LES CAPETIENS
LOUIS IX, CHEF D'ETAT
L'AFFAIRE DE LYON
(Février 1270)
En 1267, la vacance du siège épiscopal de Lyon provoque un conflit entre les bourgeois de la ville et les chanoines du chapitre cathédral de Saint Jean. Deux ans plus tard, les hostilités durent toujours, et les Lyonnais font appel à l'arbitrage de Louis IX. Le roi de France désigne une commission qui va rendre son verdict en février 1270
En 1267, Philippe de Savoie, oncle maternel de la reine
Marguerite de Provence et archevêque de Lyon depuis vingt ans (mais il n'a jamais
été consacré), renonce à la mitre pour épouser Alix, l'héritière du comté de
Bourgogne. La vacance du siège archiépiscopal entraîne un conflit entre les
bourgeois de la ville et les chanoines du chapitre cathédral de Saint Jean,
chargé d'élire un nouveau prélat.
La querelle s'envenime et dégénère en véritable
guerre lorsque les Lyonnais envahissent la cathédrale et son cloître. Expulsés,
les chanoines n'ont d'autre choix que de se réfugier dans le couvent de Saint
Just, à l'extérieur des remparts de la cité. Afin de se protéger, les religieux
fortifient leur retraite. De leur côté, les bourgeois font de même et renforcent
leurs défenses. Pendant deux ans, les hostilités se prolongent, au fil d'une
suite d'escarmouches, de batailles et de trêves. Alors que l'évêque d'Autun,
en charge de l'administration de l'archevêché pendant la vacance de son siège,
a excommunié les adversaires du chapitre, aucune solution au règlement du conflit
ne se fait jour.
En 1269, les deux partis signent une trêve. Les bourgeois
lyonnais, bien que relevant de l'Empire, font alors appel à l'arbitrage du roi
de France. Les chanoines de Saint Jean, eux, en appellent à Rome par l'intermédiaire
du cardinal d'Albano, légat du pape. Louis IX délègue deux émissaires laïcs,
le chevalier Jean d'Escrennes et le bailli de Bourges Henri de Grandvilliers,
et le légat d'Albano désigne pour les seconder l'abbé Guillaume de Cluny.
Le
22 janvier 1270, les représentants du roi et du légat font leur entrée à Lyon,
où ils reçoivent les doléances de chacun des partis. En plus du dédommagement
des dégâts causés par le conflit, le chapitre réclame la destruction des tours,
barrières et ponts fortifiés construits par les Lyonnais, ainsi que le comblement
des fossés creusés autour du couvent de Saint Just.
Au mois de février, la
commission rend son verdict. Toutes les fortifications, y compris celles qui
ont été édifiées par les chanoines à Saint Just, devront être mises à bas. Les
prisonniers seront libérés et les maisons canoniales restituées. Laïcs et religieux,
sommés de ne pas reprendre la lutte, sont dans l'obligation d'accepter cet arbitrage
sous peine d'excommunication. Deux prud'hommes, juristes patentés, Jean Le Queux,
chanoine de Nevers, et Guy Lebras, sont chargés de mener les dernières négociations
en vue d'aboutir à un statut définitif.
Mais ces mesures, pourtant sages et équitables, se révèlent
impuissantes à contraindre bourgeois et chanoines de cesser la lutte : une nouvelle
commission doit être mise sur pied. Sur le point de partir pour la croisade,
Louis IX confie le règlement de l'affaire à Simon de Nesle et à l'abbé de Saint
Denis, Mathieu de Vendôme, à qui il a par ailleurs confié la garde du royaume
pendant son absence, et leur octroie le pouvoir de nommer d'autres délégués
en cas de nouveaux litiges. La querelle ne semblant manifestement pas éteinte,
le roi prend solennellement les bourgeois lyonnais sous sa sauvegarde.
Lyon
étant ville d'Empire, le souverain n'a pas lieu à priori d'intervenir dans cette
querelle, bien que certains conflits se déroulent sur des domaines, appartenant
aux bourgeois ou aux chanoines, situés dans le royaume de France, à la limite
des territoires impériaux. Souverain soucieux de faire respecter la loi divine
sur terre et à la réputation d'arbitre impartial, il considère cependant comme
de son devoir de répondre à l'appel qui lui a été lancé. En s'entremettant,
il renforce son autorité aux frontières de l'Empire. Malgré son arbitrage, le
conflit reprendra. Il ne sera finalement réglé qu'à partir de 1272 par l'hommage
de l'archevêque de Lyon à Philippe III; puis par l'annexion de l'archevêché
par Philippe IV le Bel.
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