LOUIS XIII, LES PERSONNALITES
LE PERE JOSEPH, EMINENCE GRISE DE RICHELIEU
François Leclerc du Tremblay, plus connu sous le nom de père Joseph, est incontestablement le plus fidèle des collaborateurs du cardinal de Richelieu. Depuis leur rencontre en 1609, jusqu'à la mort du capucin, en 1638, une solide amitié lie les deux hommes.
Né le 4 novembre 1577,
François Leclerc est le descendant d'une lignée de magistrats, par son père, et d'une
famille de très ancienne noblesse terrienne, par sa mère. Dès son plus jeune âge, il
fait preuve d'une intelligence exceptionnelle. A quatre ans, il étudie déjà le latin et le
grec. Sa vocation se manifeste l'année de ses quatorze ans. Renonçant à fuir la maison
familiale pour entrer au couvent, il fait cependant le voeu de consacrer sa vie à
Dieu. A dix huit ans, brevet de gentilhomme en poche, le jeune baron de Maffliers (un titre
hérité de son grand-père maternel) fait son entrée à la Cour d'Henri IV. Joli garçon
et esprit brillant, mais cependant d'une grande discrétion, il y fait sensation.
Gabrielle d'Estrée, la maîtresse du roi, le surnomme le "Cicéron de la France et de son
époque". Après une
brève carrière militaire, François Leclerc passe une année dans les bas-fonds de Paris. Là, il se consacre aux miséreux et aux malades. Le choc de cette expérience le
confirme dans sa vocation. Malgré les réticences de sa mère, il opte pour l'ordre des
Capucins et revêt l'habit de novice, le 2 février 1599, au couvent d'Orléans.
Ordonné prêtre en 1604, le père Joseph (puisque c'est désormais son nom) entame une
carrière fulgurante. Ses talents d'orateur sont tels qu'ils doit prêcher en plein air,
faute de pouvoir accueillir tous les fidèles à l'intérieur de son église. En 1609, il
est supérieur du couvent des Capucins à Tours lorsque Eléonore de Bourbon, tante
d'Henri IV et abbesse de Fontevrault, le charge de réformer l'abbaye. Souhaitant partager
cette lourde tâche, le capucin songe à Armand du Plessis de Richelieu. A vingt
quatre ans, le
jeune évêque de Luçon a lui aussi une réputation bien établie. Les deux hommes
inaugurent alors un lien d'amitié que, durant trente ans, nulle épreuve ne pourra briser.
Lorsque le cardinal de
Richelieu entre au Conseil du roi Louis XIII, en 1624, il fait immédiatement appel au
père Joseph. Celui-ci organise un véritable service de renseignements parallèle,
recourant à de nombreux capucins. Le père d'Alais est ainsi chargé des relations avec
la Bavière pendant que celles avec l'Empire germanique sont dévolues au père de Casal.
L'Europe centrale est alors engagée dans l'inextricable guerre de Trente ans et la toile
d'araignée des "honorables correspondants" du père Joseph permet à Richelieu
de tisser ses alliances au gré des circonstances.
Progressivement, le capucin s'impose comme ministre des Affaires étrangères officieux,
faisant parfois peu de cas du personnel diplomatique en place. De l'affaire de la
Valteline, en 1625, au siège de La Rochelle, en 1628, le père Joseph est de toutes les
"campagnes" de Richelieu. Après la reddition de La Rochelle, le cardinal, qui
n'est pas un ingrat, propose à son ami et conseiller le titre d'évêque de la ville.
Mais le père Joseph refuse cet honneur. Il est, et reste, un homme de l'ombre.
Entre les deux ecclésiastiques, règnent une entière confiance et une indissoluble
amitié. Richelieu se plaît à surnommer le père Joseph tour à tour Ezéchieli ou
Tenebroso-Cavernoso, selon qu'il fait référence à ses talents de prédicateur ou de
négociateur et de manipulateur hors pair. Cette complicité se double d'une proximité de
tous les instants. Richelieu et son conseiller travaillent souvent la nuit, entre deux et six
heures du matin. Puis, le cardinal se couche deux petites heures. C'est le moment que choisit
le père Joseph (qui loge dans une petite pièce attenante à la chambre du ministre de
Louis XIII) pour recevoir ses agents, souvent des capucins, venus lui présenter leur
rapport.
Page MAJ ou créée le 1999