CHARLEMAGNE, CHEF D'ETAT

 

CHARLEMAGNE SEUL MAITRE DU ROYAUME FRANC
(4 DECEMBRE 771)

Trois ans durant, les fils de Pépin le Bref règnent chacun sur une moitié de l'héritage paternel. Tout au long de cete période de transition, les deux frères ne cessent de s'opposer. Le 4 décembre 771, à la mort de Carloman, Charles devient le seul maître du royaume franc.

A la mort de Pépin le Bref, à l'automne 768, les conditions semblent réunies pour que sa succession se déroule sans heurt. Le roi des Francs a partagé son royaume entre ses deux fils. A Charles, l'aîné, âgé de 21 ans, échoient la Frise, la Hesse, la Thuringe, le Nordgau, une partie de la Neustrie et la partie occidentale de l'Aquitaine jusqu'aux Pyrénées. Carloman, âgé de 17 ans, hérite de l'Alémanie, de la partie de la Neustrie qui comprend Paris et la vallée de la Seine, de la Burgondie, de la Provence et de la partie orientale de l'Aquitaine, avec Limoges et Toulouse. Malgré un morcellement certain, ce partage n'en est pas moins équitable.

Mais les deux princes ne s'entendent pas. Selon les chroniqueurs du temps, Carloman est le seul responsable de cette mésentente. Jaloux de son aîné, il multiplierait les prétextes à querelle. Et si le conflit reste larvé, ce serait grâce à la diplomatie de Charles. Carloman est-il, conformément aux accusations lancées par les biographes de Charlemagne, "un furieux et un méchant" rempli de "colère et de cupidité"? quoi qu'il en soit, il ne partage pas les idées de son frère. Dès son avènement, il manifeste son hostilité à l'égard de Charles en refusant de participer à l'expédition d'Aquitaine. Son aîné intervient seul et mate la révolte. Dès ce premier désaccord patent, il s'inquiète de "la discorde que le démon ennemi de la paix a jetée entre les deux frères". Peu après, il peut cependant se féliciter de voir Charles et Carloman "grâce à Dieu, unis de nouveau dans une affection commune et dans la concorde, comme des frères vraiment nés de la même mère et germains". Les événements d'Italie et les divergences quant à l'attitude à adopter face aux Lombards vont mettre fin à une réconciliation de courte durée.
Mais, le 4 décembre 771, à Samoussy, dans l'Aisne, Carloman meurt soudainement. Quelques jours plus tard, il est enterré à Saint Rémi de Reims, conformément à ses volontés. Cette disparition intervient à un moment où "la concorde entre les deux rois ne se maintenait plus qu'avec la plus grande difficulté". Aussi la succession s'annonce-t-elle tout aussi délicate que la cohabitation.

Carloman laisse une veuve, Gerberge, et deux petits garçons. Selon la jurisprudence, ses enfants peuvent prétendre à son héritage, mais en raison de leur bas âge, Charles, leur oncle n'en est pas exclus. Celui-ci apprend la mort de son frère à Valenciennes, où il a pris ses quartiers d'hiver. De là il part pour Corbény, bourg voisin de Samoussy, pour "prendre le royaume en entier". Gerberge s'enfuit en Italie. Avec ses enfants et le duc Aucher, elle se réfugie chez son père Didier, le roi des Lombards. Trois ans plus tard, à l'issue d'une victorieuse campagne en Italie, Charles s'emparera de ses neveux à Vérone et les fera enfermer dans un monastère pour le restant de leurs jours. La plupart des partisans de Carloman, tels le comte Adalhard, le comte Wqarin, l'abbé Fulrad et l'archevêque Wilchaire, se rallient à Charles, qui, selon Eginhard, son biographe, "fut fait roi du consentement de tous les Francs". Et c'est sans lutte ni violence qu'il rétablit l'unité du royaume.
Jusqu'à la mort de Carloman, rien n'a laissé deviner l'ampleur de la personnalité et du destin de Charles. Durant les trois premières années de son règne, roi débutant, il a semblé sous l'influence de sa mère, Berthe au grand pied, et peu clairvoyant face aux manigances sournoises du roi des Lombards. A-t-il été entravé dans ses projets par l'opposition de son cadet? La mort de Carloman l'a-t-elle "révélé à lui-même"? Son frère disparu, il est en tout cas seul maître à bord. Et la façon dont il conquiert la succession de Carloman témoigne de son habileté diplomatique. Désormais souverain le plus puissant d'Occident, Charles est prêt à devenir Charlemagne.

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