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L'INSURRECTION PARISIENNE
Edictées par Charles X à l'encontre de
la Chambre en vertu de l'article 14 de la Charte, les ordonnances du 25 juillet
1830 mettent le feu aux poudres. D'abord légale, la résistance, qui a commencé
dans les milieux libéraux pour sauvegarder la liberté de la presse, s'étend
aux classes populaires. Le 27 et le 28 juillet, les deux premiers jours des
Trois Glorieuses, toute la ville de Paris va être gagnée par l'insurrection.
Suspendant la liberté de la presse, réformant
le système électoral et prononçant la dissolution de la Chambre des députés,
les ordonnances du 25 juillet 1830 ont provoqué une levée de boucliers dans
les rangs de l'opposition à Charles X et au ministère Polignac. Le mardi 27
juillet, le tribunal de commerce déclare solennellement ces ordonnances contraires
à la Charte. Le même jour, les trois journaix d'opposition paraissent sans avoir
sollicité l'autorisation gouvernementale, dorénavant exigée.
Aussitôt, la police vient saisir les presses
d'imprimerie du National, du Globe et du Temps. Devant
les locaux de ce dernier, elle se heurte à une vive opposition, et il lui faut
réquisitionner des serruriers pour en forcer les portes. De nombreux ateliers
ont fermé, et les ouvriers affluent aux manifestations organisées par les sociétés
secrètes républicaines ou bonapartistes, auxquelles artisans, chômeurs et étudiants
participent nombreux. La Garde nationale, licenciée depuis 1827, reprend les
armes, mais sans être encore décidée à s'en servir. Dans tout Paris, l'agitation
se fait de plus en plus menaçante. Dans l'après-midi, des barricades se dressent
dans les rues, en particulier dans l'est de la capitale. Alors que dans les
quartiers populaires du centre on assiste à de sanglantes échauffourées, le
roi confie au maréchal Marmont le commandement des troupes parisiennes. La nomination
de ce militaire très impopulaire, qu'on accuse d'avoir trahi Napoléon en 1814,
se révèle un choix particulièrement malheureux. S'ajoutant au démontage des
imprimeries des journaux, cette décision provoque l'exaspération des Parisiens.
Une trentaine de députés se réunissent chez Casimir Perier et discutent du tour
pris par les événements; longuement et dans la confusion... Le mercredi 28
juillet, le peuple se soulève spontanément en masse. Toutes les classes de la
société prennent part à l'insurrection : plus seulement contre les ordonnances
de juillet mais en espérant aussi la chute de Charles X. Le centre de Paris
se hérisse de barricades. Pour ne pas susciter l'inquiétude de la population,
la garnison de la capitale n'a pas été renforcée. Le maréchal Marmont répartit
ses 12 000 hommes en trois colonnes, auxquelles il donne l'ordre de gagner respectivement
l'Hôtel de Ville, la place de la Bastille et le faubourg Saint Antoine.
Les troupes bousculent sans difficulté
les barricades, mais, vite réédifiées, celles-ci restent toujours aussi nombreuses.
Encadrés par des élèves de l'Ecole Polytechnique, d'anciens officiers et de
vieux soldats de l'Empire, les insurgés se battent avec ardeur et dans la bonne
humeur. Aux cris de "Vive la Charte!
Vive la Liberté! A bas les Bourbons!", ils prennent
possession du faubourg Saint Antoine, hissent le drapeau tricolore sur l'Hôtel
de Ville et la cathédrale Notre Dame. Les soldats de la garde royale sont bombardés
de projectiles divers. Encombrés par un équipement très lourd, accablés par
la chaleur torride et la fatigue, ils souffrent de la soif et de la faim. Le
soir, Marmont donne à ses troupes épuisées, en outre leur fidélité ne lui semble
pas assurée, l'ordre de battre en retraite vers le Louvre, les Tuileries et
les Champs Elysées. Ce repli laisse les trois quarts de la capitale aux mains
des insurgés. Pour tenter d'enrayer l'anarchie grandissante, les députés, réunis
chez leur collègue Audry de Puyraveau, rédigent une proclamation. Mais, insuffisamment
énergique et peu convaincant, cet appel reste sans effet. Au château de Saint
Cloud, où il s'est installé pour l'été, Charles X ne peut croire à l'impuissance
de la troupe devant l'insurrection. Au colonel venu lui faire le compte rendu
des événements, il coupe sans cesse la parole, lui assénant d'impérieux "Abrégez!".
Le souverain ne manifeste pas la moindre inquiétude et conclut : "Les
Parisiens sont dans l'anarchie, l'anarchie les ramènera nécessairement à mes
pieds". Et, comme à l'ordinaire, il s'en va finir
la soirée à sa table de jeu. Sans pressentir que le peu de crédit qu'il accorde
aux insurgés des Trois Glorieuses, ces journées révolutionnaires que l'écrivain
Chateaubriand baptisera les "trois soleils de juillet", va lui coûter
son trône.
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