris et à l'étranger, où il rencontre
ses pairs, les plus grands savants de son époque.
Esprit attentif et réfléchi, et par surcroît doué
d'un véritable génie de l'observation, Gassensi poursuit à
Aix en Provence de brillantes études de théologie, de langues
grecque et hébraïque; il prend aussi goût à l'astronomie.
Bientôt docteur, il enseigne la philosophie, mais assez vite, il se lasse
des principes de l'Ecole (celle des aristotéliciens). Dans ses Exercices
de paradoxes contre les aristotéliciens, publiés en 1624
et qui connaissent un grand succès, il s'attaque à la scolastique,
rejoignant les positions de l'Anglais Francis Bacon et de René Descartes
sur le sujet.
En matière d'astronomie, Gassendi est partisan
du système du Polonais Nicolas Copernic. Il voue une immense admiration
à l'Italien Galilée, à qui il écrit régulièrement
pour lui faire part de ses observations astronomiques. Il correspond aussi avec
Johannes Kepler : quand celui-ci annonce que Mercure et Vénus passeront
sur le disque du soleil, il est le premier à observer le phénomène
et à confirmer l'exactitude des calculs de l'astronome allemand.
Lors d'un séjour à Paris, en 1641, le grand savant qu'est l'abbé
Marin Mersenne lui communique les Méditations métaphysiques
de Descartes : au mois de mai, sur un ton modéré, mais parfois
railleur, Gassendi critique la méthode et les raisonnements du philosophe,
notamment la séparation radicale qu'il opère entre la chair et
l'esprit. Le sensualiste Gassendi conteste le spiritualiste Descartes. Offensé,
le philosophe s'abandonne à la colère dans sa réfutation.
Gassendi réplique en 1644 dans des Instances contre la métaphysique
et les réponses de R. Descartes : "Vous
m'appelez chair; mais pour cela, vous ne m'ôtez pas l'esprit, de même
qu'en vous donnant à vous-même la qualification d'esprit vous ne
cessez pas d'être chair. Je vous laisserai donc discuter à votre
manière; il me suffit qu'avec l'aide de Dieu je ne sois pas chair sans
esprit, et que vous ne soyez pas esprit sans chair". Dans le monde
des savants, il est évident que Gassendi sort vainqueur de cette confrontation.
Malgré tout, les deux hommes se réconcilient en 1648.
En 1645, une des deux chaires de mathématiques
du Collège royal devient vacante. Le cardinal Alphonse de Richelieu,
frère du cardinal-ministre, la propose à Gassendi, qui refuse
d'abord pour raison de santé, puis finit par accepter : cette nomination
est le couronnement de sa carrière. Deux ans plus tard, malgré
la dégradation de son état de santé, il publie De la
vie et des moeurs d'Epicure, auquel il travaille depuis des années.
C'est que Gassendi recherche la vérité et la raison partout où
elles se trouvent, ne combattant une philosophie que lorsqu'elle devient contraire
à sa foi. Ce prêtre, prévôt de la cathédrale
de Digne, dont les prêches connaissent un grand succès, est philosophiquement
proche des sensualistes, de ceux pour qui toute idée vient des sens.
Mais le même Gassendi met en doute, avec une certaine ironie, les capacités
de l'esprit humain : "Dieu seul peut connaître
la vérité". Si les atomes sont le constituant universel
et fondamental de la matière, comme il le pense à la suite d'Epicure,
cela ne veut pas dire qu'ils sont éternels. Aussi marie-t-il harmonieusement
son amour de la science et son amour de Dieu.
En 1649, Gassendi regagne Digne, où, loin des intrigues de la Fronde,
il séjourne jusqu'en 1653. Il meurt le 24 octobre 1655, à l'âge
de soixante trois ans, peu après être revenu dans la capitale.
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