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HECTOR BERLIOZ ET L'ECHEC DE "LA DAMNATION DE FAUST"

Hector Berlioz reste une des figures les plus grandes et les plus originales du romantisme musical en France. Célébré à l'étranger, le compositeur ne parviendra jamais à s'imposer de son vivant dans son pays natal. Donnée à l'Opéra Comique, les 6 et 20 décembre 1846, sa Damnation de Faust sera un échec qui le laissera ruiné et amer.

Dès son arrivée à Paris, en 1821, Hector Berlioz, fils de médecin et destiné à suivre les traces de son père, passe le plus clair de son temps à l'Opéra et à la Bibliothèque du Conservatoire de musique. Cinq ans plus tard, quand il abandonne officiellement la médecine, il a déjà étudié avec le maître éminent qu'est le compositeur Jean François Lesueur et a écrit une Messe qui a été donnée en public. Le musicien se passionne aussi pour la littérature et affectionne notamment Goethe et Shakespeare, deux références pour les romantiques. En 1827, le Faust de Goethe vient d'être magnifiquement traduit en français par le poète Gérard de Nerval. C'est un choc : "Je ne le quittais plus; je le lisais sans cesse, à table, au théâtre, dans les rues, partout", confie Berlioz dans ses Mémoires.

L'oeuvre de Goethe aborde plusieurs thèmes susceptibles d'intéresser Berlioz : la question métaphysique du bien et du mal, la révolte du héros déçu de sa condition d'homme qui provoque Dieu en signant avec Satan un acte désespéré mais audacieux; la présence surnaturelle de Méphistophélès, incarnation diabolique haute en couleur, qui sait nourrir l'imaginaire d'un XIXème siècle épris de mystère, d'occultisme et de frayeurs religieuses. Enfin, l'oeuvre de Goethe comprend beaucoup de chansons et de choeurs, une vraie sollicitation pour le musicien! Berlioz se met rapidement au travail et, en 1828 et 1829, compose Huit scènes de Faust, recueil de ballades et de chants tirés de la pièce, mis en musique et orchestrés pour voix et divers petits groupes instrumentaux. Mais le compositeur, déjà considéré comme marginal et excentrique, doit gagner sa vie en se faisant critique musical, ce qui sera toujours sa principale source de revenus! Ses oeuvres, dont peu tombent dans les catégories traditionnelles, sont toujours controversées et il ne peut s'imposer sur la scène de la vie musicale parisienne, figée et institutionnalisée. Après trois échecs, il finit par obtenir le prix de Rome et s'installe à la Villa Médicis pour trois ans.
De retour en France, Berlioz, comme tous ses contemporains, se tourne vers l'opéra. Il est cependant incapable de surmonter monopoles et cabales, tant à l'Opéra qu'au Théâtre Italien. Il ne parvient à faire représenter son Benvenuto Cellini qu'en 1836, et c'est un échec retentissant. En revanche, il reçoit un accueil chaleureux en Angleterre et surtout dans les villes allemandes, notamment à Weimar, où le souvenir de Goethe est très vivant et où Liszt, directeur musical à la Cour depuis 1842, défend sa cause avec enthousiasme.

De retour à Paris, Berlioz reprend, après dix sept ans, ses Huit Scènes de Faust. Il refond son oeuvre de jeunesse en composition pour voix et orchestre et l'intègre à un drame. Il réécrit le livret, quitte à être infidèle à l'original, en faisant commencer l'intrigue en Hongrie, pour pouvoir utiliser Marche de Rakocz, écrite lors d'un voyage dans ce pays! La concentration d'épisodes grotesques et burlesques dans un goût shakespearien insuffle à La Damnation de Faust une force hugolienne, tandis que l'orchestre s'impose à chaque instant comme le maître absolu du jeu.
Berlioz achève sa "légende dramatique" en 1846. Pour la faire exécuter, il doit payer de ses propres deniers la location de l'Opéra Comique, les copies des parties d'orcestre et de chant, les répétitions... Il craint de se ruiner mais se rassure en pensant qu'en 1839 la première de son Roméo et Juliette au Consrvatoire a été un succès. Il compte aussi sur le retentissement en France du renom qu'il a acquis à l'étranger. Et même sur la notoriété de Faust.
Deux matinées sont données, les 6 et 20 décembre. Mais, c'est l'échec. "Rien dans ma carrière d'artiste ne m'a plus profondément blessé que cette indifférence inattendue", avoue Berlioz. Pour expliquer ce désastre, il invoque les chanteurs inconnus, le théâtre, qui n'est pas "à la mode", l'indifférence du public parisien vis-à-vis des arts et de la littérature. Ruiné, il ne peut plus compter que sur l'aide de ses amis. Bientôt, il part pour la Russie, où il espère que son travail sera mieux accueilli que dans son pays natal.

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