LES CAROLINGIENS

CHARLES II LE CHAUVE, CHEF D'ETAT

 

CHARLES LE CHAUVE EST COURONNE EMPEREUR D'OCCIDENT
(NOEL 875)

A la Noël 875, soixante quinze ans après Charlemagne, Charles II le Chauve est couronné Empereur d'Occident par le pape Jean VIII. En dépit de l'opposition manifestée, les armes à la main, par son demi-frère Louis le Germanique, il espère ainsi réaliser son rêve : restaurer l'Empire de son illustre aïeul.

Louis II, Empereur et roi d'Italie, est mort le 12 août 875 à Brescia. Le fils de Lothaire 1er, dernier représentant mâle légitime de la branche aînée des Carolingiens, disparu, le titre impérial doit être attribué lors d'une élection contrôlée par l'Eglise, comme l'a prévu la Constitution de 817. Le pape Jean VIII interprète ce texte à sa manière et, fin août, convoque de son propre chef une assemblée de prélats et d'aristocrates romains par lesquels il fait acclamer Charles II le Chauve comme Empereur. "Charles se distingue par sa vertu, ses combats pour la religion et le droit, et son souci d'honorer les clercs et de les instruire. Dieu le désigne pour l'honneur et l'exaltation de la Sainte Eglise romaine", affirme-t-il.

Jean VIII respecte ainsi les engagements pris par son prédécesseur Hadrien II, qui, dès 872, a désigné Charles le Chauve comme le candidat à l'Empire du Saint Siège : "Nous vous confions sous le sceau du secret, et ceci ne devra être communiqué à personne, sinon à des gens très sûrs, que (...) si Votre Noblesse survit à notre Empereur, nous donnerait-on des monceaux d'or, nous n'agréerons, ne solliciterons ou n'accueillerons jamais de notre plein gré dans ce royaume et dans l'Empire romain nul autre que toi-même. Si tu survis à notre Empereur, c'est toi que nous souhaitons comme chef, comme roi, comme patrice, comme Empereur". Comme Hadrien II, Jean VIII entend attribuer lui-même la couronne impériale, et à un souverain assez puissant pour protéger les Etats Pontificaux, menacés tant par Constantinople que par les Sarrasins et les Lombards. Fort cultivé, roi du pays le plus civilisé d'Occident, Charles le Chauve a prouvé son intérêt pour les questions ecclésiastiques et son intransigeance vis-à-vis des hérétiques. Il est ainsi préféré à son demi-frère qui, alors qu'il se met en route pour l'Italie, envahit la Francie occidentale. Chemin faisant, Louis le Germanique obtient le ralliement de plusieurs hauts dignitaires du royaume. Presque sans combattre, il s'installe au palais d'Attigny, au moment où Charles le Chauve entre à Rome. Mais les fidèles du roi de Francie organisent la résistance et, au bout de quelques semaines, Louis le Germanique doit repartir. Il n'a pas eu, semble-t-il, la volonté de s'emparer de la couronne de son demi-frère, mais, d'après les Annales de Fulda, il "entendait contraindre Charles à quitter l'Italie". Il n'y parvient pas : le roi de Francie est bien décidé à se faire couronner Empereur. Non seulement son élection est un succès politique, mais elle lui offre la chance de restaurer l'unité de l'Empire d'Occident et de poursuivre l'oeuvre de Charlemagne.

Charles le Chauve est solennellement accueilli par Jean VIII sur le grand escalier de la Basilique Saint Pierre de Rome, le 17 décembre 875. Le jour de Noël, 75 ans exactement après Charlemagne, il est sacre, couronné et acclamé Empereur d'Occident selon le même cérémonial que son grand-père. Il offre au pape une précieuse Bible, conservée à Saint Paul-hors-les-Murs et le trône dit "de Saint Pierre", qui aujourd'hui encore figure dans un reliquaire de la basilique du Vatican. L'atmosphère est cependant différente. On n'assiste pas à des débordements de joie : la division des royaumes carolingiens ne laisse guère d'illusions sur la portée réelle de ce couronnement et, Charles le Chauve le premier, chacun sait que ses moyens d'action réduits ne lui permettront que difficilement exercer le pouvoir conféré par Rome. De retour en son royaume, Charles le Chauve fait reconnaître son accession au titre d'Empereur par ses fidèles. Il rassemble en son palais de Ponthion de nombreux laïcs et une cinquantaine d'évêques, et se présente devant eux vêtu du costume impérial à la mode byzantine, renouant avec les usages protocolaires autrefois adoptés par son père, Louis 1er le Pieux, et par son grand-père. Désormais impuissant, mais toujours furieux, Louis le Germanique ne peut que faire courir la rumeur selon laquelle son demi-frère a soudoyé le pape tandis que les chroniqueurs à sa solde s'évertuent à ridiculiser le cérémonial de Ponthion. Il envoie pourtant une ambassade. Le 6 juillet, la délégation conduite par l'archevêque Willebert de Cologne transmet au nouvel Empereur ses prétentions à obtenir une part de l'héritage de Louis II. Mais, le 28 août suivant, Louis le Germanique meurt à Francfort.

Le plus de la fiche

Page MAJ ou créée le

© cliannaz@free.fr