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LES LONGUES ANNEES D'EXIL DE CHARLES X
Le 16 août 1830, en quittant la France pour l'Angleterre,
première étape de son long exil, Charles X a un mauvais pressentiment.
Alors que son cousin Louis Philippe d'Orléans a été proclamé
roi des Français, il sait qu'il ne reverra plus son pays. Mais, avec
sa dignité et son sens coutumier de l'humour, le vieux souverain (il
aura bientôt soixante treize ans) garde la tête haute, même aux heures
les plus sombres.
Charles X a toujours été superstitieux. Pendant
les jours noirs de Rambouillet, entre les journées révolutionnaires
des Trois Glorieuses des 27, 28 et 29 juillet 1830, et son abdication, le 2
août, il a consulté un voyant, Thomas Martin. Ce dernier lui a
prédit qu'il ne remonterait pas sur le trône de France, que, comme
son fils, le duc d'Angoulême, il quitterait la France pour toujours et
que son petit-fils, le jeune duc Henri de Bordeaux, ne régnerait jamais.
Le visionnaire avait raison. Le 3 août, le roi déchu a quitté
Rambouillet pour Cherbourg. Le 16 août, il s'est embarqué pour
l'Angleterre, la première étape d'un long exil.
Pour compléter la maigre rente de la Nation Française, Charles
X récupère 200 000 francs, qui ont été déposés
dans les banques anglaises. Cet en-cas substantiel a été laissé
là par feu Louis XVIII, en 1814, au temps du premier exil des deux frères
de Louis XVI, après la Révolution. Munis de ce viatique, les Bourbons,
avec la Maison du Roi (une quarantaine de personnes au total) ont trouvé
refuge au château féodal de Lulworth, près de Plymouth.
L'ancienne forteresse n'offre qu'un confort spartiate au roi, au duc et à
la duchesse d'Angoulême, à la duchesse de Berry et à ses
deux enfants, Henri et Louise Marie. Charles X qui a repris son ancien titre
de comte de Ponthieu, la qualifie de "Bastille". Mais il en apprécie
néanmoins le cadre boisé et goûte particulièrement
les promenades au bord de la mer.
Avec la venue de l'automne, il devient impossible d'habiter
Lulworth. Les jours de pluie, le château prend l'eau de toutes parts et
l'on ne peut s'y déplacer sans un parapluie. Le roi Georges IV d'Angleterre
et son Gouvernement offrent aux Bourbons de s'installer en Ecosse, à
Holyrood, près d'Edimbourg, où Charles X a séjourné
lors de son premier exil. La famille royale y est chaleureusement accueillie
par la population locale et y trouve enfin un refuge convenable.
Sous la férule du fidèle duc de Blacas, qui tente de restaurer
un semblant d'étiquette, chacun s'installe dans ses habitudes pendant
que le château, musée national, accueille de nombreux curieux attirés
par ces hôtes illustres. Le roi chasse, se repose, se souvient du temps
où Holyrood était le cadre romantique de ses amours avec sa chère
Louise de Polastron. Les dames font des ballades en calèche, s'ennuient.
Les jours s'étirent, longs et monotones.
Les nouvelles de Paris sont à la fois attendues et redoutées,
de même que les visites, comme celle de l'ancien ministre Haussez ou du
baron de Damas, qui a été le gouverneur du petit duc de Bordeaux.
La duchesse de Berry redevient la pétillante Marie Caroline et se met
en tête de faire monter son fils sur le trône de France. Après
avoir passé quelques mois à mettre son projet sur pied, Marie
Caroline décide de quitter secrètement l'Ecosse pour la France,
où elle compte renverser Louis Philipe. Charles X, fort dubitatif, l'a
autorisée finalement à tenter l'aventure. En juin 1832, la tentative
de la duchesse pour soulever la Vendée échoue. Les puissances
européennes s'inquiètent. L'Angleterre, la première, qui
a donné asile au roi déchu, ne peut développer l'Entente
Cordiale avec la France de Louis Philippe aussi librement qu'elle le souhaiterait.
Les Bourbons doivent repartir.
L'Empereur François 1er d'Autriche propose alors d'accueillir les exilés.
Madame Royale, la fille de Louis XVI, part la première chez ce cousin
hospitalier; bientôt suivie par Charles X, par son mari, le duc d'Angoulême,
puis par Henri, son jeune neveu. Leur nouvel asile est le palais royal de Hradschin,
près de Prague.
Résidence d'été de l'Empereur, il a été bâti
au XIVème siècle et ressemble à une citadelle. Dans son
enceinte, on dénombre quelque 440 appartements, quatre églises et une
cathédrale. Voilà qui est beaucoup trop grand, d'autant que les
lieux n'ont pas été convenablement meublés! Pourtant, Charles
X y retrouve le cours de ses habitudes. Si sa Maison s'est considérablement
réduite, le cardinal de Latil, le comte de Montbel, le duc de Grammont
et le cher Blancas sont restés à son côté. Le vieux
roi, qui approche maintenant ses quatre vingt ans, est de nouveau sujet à de douloureuses
crises de goutte, mais fait de longues promenades au bord de la Moldau et, chaque
matin assiste à la messe en compagnie du duc d'Angoulême, qui déprime
et dépérit.
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