CHARLES II LE CHAUVE, CHEF DE GUERRE
QUI SONT LES VIKINGS?
En 845, les Vikings lancent un premier raid audacieux sur Paris. Navigateurs intrépides, ils suscitent la terreur des riverains des mers et des fleuves du royaume franc. Pourtant, issus d'une civilisation qui surprend les visiteurs étrangers par sa richesse et son originalité, ces "hommes venus du Nord" sont avant tout des paysans à la recherche de terres fertiles où s'établir.
A partir de la fin du VIIIème siècle, les Vikings, "guerriers
de la mer" ou "hommes du Nord", ont quitté le Danemark,
la Suède, la Norvège et une partie de la Finlande en quête
de terres plus fertiles. Après la mort de Charlemagne, en 814, ils ont
fait de nombreuses incursions sur les côtes et les fleuves de l'Empire
carolingien en pleine décadence. Aux environs de l'an 950, Ibrahim ibn
Ahmed al-Tartushi, un visiteur venu de Cordoue, décrit la cité
commerçante d'Hedeby, au Danemark, comme "pauvrement pourvue en
biens et en richesses. L'aliment principal de ses habitants est le poisson (...).
Il arrive fréquemment que les familles jettent un nouveau-né à
la mer plutôt que d'avoir à subvenir à ses besoins".
C'est
en efet pour pouvoir nourrir une population devenue trop nombreuse que les Vikings
ont été obligés de migrer vers le Sud. En 845, ils ont
attaqué Paris pour la première fois et se sont dès lors
taillé une réputation de redoutables envahisseurs. Issus d'une
très ancienne civilisation, ils font preuve de talents remarquables pour
organiser les territoires où ils s'établissent. Et, malgré
la crainte qu'ils suscitent parmi les Francs, ils sont avant tout un peuple
de paysans!
Dans ce qui deviendra la Normandie, comme en Scandinavie, les Vikings
vivent principalement de l'agriculture, de l'élevage, de la chasse et
de la pêche. Ils "dressaient les boeufs, forgeaient les socs de charrue,
construisaient les maisons en bois et les granges à foin, fabriquaient
des chariots et suivaient la charrue", relate un poème du Xème
siècle, intitulé Rygshula.
Leur deuxième source de revenus
est constituée par le commerce. A la fin de l'hiver, Francs, Celtes et
Saxons échangent des tissus, des armes et de l'or contre les fourrures,
l'ambre et les objets en cuir des artisans vikings. Les négociants étrangers,
impressionnés par la beauté et la propreté des populations
nordiques, constatent que les hommes se baignent le samedi, se coiffent et se
taillent soigneusement la barbe, s'habillent avec élégance et
ont fière allure avec leur haute taille et leurs remarquables moustaches.
Au
sein de cette société laborieuse, la femme bénéficie
d'un statut privilégiée, bien plus gratifiant que dans la plupart
des civilisations contemporaines du haut Moyen Age. Maîtress du du domaine,
elle s'affaire à la ferme et dans les champs, et porte, accroché
bien en évidence à sa nature, l'emblème de son importante
fonction : le trosseau des clefs de la maison, des remises, des granges, des
réserves et, si la famille est aisée, de la salle d'eau et du
bain de vapeur. Plus la richesse est grande, plus son trousseau est volumineux.
Elle
peut également posséder la terre, détenir une fortune,
accéder à un rang social élevé. Au plan conjugal,
elle est très indépendante : "Le droit
de divorcer appartient aux femmes. L'épouse se sépare de son mari
quand elle le veut", s'étonne un voyageur arabe du Xème
siècle.
Dans la société viking, tout chef de clan,
qui possède à la fois honneur, fortune et compagnons fidèles,
peut devenir roi. Pour manifester son opulence, le patriarche offre à
ses proches et à ses afidés des festins de viande, de poisson,
de pain et de légumes, arrosée de prodigieuses quantités
de bière et d'hydromel.
Les clivages sociaux sont marqués,
depuis les esclaves jusqu'à l'aristocratie (composée des grands
propriétaires terriens, les jarl),
en passant par les paysans libres, les karl,
les artisans et les mercenaires. Les jarls se réunissent
au sein des assemblées locales, les things.
Mais c'est surtout le code moral du drengeskapur,
s'appuyant sur l'honneur, la loyauté et l'hospitalité, qui fait
force de loi. Ces valeurs sont chantées dans un vieux poème scandinave,
le Havamal : "Le bétail périt,
les parents disparaissent, tout homme est mortel; mais le beau nom ne meurt jamais
de celui qui a bien agi".
Bien que les contemporains dépeignent
les Vikings comme noceurs, tapageurs et bagarreurs, les hommes du Nord ne sont
pas des barbares totalement sans foi ni loi; même si le Havamal célèbre
l'esprit guerrier et si leurs pratiques religieuses, organisées autour
des trois grands dieux Odin, Thor et Freyr, sont marquées par la puissance
et la violence. Les cérémonies, qui se déroulent dans des
sanctuaires ornés de colossales statues, donnent lieu à des rassemblements
où les paysans apportent en offrande de formidables quantités
de nourriture, de boissons et de bétail que l'on sacrifie et dont on
répand le sang sur l'assistance. Cette démesure se retrouve jusque
dans la mort, à travers les gigantesques tumulus funéraires où
reposent les défunts.
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