LES BOURBONS
LOUIS XV, LES PERSONNALITES
|
BEAUMARCHAIS CONTRE LE JUGE GOEZMAN Le 6 avril 1773, dans l'affaire de l'héritage Pâris Duverney, un jugement est rendu contre Pierre Augustin Caron de Beaumarchais. Déshonoré et ruiné, celui-ci entend obtenir réparation de cette injustice et se retourne contre le juge Goëzman, rapporteur à son procès. Il va rédiger quatre "Mémoires" successifs et révéler la corruption du magistrat et de son épouse avec une verve et une férocité qui mettront le tout-Paris de son côté. Louis Valentin Goëzman de Thurne, qui va être l'un des adversaires les plus retors de Pierre Augustin Caron de Beaumarchais, a été nommé en 1770 conseiller de la Grand-Chambre du Parlement. Ce nouveau Parlement, instauré par Louis XV, se révèle tout aussi corrompu que le précédent. Les juges n'hésitent pas à se faire payer pour accorder des audiences aux justiciables, chargeant un comparse d'encaisser ces pots de vin afin de préserver un semblant de réputation. A ce jeu, la jeune et jolie épouse du juge Goëzman, dotée
d'un fort caractère et totalement dépourvue de scrupules, est devenue experte.
"Quand mon mari sera nommé rapporteur, a-t-elle
annoncé, je saurai bien plumer la volaille sans la faire
crier". C'est à ce couple plus que douteux que va avoir affaire
Beaumarchais, traîné en justice par le comte de La Blache, neveu et héritier
de son bienfaiteur et associé le financier Joseph Pâris Duverney, qui conteste
un arrêté de compte conclu entre le défunt et son protégé. Dès le 1er avril
1773, Beaumarchais a sollicité une audience au juge Goëzman, qui l'a éconduit
à plusieurs reprises. Après bien des tergiversations, ses amis le convainquent
de verser cent louis au magistrat. Lorsqu'il reçoit enfin le solliciteur, le
juge lui affirme étrangement que son affaire est perdue d'avance. Sans doute
le comte de La Blache a-t-il pris les devants et s'est-il montré plus généreux
que son contradicteur! Ayant perçu "les traces d'un
rire équivoque" sur le visage de Goëzman, c'est très inquiet que
Pierre Augustin réintègre la prison de For l'Evêque, où il se trouve fort
inopportunément enfermé à la suite d'une rixe avec son ami le duc de Chaulnes. Si les cent louis et la montre ont été restitués, madame
Goëzman a gardé les quinze louis. Dès le 21 avril, Beaumarchais les lui réclame.
Elle ne peut que les rendre, reconnaissant ainsi les avoir conservés par devers
elle, ou nier les avoir reçus, mais la transaction a eu de nombreux témoins.
Le 6 mai, élargi, Pierre Augustin a les coudées plus franches et, jouant la
carte de l'opinion publique, narre sa mésaventure en détail dans les cafés et
les salons. Mais Goëzman, ridiculisé et quasiment compromis, s'empresse de se
défendre, en attaquant. Il porte plainte pour imputations calomnieuses et tentative
de corruption; ce qui ne l'empêche pas de faire répandre sur son détracteur
des allégations toutes plus ignominieuses les unes que les autres. Page MAJ ou créée le 2003 |