LES BOURBONS
LOUIS XIV, SA VIE |
LA MORT Malade depuis des mois, Anne d'Autriche sait qu'elle en a bientôt fini avec les souffrances. Ni les traitements des médecins ni les potions des charlatans ne peuvent la sauver du cancer du sein qui la ronge. La mère de Louis XIV n'aspire plus qu'à la délivrance et se prépare pieusement à rendre son âme à Dieu. Elle s'éteindra le 20 janvier 1666, à l'âge de soixante quatre ans. En ce mois de janvier 1666, le palais du Louvre
est figé, la vie de la Cour suspendue. Le roi et son frère cadet, le duc Philippe
d'Orléans, ne peuvent retenir leurs larmes. Le 16 janvier, Henri de La Mothe
Houdancour, grand aumônier de la reine mère et archevêque d'Auch, annonce à
Anne d'Autriche sa mort prochaine. "Elle
reçut cette nouvelle avec une force et une tranquillité chrétiennes",
note dans ses Mémoires Françoise de Motteville. "Personne
n'est bien aise de mourir. Mais il est vrai que Dieu me fait cette grâce d'en
être moins troublée que les autres", confie la souveraine
à sa fidèle amie. Le 17 janvier, après une nouvelle et violente crise, Anne d'Autriche reçoit le viatique et se recueille à la messe célébrée près de la ruelle de son lit. Le lendemain, elle est au plus mal. La journée est ponctuée par les visites de sa famille et des prètres. Le 19 janvier, elle demande à s'entretenir seule avec le roi, puis avec sa belle-fille, la reine Marie Thérèse, et enfin avec son fils cadet, le duc d'Orléans. Puis, il lui faut subir l'épreuve de l'interminable procession des courtisans admis à être les témoins de ses derniers instants. Sous les regards de l'assistance émue, ses fils lui tendent la nappe sur laquelle a été déposée l'hostie consacrée, que l'archevêque d'Auch et l'évêque de Mende sont allés quérir à l'église Saint Germain de l'Auxerrois. Elle reçoit la communion avec ferveur, puis bénit sa famille agenouillée autour de sa couche. Après cette concession au protocole, la reine-mère fait fermer les rideaux de son lit : son agonie lui appartient. Elle réclame l'extrême onction, que lui administre le curé de Saint Germain l'Auxerrois, avec les derniers sacrements et les huiles saintes. L'interminable journée s'achève. La mourante presse le roi et la reine d'aller souper, mais ils refusent de s'éloigner et restent à son chevet, de même que le duc d'Orléans, accablé. A l'aube du 20 janvier, le défilé des courtisans et des curieux dans sa chambre n'est pas même interrompu par la célébration des messes basses. "Tout y entrait, de toutes sortes de gens qui l'allaient regarder au nez. Cela me faisait la plus grande peine", témoigne, choquée, sa nièce la duchesse Anne Marie Louise de Montpensier, la Grande Mademoiselle. Mais Anne d'Autriche ne se soucie plus des importuns, seuls les psaumes retiennent son attention. Entre quatre et cinq heures du matin, lucide et serrant un crucifix dans ses mains, elle est agitée par une dernière convulsion, puis rend son âme à Dieu. Toute la nuit, Louis XIV et Philippe d'Orléans
pleurent leur mère, tandis que résonne le glas des cloches de la cathédrale
Notre Dame de Paris. Pendant deux jours, la dépouille mortelle est exposée,
revêtue, conformément au voeu de la défunte, d'une simple robe de bure franciscaine.
Tous viennent rendre un dernier hommage à la veuve de Louis XIII, que tous,
des princes du sang aux gens du peuple, respectent et regrettent. Au matin du
21 janvier, le coeur d'Anne d'Autriche est recueilli pour être solennellement
déposé au Val de Grâce, couvent que la souveraine a fondé et où elle rêvait
de s'éteindre, loin du monde. Page MAJ ou créée le 2002 |