CHARLES II LE CHAUVE, CHEF DE GUERRE
LE TRAITE DE MERSEN
(9 AOUT 870)
A la mort de son neveu, Lothaire II, Charles II le Chauve s'empare de la Lotharingie. Excédé par la rapacité de son demi-frère, Louis le Germanique réclame sa part. Un traité, signé le 9 août 870 à Mersen, va régler leur différend et donnera naissance, bien plus tard, à la France et à l'Allemagne.
Le bel empire de Charlemagne, unifié après des années de lutte et d'efforts, est livré à la désolation par les stupides jalousies de ses petits-fils. Depuis la signature, en 843, du traité de Verdun entre Lothaire 1er, Charles II le Chauve et Louis le Germanique, les trois fils de Louis 1er le Pieux, on aurait pu croire les querelles éteintes. Pendant douze ans, ce partage est respecté. Les trois frères, pour montrer leur bonne volonté, se rencontrent à trois reprises : en 844, en 847 et en 851. La bataille semble donc oubliée. Mais à la mort de Lothaire 1er, le 29 septembre 855, Charles le Chauve et Louis le Germanique lorgnent sur ses titres et possessions. Mais Lothaire s'est engagé à léguer ses biens à ses trois fils. La couronne impériale échoit donc à son aîné, Louis II, qui reçoit en héritage l'Italie. Charles devient roi de Provence et Lothaire II obtient le nord du royaume paternel, la Lotharingie, située entre la Meuse et le Rhin.
Ce nouveau partage ne satisfait pas Charles le Chauve. Son royaume dévasté par les envahisseurs, Normands et Sarrasins, un titre d'empereur aurait bien arrangé ses affaires. La Francia occidentalis est un champ de ruines et Charles se montre incapable d'y ramener la paix. Excédés d'être la proie des pillards, les Grands du royaume adressent, en 858, une supplique à Louis le Germanique et l'enjoignent d'intervenir promptement. "S'il ne leur donne aucun espoir, ils devront chercher auprès des païens, au péril de la chrétienté, la protection qu'ils ne peuvent trouver auprès de leurs maîtres légitimes". Ils affirment également ne "pouvoir supporter plus longtemps la tyrannie de Charles car ce que leur ont laissé - après avoir pillé, fait des prisonniers, tué et vendu - les envahisseurs sans que personne ne leur résistât, Charles le leur enlève par ruse". Trop content de se venger de son demi-frère, Louis le Germanique envahit la Francia occidentalis. Mais Charles n'entend pas se laisser dépouiller. Face aux armées de son frère, Louis le Germanique se retire sans combattre, à Jouy, près de Soissons, le 15 janvier 859. Les deux frères sont sommés par les plus hautes autorités de l'Eglise de se réconcilier. Le 1er juin 860, Charles offre son pardon à Louis, du bout des lèvres ...
Près de dix ans passent. Le 8 août 869, Lothaire II meurt sans laisser d'héritier. Aussitôt, son oncle, Charles le Chauve, fait main basse sur la Lotharingie, et par la même occasion sur la Provence, dont Lothaire a hérité à la mort de son frère Charles, en 863. Le 9 septembre 869, Charles le Chauve se fait sacrer roi de Lorraine, à Metz, "parce que, explique-t-il, on lit dans les historiens sacrés que les rois doivent recevoir autant de couronnes que de royaumes". Il prend ensuite le chemin d'Aix la Chapelle. Là, il épouse la Lorraine Richilde, le 22 janvier 870. Mis devant le fait accompli, Louis le Germanique proteste et réclame avec force sa part sur les possessions de son défunt neveu. Il menace même Charles le Chauve de "l'attaquer sans retard s'il ne quitte pas Aix immédiatement". Personne ne prête alors attention à la revendication légitime de Louis II, l'aîné de Lothaire II, qui réclame en vain la Lotharingie. D'ailleurs il est bien loin, retenu en Italie. Charles le Chauve comprend qu'il a tout intérêt à s'entendre avec son demi-frère. Une fois de plus, même s'il doit lâcher du lest, Charles s'en sort bien. Signé le 9 août 870, non loin d'Aix la Chapelle et de Maastricht, le traité de Mersen entérine le démembrement de la Lotharingie. Charles le Chauve reçoit la plus grande partie de la Frise, l'Alsace et la Lorraine, désormais rattachées à la Francia occidentalis, la future France. Il s'empare par la même occasion d'une dizaine de villes importantes, d'une bonne trentaine de comtés et d'autant d'abbayes. Louis le Germanique se contente de la partie occidentale du territoire. Il reçoit Vienne, Lyon, Besançon, Toul et Cambrai. Son royaume la Francia orientalis, deviendra bien plus tard l'Allemagne. Une fois la media Francia désagrégée, les deux futurs Etats, hérités de deux demi-frères, ennemis tout au long de leur vie, ne vont cesser de se disputer l'ancienne Lotharingie.
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