LES BOURBONS
LOUIS XV, SA VIE |
UN LOURD HERITAGE Louis XV, qui dans sa jeunesse a été surnommé le Bien Aimé, est devenu à la fin de son règne fort impopulaire. Le 10 mai 1774, il s'est éteint dans l'indifférence quasi générale. Sa mort ne suscitera guère qu'ironie et pamplets stigmatisant sa vie licencieuse. Au point qu'on ne lui fera même pas de funérailles publiques. Tous ses sujets, gentilshommes et hommes du peuple, attendent la mort de Louis XV. Sauf le cercle des intimes, qui, avec le temps, s'est restreint presque exclusivement à la famille royale. Tandis qu'il agonise à Versailles, dans les premiers jours de mai 1774, les intrigues se nouent. Les uns espèrent le retour d'exil de l'ancien ministre Etienne de Choiseul. Le Parlement critique ouvertement une politique étrangère jugée désastreuse et les crises économiques qui affectent le pays depuis des années. Pire, l'impopularité de Louis XV désigne avant tout le caractère de l'homme, considéré comme débauché et amoral. Un de ses proches, le duc François de Liancourt, grand maître de la Garde Robe royale, témoigne dans son journal de l'indifférence générale lors de son ultime maladie : "Le roi était tellement avili, tellement méprisé, que rien de ce qu'on pouvait faire pour lui n'avait droit d'intéresser le public". Nul n'éprouve de pitié pour un monarque qui a apprauvi le royaume et a pris pour dernière maîtresse une femme légère, Jeanne Bécu, comtesse Du Barry. "On ne voyait point dans Paris, note Liancourt, de gens inquiets courir, s'empresser, s'arrêter pour avoir de ses nouvelles. Tout avait l'air calme et tranquille, et tout était joyeux et content". Un autre fidèle de Louis XV, le duc et mémorialiste
Emmanuel de Croÿ souligne également cette atmosphère si étrange
lors de la disparition d'un roi : "Je ne suis pas du tout content de la
nation : comme il faisait beau, il y eut beaucoup de monde dans le parc, les
cabarets étaient pleins et personne, hors de l'appartement, n'eut l'air
touché (...). Un étranger, ni à Versailles, pas même
dans les cours, la galerie ou les jardins, ni dans les rues de Paris, n'aurait
pu s'apercevoir qu'on y perdait un roi". Cependant, la capitale semble
s'émouvoir à l'annonce de l'amende honorable du souverain, de
sa confession et du renvoi de la favorite. La Cour, en revanche, ne manifeste
guère de compassion. Seules Mesdames Adélaïde, Victoire et
Sophie osent s'approcher de leur père sans craindre la contagion. Pour
cette même raison, les autres membres de la famille sont tenus à
l'écart. Tout se passe comme si la mort imminente du vieux roi augurait
d'un avenir meilleur. Louis XV ne laisse pas de testament politique. Sa démarche
en la matière est uniquement d'ordre personnel. Il a consigné
ses dernières volontés huit ans auparavant, le 6 janvier 1766,
après la mort de son fils le dauphin Louis Ferdinand. Page MAJ ou créée le 06/2004 |