LES BOURBONS
LOUIS XV, CHEF D'ETAT |
L'AFFAIRE CALAS : ERREUR JUDICIAIRE OU FANATISME
RELIGIEUX? S'agit-il, dans cette étrange affaire de suicide, de meurtre, de cabale religieuse ou de simple erreur judiciaire? Le 13 octobre 1761, Marc Antoine Calas, vingt huit ans, met fin à ses jours. Les preuves du suicide sont flagrantes. Et pourtant, c'est son père, Jean Calas, que l'on arrête sous la pression populaire. Condamné à mort, Calas sera réhabilité par Voltaire. L'affaire, qui jettera un discrédit sur la justice de l'Ancien Régime, restera dans les mémoires comme l'exemple même de l'intolérance dont les catholiques firent preuve à l'égard des protestants. Jean Calas, établi à Toulouse depuis plus de quarante ans, exerce le métier de négociant en tissus. Bon père de famille, il est huguenot, comme sa femme, ses enfants, excepté son fils Louis, qui a abjuré le protestantisme. Jean Calas jouit d'un bien honnête et n'entretient ni procès ni querelle. Le 13 octobre 1761, Maître Gobert Lavaisse, jeune avocat de Toulouse, connu pour la douceur de ses moeurs, cherchant un cheval de louage pour rejoindre ses parents à la campagne, rencontre son ami Marc Antoine et son père, Jean Calas. Ces derniers le prient à souper. Il accepte. Sur les sept heures, selon l'usage familial, on se met à table, au premier étage de la maison. Au dessert, Marc Antoine, de nature sombre et mélancolique, se lève de table et passe à la cuisine. La servante, catholique, femme pieuse et dévouée, lui demande : "Avez vous froid monsieur l'aîné?" "Bien au contraire, je brûle", répond-il. Peu avant dix heures du soir, Maître
Lavaisse décide de prendre congé de ses hôtes. Le cadet, Pierre Calas, flambeau à la
main, le raccompagne. Ils descendent les escaliers. Soudain, tous deux poussent de grands
cris d'alarme. Au bas de l'escalier, Marc Antoine est retrouvé mort, pendu! Le père
dissimule le suicide, considéré alors comme un déshonneur et pour éviter à son enfant
le sort infâme réservé à ceux qui ont mis volontairement fin à leurs jours. Sa
conduite va amener les enquêteurs à examiner l'hypothèse d'un crime. D'autant que la
rumeur publique affirme déjà que Calas a tué son fils pour l'empêcher de se convertir
au catholicisme. L'enquête est menée, non sans malveillance, comme un procès en sorcellerie. Le corps de Marc Antoine est transporté à l'Hôtel de Ville. C'est là qu'est établi le procès verbal. Le 18 novembre, Anne Rose Calas, son fils Pierre et la servante catholique sont mis aux fers à Toulouse et condamnés à la question. Leurs biens sont confisqués. La mère abandonne sa dot et son bien. Pierre est banni et placé dans un couvent de Jacobins. On célèbre en l'honneur de Marc Antoine des funérailles catholiques solennelles. De mauvais médecins démontrent que le jeune homme n'a pu se pendre lui-même. Mais il est prouvé que tous les accusés ne s'étaient pas quittés un seul instant pendant le meurtre. Le père, la mère, Maître Lavaisse et la servante sont-ils donc tous coupables? Il est démontré que Marc Antoine n'a pas fait acte de catholicité. Pourtant, le Parlement entend quatre vingt sept dépositions relatives à sa conversion. Les jugements sont contradictoires, les indices douteux et mal exposés. Dans la bonne ville de Toulouse, les calomnies vont bon train. Chacun s'acharne à démontrer qu'il y a bien eu crime. Le 9 mars 1762, Jean Calas est déclaré coupable, par huit voix contre cinq, condamné à subir la question ordinaire et extraordinaire, à être roué vif puis jeté au bûcher. L'infortuné père prend Dieu à témoin de son innocence et le conjure de pardonner à ses juges. Page MAJ ou créée le 2000 |