LES BOURBONS
LOUIS XV, LES PERSONNALITES
|
SA VIE PARISIENNE Entré au service de la France au cours de l'été 1720, Maurice de Saxe a beau être l'un des plus grands militaires de son temps, il n'en est pas moins un habitué des plaisirs de la Cour du Régent Philippe d'Orléans. Quand il n'est pas au combat, il mène grand train, fréquente les comédiennes. Entre deux campagnes, il réfléchit aussi à l'art de la guerre; jusqu'à relater son expérience et exposer ses théories dans un ouvrage intitulé Mes rêveries. Maurice de Saxe, dont la nature vigoureuse aspire à l'action, a pour unique passion la guerre. Sa force musculaire est proverbiale : on le dit capable de tordre entre ses doigts un fer à cheval ou un écu de six francs; ou encore de faire un tire-bouchon d'un clou. Quand il est contraint à l'oisiveté, celui qui est réputé comme l'un des plus grands militaires de son temps se perd en débauches et en beuveries. Elevé à la Cour baroque de Dresde, où l'amour du luxe et les jeux d'alcôves contrebalancent seuls l'amour de la guerre, il est un homme difficile à vivre. Marié par sa mère à l'âge de vingt ans à Jeanne Victoire de Loeben, il est incapable de s'attacher à son épouse, dont il divorce juste avant de venir s'installer en France au cours de l'été 1720. Accaparé par la Cour et ses plaisirs, Maurice de
Saxe mène grand train, assiste aux cérémonies, aux fêtes
et aux chasses. Une liaison avec la princesse de Conti lui ayant attiré
la haine jalouse du mari, il préfère fréquenter les petites
femmes de l'Opéra et de la Comédie. C'est ainsi qu'un soir
de 1720, il assiste à une représentation de Phèdre
de Racine avec Adrienne Lecouvreur dans le rôle-titre. Subjugué
par le talent de la comédienne, il lui rend visite après la pièce
: c'est un coup de foudre réciproque et le début d'une passion
amoureuse de quatre ans. Adrienne est une grande actrice, dont la diction souple
et naturelle tranche sur le style déclamatoire de ses contemporains.
Issue d'un milieu modeste, l'amour du théâtre et des vers lui a
ouvert les portes des salons et a fait d'elle une artiste fort en vogue, courtisée
par le jeune Voltaire. Quand elle rencontre Maurice de Saxe, elle a déjà
vingt huit ans et deux enfants nés de pères différents.
A son côté, l'homme de guerre se civilise : il lit beaucoup, améliore
un peu son français, prend goût à la musique et au théâtre.
Mais il est incapable de s'attacher profondément et ne sacrifie rien
à cette passion : ni son goût pour la guerre ni ses relations avec
d'autres femmes. "Nous sentons bien différemment
tous deux, vous ne comptez pas assez sur moi, et j'ai grand peur de trop compter
sur vous", lui écrit Adrienne Lecouvreur avec lucidité
dès 1721. Maurice de Saxe a également une liaison avec la
jeune Marie Rinteau, elle aussi comédienne, qui lui donnera une fille,
Aurore, qui sera la grand-mère de l'écrivain George Sand. Ainsi
qu'avec Justine Favart, fille du directeur de l'Opéra-Comique, à
qui il sera très attaché. Mais il réfléchit aussi
beaucoup à l'art de la guerre. Ebauché en 1732 en treize nuits,
son livre Mes rêveries est achevé en 1738. Il y décrit
la théorie de la guerre qu'il a mise en pratique lors de la campagne
de 1734, insistant sur l'importance des partis volants qui donnent à
une attaque contre l'infanterie adverse la rapidité des charges de cavalerie.
Il se soucie aussi de l'intendance, à l'opposé des autres théoriciens
qui la négligent par trop et préfèrent les questions de
stratégie, plus nobles. Il passe en revue la manière de lever
les troupes, l'uniforme, la discipline. Il prévoit les avantages du recrutement
légal et préconise ce mode d'enrôlement comme seul moyen
de disposer d'une armée homogne et loyale. Page MAJ ou créée le 2003 |