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LE SACRE DE CHARLES X
Pour "renouer la chaîne des temps",
restaurer le lustre et l'autorité de la monarchie, Charles X entend être sacré
et couronné dans la grande tradition de l'Ancien Régime. Il sera le dernier
roi de France à recevoir le sacre à Reims, le 29 mai 1825.
L'article 74 de la Charte constitutionnelle
octroyée en 1814 par Louis XVIII à son peuple prévoit le sacre du roi à Reims.
Louis XVIII a annoncé publiquement son intention de procéder à cette cérémonie
solennelle, mais ses infirmités l'en ont empêché, où peut-être a-t-il invoqué
ses ennuis de santé pour s'y dérober et ne pas susciter l'hostilité des libéraux. Lorsque
Charles X succède à son frère, en septembre 1824, il entend bien respecter la
tradition qui veut que, depuis Clovis, les rois de France soient sacrés à Reims.
"Les Français ont voulu une Charte,
on la leur a donnée, mais il n'est pas possible que cette Charte m'empêche de
faire ma volonté", affirme-t-il. Non seulement le
nouveau roi a l'intention de gouverner par lui-même, mais il veut restaurer
la monarchie absolue. Les célébrations du sacre doivent être l'occasion pour
la nation toute entière de communier dans une même ferveur et de fermer la parenthèse
de la Révolution et de l'Empire.
Les cérémonies du sacre et du couronnement
sont prévues pour le 29 mai 1825, sitôt la session parlementaire close. La veille,
Charles X se rend à Reims. Pour lui faire bon accueil, des arcs de triomphe
ont été dressés, les rues ont été sablées, jonchées de fleurs et ornées de banderoles
de verdure, les façades des maisons ont été ornées de tentures et de guirlandes.
Sur le passage du cortège royal, la foule se presse, avide du spectacle : "Tout
Paris est aux fenêtres, tout Reims est aux toits"! Conformément
à la tradition, à la cathédrale, le roi assiste au vêpres, suivies par un solennel
Te Deum. Le sermon est prononcé par le cardinal de La Fare, le prélat
qui a prêché lors de l'ouverture des Etats Généraux en mai 1789.... Dans un
mandement, l'archevêque de Reims explique que le pouvoir royal prend sa source
dans le droit héréditaire qui préexiste au sacre : une façon de dire que le
souverain ne tient plus son pouvoir de Dieu. Ainsi, au cours d'une cérémonie
apparemment semblable aux précédentes, quelques détails montrent que des précautions
sont prises pour ne pas inquiéter certains Français, restés hostiles à la monarchie;
et que le sacre a changé de signification. Dès les premières heures du 29
mai, les invités officiels prennent place dans la vénérable basilique Saint
Rémi. Richement tapissée de velours et de soie, iluminée par d'innombrables
bougies qui se réflètent dans les décors d'or et d'argent, celle-ci est littéralement
étincelante! Le cortège royal fait son entrée un peu avant huit heures. Précédé
de hallebardiers en grand uniforme à la Henri IV, Charles X s'avance lentement
jusqu'à l'autel, vêtu de satin blanc brodé d'or et coiffé d'une toque ornée
de plumes et de diamants.
Comme de coutume, l'archevêque demande au
roi de promettre de protéger son peuple et l'Eglise. Mais l'évocation de la
nécessaire "extinction des hérésies" est supprimée pour ménager les
protestants et les libéraux, et Charles X n'oublie pas de mentionner la Charte.
Quatre représentants de la France nouvelle, les maréchaux Moncey, Soult, Mortier
et Jourdan, apportent les insignes du pouvoir royal, l'épée de connétable, le
sceptre, la main de justice et la couronne. Après une longue prière, le souverain
se prosterne de tout son long, puis reçoit la rituelle onction de la liqueur
de la Sainte Ampoule mêlée au Saint Chrême et revêt les habits et insignes royaux.
Enfin, il est couronné par l'archevêque, assisté des deux premiers princes du
sang. A l'exclamation du prélat, qui répète trois fois Vivat rex in oeternam!,
l'assemblée répond par un même "Vive
le roi!", tandis que le clergé entonne un vibrant
Te Deum, puissamment soutenu par le chant des orgues et des trompettes. A
l'ouverture des portes, un flot populaire envahit l'église, tandis qu'une nuée
de colombes se perd dans les nuages d'encens et sous les voûtes. Au dehors,
l'artillerie tonne sur les remparts de la ville; les troupes tirent des salves
de mousqueterie; les cloches des églises sonnent à toute volée. Au milieu des
acclamations, la foule se dispute les médailles d'argent que jettent à pleines
poignées des hérauts d'armes. "L'univers
vieilli rêve qu'il voit renaître un nouvel âge d'or",
chantera le poète Lamartine. Mais l'enthousiasme des Rémois n'est pas partagé
par le reste des Français. Le 6 juin, les Parisiens réserveront un accueil plutôt
froid à Charles X. Pour les libéraux et les républicains, malgré les modifications
de détail, ces cérémonies chargées de religiosité et sacrifiant à la plus stricte
tradition laissent mal augurer de l'avenir.
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Charles X, sa Vie
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