CHARLEMAGNE, CHEF DE GUERRE
La guerre contre les Saxons (772 - 792)

 

LA SAXE EST INTEGREE AU ROYAUME FRANC

Huit ans après leur soumission, en 785, les Saxons se rebellent de nouveau contre les Francs. La guerre reprend, encore plus terrible qu'auparavant. Elle va s'achever en octobre 797, avec l'annexion de la Saxe au royaume franc, annexion qui marquera la fin de la plus longue et plus difficile des conquêtes menées par Charlemagne.

Des années durant, Charlemagne a tenté, en vain, malgré de grandes victoires, de juguer les incessantes révoltes des tribus saxonnes. A partir de 785, cependant, la Saxe se tient tranquille sous la férule du draconien capitulaire De Partibus Saxonis, qui impose à ses peuples réunis par le paganisme d'adopter et d'observer strictement la religion chrétienne, tout manquement étant puni de mort. Mais ce sont surtout les territoires centraux et méridionaux qui sont ainsi pacifiés. Le Nord et l'Est continuent à s'agiter et, dès 792, le roi des Francs doit sans cesse y dépêcher des troupes pour réprimer des soulèvements ponctuels.

En 793, un soulèvement général révèle le revers de la médaille de l'efficace sévérité du capitulaire de 785. En donnant pleins pouvoirs aux comtes et aux missionnaires pour châtier, par la mort ou par des amendes considérables, les Saxons qui enfreignent ses commandements, ce texte a autorisé tous les excès. La multiplication des injustices et des abus ne pouvait que provoquer la révolte.
La christianisation, préconisée par Charlemagne comme moyen de pacification, n'a dans ce contexte guère progressé. Harcelés, humiliés, les Saxons se sont peu convertis ou seulement par crainte. "Si l'on avait prêché au peuple le joug léger du Christ et son suave fardeau avec autant de chaleur qu'on a exigé le paiement des dîmes et puni les plus petites fautes, peut être ne se seraient ils pas dérobés aux serments du baptême? Est ce que les apôtres que le Christ avait envoyés prêcher à travers le monde levaient des dîmes et demandaient des cadeaux? Certes, la dîme est une bonne chose, mais il vaut mieux la perdre que de perdre la foi", constate Alcuin, le sage conseiller de Charlemagne.
En 793, le fragile edifice de la domination franque craque : partout les Saxons détruisent les églises et les monastères, chassent et massacrent les ecclésiastiques, relèvent leurs sanctuaires et recommencent à adorer leurs idoles, exterminent sur la Weser une troupe commandée par le comte franc Théodoric. Et tout recommence comme avant 785 : Charlemagne doit revenir en Saxe à la tête de son armée, secondé par son fils aîné, Charles. Il vainc les rebelles, qui capitulent et prêtent serment. Puis il marque une pause hivernale, pendant laquelle les Saxons reprennent les armes, l'obligeant à se lancer dans une nouvelle campagne.

L'engrenage des révoltes et des représailles, de plus en plus violentes, avec toujours plus de dévastations et de morts, rend cette dernière guerre terrible. En 795, les Saxons ayant tué l'un de ses alliés, le duc des Abodrites, Charlemagne se fait livrer des milliers d'otages. L'année suivante, incendies de villes et de villages, exécutions massives s'intensifient; et le souverain franc rejoint son royaume suivi par une gigantesque colonne de captifs. En 797, le dernier repaire des insoumis, la Wihmodie, au bord de la mer du Nord, est envahi. Ce qui n'empêche pas, durant l'hiver, les Saxons de massacrer à la faveur d'une embuscade les soldats francs envoyés en Nordalbingie.
Lorsque Charlemagne l'intègre à son royaume, la Saxe est ruinée, dépeuplée. "Unis aux Francs, les Saxons forment désormais un seul peuple", affirme Eginhard, le biographe du roi. Le 28 octobre 797, un nouveau capitulaire, plus clément, Capitulare Saxonicum, est promulgué et remplace celui de 785. Les nobles Saxons, désormais vassaux du souverain franc, serviront dans les armées royales; ils conservent leurs prérogatives et sont invités à prendre part aux assemblées annuelles.
La conquête n'est cependant pas achevée. En 798, les Francs dévastent le pays entre la Weser et l'Elbe, des rebelles sont écrasés à Bornhöved. En 799, de nouveau, des Saxons en grand nombre sont faits prisonniers et emmenés vers l'ouest du royaume. Le nord de l'Elbe ne se soumet pas immédiatement : la Wihmodie et la Nordalbingie ne seront définitivement acquises qu'en 804. Pour parvenir à ce résultat, quelque 10 000 familles saxonnes seront arrachées à leur terre natale et déportées des rives de l'Elbe vers les régions franques de Gaule et de Germanie, sous la dure férule de la cavalerie d'élite du Palais. Pendant que, sur l'Elbe, des Francs prennent la place des Saxons et fondent la ville de Hambourg, la plus longue et la plus meurtrière des conquêtes que Charlemagne a dû mener s'achève enfin.

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