DEVANT L'OPERA, LOUVEL POIGNARDE SA VICTIME

Depuis que, le 17 juin 1816, Marie Caroline a épousé Charles Ferdinand, duc de Berry et neveu de Louis XVIII, tous les espoirs des Bourbons reposent sur cette pétillante Napolitaine. Elle seule peut assurer l'avenir de la dynastie et donner un héritier au trône de France. Mais dans l'ombre, un homme veille, un vieux soldat de l'Empire qui voue une haine sans borne au roi et aux siens. Le drame va se jouer devant l'Opéra le 13 février 1820 au soir.

Ce 13 février 1820, les fêtes du carnaval battent leur plein. Dans les hôtels de la bonne société parisienne, on se presse joyeusement aux bals masqués et aux dîners de tête. Dans le carrosse qui les conduit à l'Opéra, le duc et la duchesse de Berry entendent ne rien manquer de ces festivités. Mariés depuis quatre ans, ils sont toujours aussi amoureux. A quarante deux ans, Charles Ferdinand, le neveu de Louis XVIII, n'a d'yeux que pour sa pétillante épouse, de vingt ans sa cadette. Marie Caroline a apporté la gaîté et l'espoir à la Cour de France. C'est d'elle que dépend aujourd'hui l'avenir de la monarchie. Le 21 septembre 1819, elle a donné une fille, Louise, à la famille royale. Enceinte pour la seconde fois, elle espère mettre au monde un garçon et assurer ainsi la succession au trône en donnant un héritier mâle à la dynastie des Bourbons
Le duc de Berry, aux petits soins, cède à tous les caprices de sa chère Napolitaine. Ce soir, le couple était invité à plusieurs grands bals. Mais, pour ménager la santé de sa jeune femme, il a décidé qu'il serait plus sage d'assister à une représentation à l'Opéra. D'autant que Marie Caroline brûle d'admirer ce nouveau danseur, Elie, dont tout Paris fait les gorges chaudes. Et puis le programme est alléchant. Ce soir, on va donner Le Carnaval de Venise, Le Rossignol et les Noces de Gamache

Le carrosse arrive à huit heures devant l'Opéra, rue de Richelieu, à l'emplacement de l'actuel square Louvois. Ses occupants gagnent la loge royale, tendue de taffetas bleu frangé d'or. La Bigottini, célèbre diva, entame le prélude du Carnaval de Venise. Puis les spectateurs découvrent le fameux Elie qui, dès ses débuts sur scène, comble toutes leurs espérances. A l'entracte, le duc de Berry et Marie Caroline vont saluer leurs parents, les Orléans. Charles Ferdinand ne partage pas l'animosité de Louis XVIII envers le futur Louis Philippe, et Marie Caroline se plaît à échanger des souvenirs d'Italie avec Marie Amélie. Au moment de regagner sa loge, le duc remarque une pâleur subite sur le visage de Marie Caroline. Il insiste pour qu'elle regagne aussitôt leur demeure, le palais de l'Elysée Bourbon. Mais l'impétueuse duchesse négocie. C'est entendu, elle rentrera, mais seulement après le ballet.
Lors du second acte des Noces de Gamache, Marie Caroline admet qu'elle se sent lasse et accepte de quitter l'Opéra. Son époux s'empresse de l'accompagner à sa voiture avec Madame de Béthizy, qu'il a chargée de veiller sur elle. Il la rejoindra un peu plus tard, après avoir vu danser l'étoile Virginie Oreille, une de ses conquêtes, dont il a un fils caché.

Après avoir pris congé de son épouse, le duc de Berry se dirige vers l'entrée du théâtre. A cette heure tardive, le quartier est désert. Près de la calèche de la duchesse veillent pourtant trois valets de pied et un soldat de garde. Alors que Charles Ferdinand devise avec Choiseul, son aide de camp, et le comte de Mesnard, un homme surgit soudain de l'ombre. Il se précipite sur le duc, lui empoigne l'épaule gauche et lui plante un couteau dans le côté droit. L'agresseur prend aussitôt la fuite, Choiseul à ses trousses. "Quel brutal que cet homme!", s'écrie le duc de Berry. Puis remarquant le poignard, il murmure dans un souffle : "Je suis assassiné!" Affolée, Marie Caroline s'est ruée hors de sa voiture pour tenter de porter secours au blessé. Pendant ce temps, l'assassin heurte un garçon de café chargé d'un plateau. Cet obstacle providentiel permet à ses poursuivants de le ceinturer. Alors qu'on le mène auprès du commissaire Joly, responsable de la sécurité de l'Opéra, l'homme, qui dit s'appeler Louvel, ignore ostensiblement sa victime. A Mesnard qui lui demande la raison de son crime, il assène implacable : "Les Bourbons sont les plus grands ennemis de mon pays".

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