LES BOURBONS
LOUIS XVI, LES PERSONNALITES |
L'APOSTROPHE DE MIRABEAU Rien ne destinait la séance royale du 23 juin 1789 à entrer dans l'Histoire. Du roi ou de la jeune Assemblée Nationale, on ne sait encore qui aura le dernier mot. Une partie du bras de fer révolutionnaire va se jouer à propos d'une question de protocole. Rabroué, pris de haut par le marquis de Dreux Brézé, maître des cérémonies du roi, le Tiers Etat, par la voix du comte de Mirabeau, s'insurge et réplique. "La volonté de la Nation" et "la force des baïonnettes" feront le reste. Le 23 juin 1789, Louis XVI convoque une séance royale dans la salle des Menus Plaisirs à Versailles. Sont conviés les représentants de la noblesse, du clergé, et des Communes, le Tiers Etat. Le roi est ulcéré par les prérogatives que les députés du Tiers Etat se sont octroyées le 17 juin, en se proclamant Assemblée Nationale, et le 20 juin, par le serment du Jeu de Paume, en jurant de ne se séparer qu'après avoir donné une Constitution à la France. Il entend profiter de cette journée pour rétablir son autorité et enlever à la jeune Assemblée les pouvoirs qu'elle vient de prendre. Vers onze heures du matin, le roi, d'ordinaire
très ponctuel, arrive en retard, accompagné de la reine Marie
Antoinette et précédé d'un cortège bigarré
de fauconniers, de pages, d'écuyers, de gardes. Un peu plus tôt,
les députés du Tiers Etat ont subi une nouvelle humiliation protocolaire.
Alors que les deux ordres supérieurs ont été introduits
dans la salle des Menus Plaisirs par la grande porte, les représentants
du peuple ont dû attendre sous la pluie qu'on veuille bien les faire entrer. C'est alors que Mirabeau, orateur brillant et grandiloquent, prend la parole : "Quelle est cette insultante dictature? L'appareil des armes, la violation du temple national, pour vous commander d'être heureux? Qui vous fait ce commandement? Votre mandataire! Qui vous donne des lois impérieuses? Votre mandataire! Lui qui doit les recevoir de nous, Messieurs, qui sommes vêtus d'un sacerdoce politique et inviolable, de nous enfin de qui vingt cinq millions d'hommes attendent un bonheur certain, parce qu'il doit être consenti, donné et reçu par tous. Mais la liberté de vos délibérations est enchaînée... Je vous demande qu'en vous couvrant de votre dignité, de votre puissance législative, vous vous enfermiez dans la religion de votre serment : il ne nous permet de nous séparer qu'après avoir fait la Constitution". Comme une ovation salue cette déclaration,
le maître des cérémonies, le marquis de Dreux Brézé,
entre dans la salle et s'exclame, péremptoire : "
Monsieur, avez vous entendu l'ordre du roi?" Mirabeau
se lève et, toisant Dreux Brézé, lance avec panache : "Oui,
Monsieur, nous avons entendu les intentions qu'on a suggérées
au roi, et vous, Monsieur, qui ne saurait être son organe auprès
de l'Assemblée Nationale, vous qui n'avez ici ni place, ni voix, ni droit
de parler, vous n'êtes pas fait pour nous rappeler son discours... Allez
à ceux qui vous envoient que nous sommes ici par la volonté de
la Nation et que nous n'en sortirons que par la force des baïonnettes"! Page MAJ ou créée le 2001 |