CHARLEMAGNE, CHEF DE GUERRE
La guerre
contre les Avars (791 - 796)
CONQUETE ET SOUMISSION DES AVARS
Souvent présentée par les chroniqueurs comme une guerre sainte contre un peuple païen, la difficile soumission du royaume avar s'accompagne d'une christianisation habilement menée. Mais, au cours de l'été 796, cette conquête permet également aux Francs de s'emparer du "Ring", sanctuaire mythique des Avars, et de mettre la main sur un fabuleux trésor.
Les Avars, installés dans les plaines de
l'actuelle Hongrie, sont devenus pous les Francs des voisins dangereux. Ces
pillards païens ont multiplié les incursions dévastatrices en Bavière et dans
le Frioul, désormais soumis à Charlemagne.
Les Annales royales décrivent
leur
"intolérable malfaisance"
et leurs attaques contre les églises; d'autres chroniques précisent qu'ile "sèment
la terreur" et soulignent le "mal
qu'ils font aux chrétiens"; un poème lombard mentionnent
qu'ils "donnent à leurs femmes, à
l'instigation du démon", les ustensiles précieux
et les vêtements liturgiques dérobés dans les lieux saints.
Il incombe au roi des Francs de prendre
la défense du peuple chrétien. Mais Charlemagne n'ignore pas non plus que les
Avars ont amassé depuis des siècles au cours de leurs razzias un formidable
butin, jalousement gardé dans les sanctuaire du "Ring". Ce lieu mythique
est aussi un camp fortifié, situé entre le Danube et son affluent le Theiss,
où les barbares ont établi leur quartier général et d'où ils lancent leurs assauts.
Outre ce fabuleux trésor, la conquête du royaumes des Avars ouvrirait aux Francs
des routes commerciales très intéressantes, celles du Danube moyen, de la Drave
et de la Save. Elle leur permettrait également de parachever leur domination
sur les Alpes, déjà bien engagée en Alémanie et en Lombardie.
Après une première
victoire en 791, Charlemagne a dû un temps abandonner la conquête du pays avar
pour s'occuper de l'Espagne et de la Saxe, ainsi que du complot monté par des
partisans de son fils Pépin le Bossu. Il a néanmoins chargé Pépin d'Italie,
un autre de ses fils, de conduire une grande expédition contre les Avars, chez
qui des rébellions se sont produites, entraînant l'assassinat du khagan,
l'un des principaux chefs, et du jugur, son second. Une partie des Avars,
ceux de l'Ouest, se tourne alors vers le souverain franc, lui envoyant en 795,
les ambassadeurs du plus puissant de ses chefs, le tudun, "désireux
de se donner au roi avec sa terre et son peuple et de recevoir sur son ordre
la foi chrétienne", précise Eginhard, le biographe
de Charlemagne. Pépin d'Italie n'en prend pas moins les armes, secondé par le
duc slave Woynimir et ses troupes, pénètre dans le Ring et s'empare d'une partie
du trésor.
Les Avars se réorganisent, mais ils sont
affaiblis par les attaques des Serbes et des Croates, ainsi que par leurs propres
divisions, le tudun étant désormais filleul et fidèle de Charlemagne.
Durant l'été 796, Pépin d'Italie lance l'assaut final. Le Ring est de nouveau
occupé et cette fois rasé. Il faudra quinze chars, tirés chacun par quatre boeufs,
pour transporter à Aix la Chapelle les étoffes précieuses, les objets d'or et
d'argent du reste du trésor, que les Francs admirent ébahis. "Pas
une guerre suscitée contre les Francs ne leur a, de mémoire d'homme, rapporté
plus de butin et pareil accroissement de richesses. Eux qui pouvaient jusqu'à
ce temps passer pour pauvres trouvèrent dans le palais de leur roi tant d'or
et d'argent, tant de précieuses dépouilles enlevées dans lex combats que l'on
peut bien dire que les Francs reprirent là justement aux Huns ce que les Huns
avaient d'abord pris injustement aux autres peuples",
témoigne Eginhard. A son arrivée à la Cour, Pépin d'Italie est reçu triomphalement.
Sagement, Charlemagne répartit le trésor entre le pape Léon III, les monastères
et les grands qui ont collaboré au succès de l'opération.
Le royaume des
Avars n'est cependant pas totalement pacifié. Dès l'année suivante, un soulèvement
est réprimé et une nouvelle rébellion éclate deux ans plus tard. Au cours de
la campagne qui s'ensuit, Gérold, beau frère de Charlemagne et administrateur
de la Bavière, est tué. Presque au même moment, le valeureux Eric de Frioul
trouve la mort à la frontière de l'Istrie et de la Liburnie, lors d'une embuscade
tendue par les Slaves Croates de Tersatto.
Les soubresauts durent quelques
années, mais les guerriers avars ont définitivement perdu leur prestige, leur
royaume et leur peuple sont bientôt anéantis. En 805, le capitulaire de Thionville
réglemente le commerce dans la région. L'ancien royaume des Avars est désormais
soumis à Charlemagne, qui, sur le Danube moyen et la basse Drave, met en place
une marche de l'Est, baptisée du vieux nom romain de Pannonie et qui deviendra
l'Autriche.
Page MAJ ou créée le