LES BOURBONS
LOUIS XIV, Sa vie |
Les secrets de beauté de la marquise de Montespan L'altière marquise Françoise Athénaïs de Montespan exulte. Depuis quatre ans, elle est la favorite officielle. Et voilà qu'enfin, elle règne seule dans le coeur de Louis XIV car sa rivale, Louise de La Vallière, vient de quitter la Cour pour le couvent. A trente trois ans, la belle marquise est resplendissante. Fort satisfaite de son apparence, elle croit volontiers les flatteurs qui lui affirment qu'elle est au sommet de sa beauté. Une beauté chèrement et soigneusement entretenue. A Versailles, en ce printemps 1674, la Montespan est sûre d'elle, orgueilleuse de sa blondeur, de ses formes harmonieuses, de son teint nacré, du bleu de France de son regard moqueur. La modestie d'une La Vallière n'est pas de mise pour la très belle Françoise Athénaïs, marquise de Montespan. Elle considère qu'elle est née pour rayonner. Qu'elle est faite pour donner un éclat étincelant au règne du Roi Soleil, qui, pour sa part, ne s'en plaint pas, bien au contraire. Même quand elle lui fait des scènes, Louis XIV la couvre de bijoux. Il lui faut seulement rester la plus belle pour parader aux fêtes de Versailles. Avec la marquise de Montespan, le règne de l'apparat, des fards et des parures atteint son apogée. Elle s'en préoccupe avec art et application, en public comme en privé. Avec la conscience qu'il lui faut entretenir sans relâche cette grâce qu'elle a reçue comme un cadeau de la nature. La journée de Françoise Athénaïs débute rituellement avec une recette d'un de ces charlatans, vendeurs de rêve en vogue. Chaque matin, à jeun, elle avale un grand verre d'urine de mule. Cela assure, paraît-il, un teint frais et un oeil brillant ! Pour entretenir ses rondeurs, la marquise consomme ensuite un riche mélange bien sucré de lait et de farine de fèves, d'orge, de lentilles et de riz. Ce menu lui apporte l'énergie qui lui permet de soutenir le rythme effréné de la Cour. En ces temps où l'hygiène est pour le moins défaillante, la table de toilette de la Montespan est tout au plus une coiffeuse, devant laquelle la favorite passe des heures à brosser ses cheveux et à appliquer un maquillage savant. Elle use sans modération aucune du blanc de céruse. Cette substance (du carbonate basique de plomb dont l'usage a été interdit en 1905) est hautement nocive. Mais elle a l'avantage de blanchir un teint que la marquise préserve par ailleurs des rayons du soleil en dissimulant son visage sous une ombrelle ou des voiles. Enfin, par contraste, le blanc de céruse fait ressortir sur la peau pâle de la Montespan les rouges spectaculaires dont elle possède une palette complète. Françoise use et abuse de ces rouges qui deviennent fort prisés par les dames de la Cour. Dans le secret de son boudoir, la marquise utilise également des mixtures contre les rides, à base de moelle de bouf, de saindoux ou de bouse de vache. Il lui arrive même de boire de cette dernière, distillée, en guise de dépuratif printanier. La Montespan est une très bonne cliente des marchands de miracles et de mirages qui, tel un essaim d'abeilles, recherchent ses faveurs. Que la marquise utilise un de leurs produits miraculeux et ils sont sûrs de faire fortune tant auprès des dames de la Cour que des bourgeoises de Paris. Quant à Françoise, la nouveauté l'attire comme un aimant. Elle se précipite immédiatement sur le baume assurant la repousse des cheveux ou sur la dernière potion destinée à "effacer les flétrissements dus à l'enfantement". Elle qui, en huit ans, donnera huit enfants à Sa Majesté Louis XIV, sait bien qu'elle n'est pas à l'abri des meurtrissures qui affligent le commun des mortelles. Françoise ne dédaigne pas non plus certains philtres prometteurs et magiques, qu'ils soient d'amour ou de jouvence. Elle ne sait pas encore que cette quête éperdue de beauté, de puissance et de jeunesse entraînera sa perte, quelques années plus tard, et provoquera son exil. Au moment de l'Affaire des Poisons, en 1680, elle sera accusée d'avoir eu recours aux messes noires et aux poisons pour s'assurer les faveurs royales. Pour l'instant, elle ne sent pas le danger de cette dérive . En négligé de mousseline et de dentelles, elle se livre avec volupté aux mains savantes de son coiffeur, le sieur Champagne, premier coiffeur officiel pour dames. La séance est publique. Françoise y invite ses courtisans préférés. Ils assistent, émerveillés, à l'élaboration d'une invraisemblable coiffure, fragile échafaudage de boucles. Toujours soucieuse de son apparence, la marquise rehausse, en cachette cette fois, la blondeur miellée de ses cheveux, selon une vieille recette vénitienne. Page MAJ ou créée le |