LES BOURBONS
LOUIS XV, LES ARTS ET LES SCIENCES |
WATTEAU ET LES "FETES GALANTES" Contemporain de la fin du règne de Louis XIV, Antoine Watteau reste dans les mémoires comme le peintre majeur de cette ère de bouleversements qu'a été la Régence. A travers une peinture claire et lumineuse, et des sujets fort osés pour l'époque, il a été le témoin de l'éveil du XVIIIème siècle aux plaisirs de la vie. L'Embarquement pour l'île de Cythère, son morceau de réception à l'Académie, présenté en 1717, en est la parfaite illustration. En 1712, l'Académie royale de Peinture et de Sculpture
agrée Antoine Watteau. Agé de vingt huit ans, celui-ci a exposé
deux tableaux militaires fort remarqués par les académiciens.
Mais, pour être définitivement reçu, il lui faut réaliser
son morceau de réception, c'est-à-dire une oeuvre dont
le sujet est exceptionnellement laissé à son choix. Pourtant,
l'artiste ne semble pas pressé de s'exécuter. Il entend plutôt
profiter du succès qui se fait enfin jour après tant d'années
difficiles. Vers 1704, Watteau a fait la rencontre, décisive
pour sa carrière, de Claude Gillot. Celui-ci l'a initié aux sujets
issus de la comédie italienne, lui a donné le goût des décors
de théâtre et a profondément influencé son art, ce
dont le peintre lui a toujours été reconnaissant. Mais, en 1708,
les deux artistes se sont brouillés et séparés. D'un caractère
inquiet et instable, plutôt tourmenté, changeant souvent de maison
et de protecteur, Watteau a quitté Gillot pour Claude Audran III, concierge
(c'est-à-dire conservateur) du palais du Luxembourg. Depuis, il exécute
pour de riches commanditaires parisiens des travaux de décoration intérieur
et passe pour le maître du décor rocaille. C'est alors qu'il est
fasciné par la série sur la vie de Marie de Médicis réalisée
par Rubens et conservée au Luxembourg. C'est pour lui la découverte
de la touche libre et claire du grand maître d'Anvers. Le 28 août, Watteau remet enfin son oeuvre à l'Académie : c'est L'Embarquement pour l'île de Cythère, que l'on peut aujourd'hui admirer au musée du Louvre. Cette toile à l'atmosphère à la fois sereine et mélancolique réprésente des couples d'amants sur le point de partir pour Cythère, l'île de Vénus et de l'Amour. Les personnages évoluent dans un cadre naturel : grands arbres au premier plan, montagnes bleues dans le style de Léonard de Vinci en toile de fond. Par son caractère galant, le sujet, évocation d'un amour charmant et courtois où un badinage raffiné le dispute à un érotisme discret, est d'une grande hardiesse pour l'Académie, habituée aux tableaux à sujet historique, mythologique ou religieux. Peint au début de la Régence, période favorable à l'évolution des moeurs et des arts vers plus de souplesse et de légèreté. L'Embarquement pour l'île de Cythère rencontre un très vif succès. Pour le roi de Prusse, Watteau en réalisera une seconde version, un peu plus achevée et plus descriptive, mais moins poétique, aujourd'hui à Berlin. Dans ses oeuvres, Watteau se fait l'interprète d'un nouvel art de vivre. Il met en scène des thèmes jusque-là rarement abordés par la peinture et qui sont regroupés sous l'expression de "Fêtes Galantes". Les deux Cousines, Assemblée dans un parc, Le Faux Pas sont autant d'hymnes à l'amour, de visions d'un monde enchanté et irréel. Dans les registres de l'Académie, le titre Embarquement pour l'île de Cythère est barré pour être remplacé par celui de Fête galante. C'est ainsi que les sujets mis à la mode par Watteau ont acquis leurs lettres de noblesse et que les fêtes galantes, tout comme la peinture d'histoire, sont devenues un genre à part entière. Page MAJ ou créée le 2003 |