HENRI IV, CHEF DE GUERRE
A ARQUES, HENRI IV TIENT LE DUC DE MAYENNE EN ECHEC
(15
- 29 septembre 1589)
Roi de France depuis que son prédécesseur a été assassiné, Henri IV doit néanmoins conquérir, militairement et politiquement, un royaume en majorité acquis à la Ligue. Fin août 1589, il installe son camp à Dieppe, où pourront débarquer les secours espérés d'Angleterre. Là, à un contre cinq, les royaux vont devoir affronter les troupes du duc de Mayenne.
A Paris, on loue déjà à prix d'or fenêtres
et balcons pour assister au triomphe du duc de Mayenne lorsqu'il ramènera
Henri IV prisonnier. En ce début septembre 1589, le rapport de forces
n'est certes pas en faveur du Béarnais et les Parisiens, tout acquis
au catholicisme et aux Guise, ne donnent pas cher de sa peau.
Le 4 août, deux jours après la mort d'Henri III, le nouveau roi
protestant a déclaré vouloir "maintenir et conserver la
religion catholique, apostolique et romaine" et se faire instruire
"par un bon et légitime et libre concile". Mais cette
promesse ne lui a valu l'adhésion hésitante que d'une partie de
la noblesse tandis que certains, tels les ducs de Nevers et d'Epernon, ont opté
pour l'attentisme. Toutes les grandes villes se sont déclarées
pour la Ligue et son chef, Charles de Lorraine, duc de Mayenne, frère
cadet du défunt Henri de Guise. L'armée royale a fondu de moitié.
Henri IV ne peut compter que sur vingt mille hommes à peine pour conquérir
un royaume qui se refuse à lui. Il n'a pas choisi, comme on le lui a
conseillé, d'aller "refaire ses forces" dans le Sud, où
il compte davantage de partisans. En bon politique, il sait que s'il veut s'affirmer
roi de France, et non plus faire figure de roi de Navarre, il ne doit pas abandonner
le Nord.
Henri IV a donc scindé son armée en trois. Le duc de Longueville
est envoyé en Picardie et le maréchal d'Aumont en Champagne. Le
roi lui-même s'est réservé la Normandie, province riche
proche de Paris et dont les ports sont aptes à recevoir les renforts
promis par la reine Elizabeth 1ère d'Angleterre.
La seule véritable résistance est à
attendre de Rouen, ville ligueuse. En revanche, Dieppe, dont le gouverneur,
Aymar de Chaste, s'est déclaré pour le roi dès le 6 août,
ouvre ses portes. "Mes amis, point de cérémonie,
je ne demande que vos coeurs, bon pain, bon vin et bon visage d'hôte",
déclare Henri IV aux Dieppois qui l'accueillent le 26 août. Le
duc de Mayenne qui n'a pas l'intention de laisser ce port stratégique
au Béarnais se rue en Normandie, à la tête des quelques
trente cinq mille hommes de son armée parisienne, appuyée par trois cornettes
de reîtres, les milices cambrésiennes et les Lorrains du marquis
de Pont à Mousson. Le roi, quant à lui, n'a que huit mille hommes à
lui opposer. En cas de bataille rangée en terrain découvert, il
n'a aucune chance de l'emporter. Aussi, après avoir appelé Longueville
et Aumont à la rescousse, il préfère attendre à
Dieppe. Plutôt que de se cantonner dans la ville, il organise alors un
solide dispositif défensif près du bourg d'Arques, à six
kilomètres de là, au confluent de l'Arques et de la Béthune.
A partir du château d'Arques, qui surplombe la vallée, fortifications
et lignes de retranchement forment un ensemble cohérent jusqu'à
Dieppe. Le roi passe ses journées à surveiller les travaux de
terrassement. Il fait aussi renforcer les remparts de la ville et les défenses
du faubourg du Polet. Le site ainsi aménagé constitue une véritable
nasse où Mayenne va être pris au piège.
Le 15 septembre, les troupes de la Ligue qui, pour rejoindre
Dieppe, ont suivi l'Eaulne, un petit affluent de la Béthune, lancent
leurs premiers assauts. Le duc de Mayenne attaque le faubourg de Polet, pendant
que son demi-frère, le duc de Nemours, mène la charge contre le
camp du roi. Devant la farouche résistance du faubourg, il modifie ses
plans, regroupe ses forces pour conduire la bataille décisive contre
Henri IV.
Le 21 septembre au petit matin, le combat principal s'engage. Un épais
brouillard noie la vallée et neutralise l'artillerie royale. La lutte
est féroce, incertaine. Henri IV, à la tête de la cavalerie,
galvanise ses troupes et échappe de peu à la mort. Soudain, le
brouillard se lève. L'artillerie peut entrer en action. François
de Châtillon et ses cinq cents arquebusiers accourent depuis Dieppe. L'élan
de la cavalerie de Mayenne est brisé. A midi, le roi a gagné.
Malgré cet échec coûteux en vies humaines, le duc de Mayenne
ne renonce pas à prendre Dieppe. Il se lance vainement à l'assaut
du port, puis échoue devant le château d'Arques. Henri IV sait
qu'il ne pourra pas tenir longtemps face à ces attaques répétées.
Le salut lui vient alors de la mer. Le 23 septembre, une petite avant-garde
de cinquante gentilshommes anglais débarque avec munitions et argent. Elle est
bientôt suivie par mille deux cents Ecossais. Le 29 septembre, les navires d'Elizabeth
1ère, avec quatre mille soldats à leur bord, sont tout près d'aborder
alors que l'arrivée des renforts français conduits par Longueville
et Aumont, est par ailleurs imminente. Devant cette situation, le duc de Mayenne
préfère abandonner, et le roi sort vainqueur de ce premier duel.
Page MAJ ou créée le 06/07/2004