CHARLES II LE CHAUVE, SA VIE
CHARLES LE CHAUVE, DERNIER EMPEREUR CAROLINGIEN
Le 6 octobre 877, alors qu'il revient d'une expédition
avortée en Italie, Charles II le Chauve, petit-fils de Charlemagne, roi
de France et Empereur d'Occident, meurt sans avoir eu le temps de rejoindre
ses terres, déchirées par les invasions vikings et les révoltes
aristocratiques. Avec lui s'éteint le rêve carolingien d'un grand
royaume unifié.
En ce printemps 877, Charles le Chauve n'est pas encore complètement remis de la pleurésie qui, l'automne précédent, l'a obligé à s'aliter. Pourtant, il lui faut recevoir l'ambassade du pape Jean VIII. Et voilà que le souverain pontife l'appelle au secours. Les Sarrasins, ces cruels infidèles, pillent la Campanie, la Sabine et ont établis leur camp à quelques kilomètres seulement au nord de Rome. Le souverain pontife, âgé et lui aussi affaibli par la maladie, doit en outre faire face à la rébellion du duc de Spolète. Il supplie l'Empereur d'Occident de venir de toute urgence en Italie pour mettre fin aux exactions et au razzias sarrasines : "Ô vous, le plus éminent des César, venez au secours de nos calamnités, soulagez les misères de notre peuple, tendez lui la main de votre puissance, et cette terre dont nous vous avons signalé les besoins dès le début de notre mission, libérez là pour éviter, si elle était perdue, d'avilir votre empire et d'engendrer la perte de toute la Chrétienté".
Charles le Chauve hésite à quitter son royaume,
victime de nouvelles incursions vikings et où les Grands sont au bord
de la rébellion; d'autant qu'il n'a aucune confiance en son fils, Louis
le Bègue, pas plus qu'en ses neveux, les fils de son demi-frère
Lothaire 1er. Pourtant, en juin, "prenant avec lui
sa femme et une très grande quantité d'or, d'argent, de chevaux
et d'autres biens", il part pour l'Italie. Début septembre,
le pape l'accueille à Verceil. Là, il apprend que Carloman, le
fils aîné de son autre demi-frère, Louis le Germanique,
s'apprête à lui couper la route de Rome. Prudent, l'Empereur se
retire au sud du Pô, fait sacrer Richeut, sa seconde épouse, impératrice
et attend des renforts de France. Mais ceux ci ne viennent pas. En outre, en
l'absence du roi, les Grands, emmenés par Boson, Hugues l'Abbé,
Bernard Plantevelue et Bernard de Gothie, se sont soulevés. Si Louis
le Bègue, à qui Charles le Chauve a confié à contrecoeur
la régence du royaume, n'a pas directement pris part au complot, force
est de constater qu'il s'est montré complaisant à l'égard
des rebelles.
L'Empereur d'Occident confie alors son trésor à Richeut, qu'il
renvoie vers les Alpes. Il la suivra peu de temps après, renonçant
à aider le pape pour tenter de sauver au moins son royaume de France.
Le 14 juin, lors d'un plaid réuni à Quierzy,
près de Laon, Charles le Chauve signe un capitulaire au ton particulièrement
grave qui consacre l'hérédité des bénéfices
et règle le fonctionnement du Gouvernement en l'absence du souverain.
Certains ont vu dans ce document une sorte de testament, l'expression d'un pressentiment,
de le prescience du roi qu'il allait bientôt quitter définitivement
son royaume. Et, de fait, le souverain ne rentrera pas de cette Italie où
il a été conduit par honneur, mais de façon fort risquée,
étant donné son état de santé et le contexte politique
troublé.
Le voyage de retour est un supplice pour l'Empereur d'Occident, allongé
dans sa litière et en proie à une forte fièvre. Bien qu'Hincmar,
l'archevêque de Reims, prétende qu'il a été empoisonné
par son médecin juif, il est en fait miné par la dysenterie. Péniblement,
le souverain et sa suite franchissent le col du Mont Cenis; il ne reste que
quelques étapes à parcourir. Mais Charles le Chauve ne reverra
jamais ses terres. Le 6 octobre 877, à Avrieux, un hameau isolé
proche de Modane, où son expédition est surprise par les premières
neiges, il fait mander Richeut à son chevet de toute urgence. Il remet
à son épouse les ornements royaux et l'épée connue
sous le nom "d'épée de Saint Pierre", et lui confie
la mission de remettre ces symboles du pouvoir, avec le royaume, à Louis
II le Bègue, son successeur.
Avant de mourir, Charles le Chauve formule pour dernière volonté
le souhait de reposer pour l'éternité à l'abbaye de Saint
Denis. Sa dépouille est redescendue dans la vallée, mais doit
être enterrée à Nantua, dans le Jura, "si forte
était la puanteur du cadavre". Quelques années plus tard,
elle sera exhumée et "emportée à Saint Denis, où
elle fut ensevelie avec les honneurs".
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