CHARLEMAGNE, CHEF D'ETAT
Le pape Léon III

 

LA REHABILITATION DU PAPE LEON III

Provisoirement rétabli dans ses fonctions pontificales, Léon II n'attend plus que la venue de Charlemagne à Rome pour que ses détracteurs soient enfin muselés. En novembre 800, le roi des Francs fait son entrée dans la cité éternelle en arbitre suprême de l'Occident Chrétien. Le pape, promptement réhabilité, va alors lui offrir la couronne impériale.

Léon III a quitté le camp de Paderborn, en Saxe, où il s'était réfugié auprès de Charlemagne, et s'en est retourné à Rome. Le roi des Francs, lui, ne semble guère pressé de rejoindre la cité éternelle où il doit faire justice et confondre les détracteurs du pape. A la mi-mars 800, Charlemagne entreprend, accompagné de toute sa Cour, une inspection des ports des côtes de la Manche. Puis, de Rouen, il se rend à Tours. Une occasion de s'agenouiller sur les reliques de Saint Martin mais aussi de rendre visite à son fidèle ami, Alcuin, son meilleur conseiller devenu abbé de Saint Martin. Mais Liutgarde, l'épouse bien-aimée du roi, tombe gravement malade. Elle est intransportable; aussi Charlemagne remet-il à des jours meilleur son voyage à Rome. Liutgarde décède en juin. Fou de douleur, le roi des Francs décide de rentrer à Aix la Chapelle, non sans avoir convaincu Alcuin de l'accompagner. Peu après, Charlemagne quitte sa capitale pour Mayence afin d'y présider l'assemblée annuelle des Francs. C'est là, devant les Grands de son immense royaume, qu'il fait part de sa décision de partir enfin pour l'Italie, où il doit mettre bon ordre aux affaires de la papauté.

Quelle est la part prise par Alcuin dans cette décision? Depuis des années, le sage et fidèle ami pèse de tout son poids pour convaincre Charlemagne de se faire couronner empereur. Il aurait également incité le roi à faire preuve de la plus extrême prudence en ce qui concerne la "cas" de Léon III, intouchable pour les lois des hommes. "Dieu sait sauver ceux qu'il aime" répète-t-il alors à l'envi.
Charlemagne, accompagné de son fils Charles, quitte Mayence à la tête d'une forte troupe. Pour la cinquième fois, il traverse les Alpes et, en novembre 800, arrive à Ravenne, où il retrouve son autre fils, Pépin d'Italie. Le père et ses deux fils poursuivent leur route et, le 23 novembre, atteignent enfin Mentana, à quelques kilomètres de Rome. Et cette fois, c'est Léon III qui vient au devant de Charlemagne! Le lendemain, le roi des Francs fait une entrée triomphale dans la cité romaine. Une somptueuse cérémonie est organisée à l'occasion de sa rencontre officielle avec le pape, sur la parvis de la basilique Saint Pierre. Mais l'heure des comptes va bientôt sonner.
Le 1er décembre, le souverain pontife est convoqué devant une haute cour de justice, composée d'ecclésiastiques et de laïcs, francs et romains. Ce sont eux qui vont devoir juger de la culpabilité de Léon III, qui a été accusé par l'aristocratie romaine d'immoralité et d'indignité.

Charlemagne ouvre la séance. Au terme de plusieurs heures d'interrogatoire, les charges retenues contre le pape se font de plus en plus minces. Aucun des anciens accusateurs du Saint Père n'ose aujourd'hui témoigner Charlemagne se range du côté du compromis. Il propose à Léon III de prêter "serment purgatoire", et donc de clamer haut et fort qu'il ne s'est rendu coupable d'aucun des crimes qui lui sont reprochés. Le 23 décembre, dans la basilique Saint Pierre, Léon III jure sur l'Evangile de son innocence. Le pape affirme alors, selon le texte du serment conservé dans le "Liber Pontificalis" : "De ces faux crimes dont m'accablèrent les Romains qui me persécutèrent injustement, je n'ai aucune connaissance et je ne reconnais pas en avoir commis". Un tel serment relève alors du sacré. Car la damnation éternelle est promise à tous les parjures, fussent-ils papes! Dans l'assistance, l'émotion est à son comble et un immense soupir de soulagement s'échappe des travées. Un vibrant Te Deum met fin à des mois de suspicion. Mais au fond, le pape le sait bien, une seule chose pourrait désormais laver son honneur et donner la preuve de sa définitive réhabilitation : qu'il fasse empereur le roi des Francs. Car quel souverain pourrait accepter d'être sacré par un parjure devant Dieu? Et pour la première fois dans l'Histoire, un pape couronne un empereur. Le jour de Noël, le 25 décembre 800, en la basilique Saint Pierre, Charlemagne est sacré empereur d'Occident.

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