LOUIS XIV, SA VIE

 

LE ROI SOLEIL EXIGE LE RESPECT DE L'ETIQUETTE

Au château de Versailles, le luxueux palais où Louis XIV emménage le 6 mai 1682, l'étiquette règle chaque instant la vie du souverain et de la Cour. Ce cérémonial complexe, instrument de son pouvoir et de sa domination sur ses sujets, le Roi Soleil entend qu'il soit respecté à la lettre. Souvent tatillon, bien que les feux de sa gloire brillent avec ardeur, il portera ce rituel immuable au zénith.

L'étiquette a vu le jour au XVème siècle à la Cour de Philippe III le Bon, duc de Bourgogne, et doit son nom à un formulaire de règles élaboré à l'attention du "grand Duc d'Occident". Reprise par l'empereur Charles Quint, descendant du Bourguignon, elle a été officiellement adoptée par la Maison de Habsbourg en 1548. Au XVIIème siècle, le cérémonial dit "bourguignon", considéré comme un modèle du genre, a été repris par la plupart des cours royales et princières d'Europe. Ce rituel complexe et rigoureux a pour vocation d'accroître la distance qui sépare le souverain des courtisans et de codifier, en toute circonstance et à toute heure, l'accès à la personne royale. En France, l'étiquette a été fixée, en 1578 puis en 1585, par Henri III. Lorsque le Roi Soleil installe sa Cour à Versailles, le 6 mai 1682, elle est en passe d'être portée à sa quintessence et à son zénith. Le duc de Saint Simon, mémorialiste du règne, décrit ce mouvement perpétuel, ce mécanisme d'horlogerie parfaitement huilé comme "la mécanique de la vie de Louis XIV"!

Chaque instant de la journée, du lever au coucher du roi, est soumis à des règles strictes, auxquelles chacun doit se soumettre en tenant la place et le rôle qui lui sont impartis; et ce protocole s'étend aux réceptions des souverains et ambassadeurs étrangers, aux cérémonies, aux fêtes religieuses. Les édits et les ordonnances codifiant les apparitions du monarque sont préparés par le secrétaire de la Maison du roi, signés par Sa Majesté, enregistrés par le Parlement et conservés au Louvre.
Dès que Louis XIV ouvre les yeux, débute un rituel immuable qui organise tous ses actes. Le roi est réveillé à huit heures du matin par son valet de chambre. Puis, son premier médecin et son premier chirurgien le frictionnent et changent sa chemise, parce que, relate Saint Simon, "il était sujet à suer". Un quart d'heure plus tard, le grand chambellan fait son apparition, suivi des bénéficiaires des "entrées", visites strictement hiérarchisées et contrôlées par un page.
"L'entrée familière" est réservée aux princes et princesses de France; les "grandes entrées" sont le privilège des officiers de la Chambre, de la Garde Robe et de certains courtisans. Après que le chambellan a ouvert le rideau du lit et présenté l'eau bénite au roi, Louis XIV, en robe de chambre, passe dans le cabinet du Conseil, où on lui fait lecture d'un bref passage du livre de l'office du Saint Esprit. Là, il accueille les "secondes entrées", ceux qui ont obtenu des brevets d'affaires et ont été autorisés à présenter des requêtes, ainsi que ses lecteurs, ses intendants, son aumônier et ses ministres.

Puis, vient l'heure d'assister au spectacle du roi se chaussant et passant ses vêtements. Un privilégié présente la chaussure gauche, un autre la droite, et un troisième chausse le roi. Il en va de même pour chaque pièce de la garde robe. Parfois, Louis XIV allège la cérémonie et préfère se débrouiller seul, "avec grâce et adresse", précise Saint Simon.
Aucun détail n'est laissé au hasard. Ainsi du port du chapeau. Pendant les repas, il est de mise de rester couvert en présence du roi, et si l'on s'adresse à Sa Majesté de se découvrir. Devant les princes du sang, il suffit de porter la main au chapeau. Mais, lors des promenades dans le parc et les jardins, le cérémonial s'inverse! Tandis qu'il savoure l'air pur, dont il raffole, Louis XIV est le seul à garder son chapeau. A Marly, au contraire, il faut mettre son couvre-chef quand le roi sort du château et s'exclame : "Le chapeau, Messieurs!"
"Aussitôt courtisans, officiers des gardes du corps, gens des bâtiments se couvraient tous, en avant, en arrière, à côté de lui, et il aurait trouvé mauvais si quelqu'un eût non seulement manqué, mais différé à mettre son chapeau, et cela durait toute la promenade, c'est-à-dire entre quatre et cinq heures en été", raconte Saint Simon.

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Page MAJ ou créée le 1999

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