LE "DAGUERREOTYPE" DE JACQUES DAGUERRE

Le 7 janvier 1839, François Arago, secrétaire perpétuel de l'Académie des Sciences, divulgue l'invention de Jacques Daguerre permettant de fixer l'image d'un objet sur une plaque métallique. Ouvrant la voie à la photographie, le "daguerréotype" va susciter autant d'enthousiasme auprès des savants que du public.

Jacques Daguerre, décorateur de théâtre et inventeur du spectacle inédit qu'est le "diorama", rencontre le physicien Nicéphore Niepce en 1827. Celui-ci a déjà de longues années de travail derrière lui. En 1822, il a réalisé la première "photographie" en réussissant grâce à l'héliogravure, ancêtre de la photogravure, à fixer sans chambre noire une image sur une plaque métallique en l'exposant à la lumière solaire, pendant un temps de pause de huit heures! Depuis, il a poursuivi ses essais en chambre noire, un procédé que Daguerre a utilisé pour son "diorama".

Daguerre est aussi ouvert et exalté que Niepce est froid, circonspect, voire méfiant. Mais tous les deux sont francs et loyaux. Ils s'entendent bien et, en 1829, décident de s'associer. Leurs esprits si différents se fécondent mutuellement : Daguerre prend à peine connaissance des travaux de Niepce qu'il les améliore et en fait son oeuvre. Leurs recherches aboutissent à l'invention du "physautotype", dont la base est le résidu de lavande, qui permet d'obtenir des images directement positives en une seule révélation. Mais Niepce meurt le 15 juillet 1833, sans avoir obtenu le succès espéré.
Daguerre poursuit alors seul ses expériences. En 1835, il invente un procédé permettant de développer les images. Deux ans plus tard, il découvre comment les fixer. En 1838, il réalise son premier "daguerréotype", terme qui désigne à la fois l'appareil de prise de vue et le résultat obtenu. L'équipement complet du "daguerréotypiste" comprend une chambre de prise de vue et le matériel de développement, l'ensemble pesant cinquante kilos et coûtant quatre cents francs or, soit huit mois de salaire d'un ouvrier. L'appareil permet de fixer une image, après un temps de pose de quinze à trente minutes, sur une plaque de cuivre argenté soumise à une vapeur d'iode puis à une vapeur de mercure.
En 1836, Daguerre a signé avec le fils de Niepce, un contrat d'association précisant que l'invention portera son seul nom. Après l'obtention des premiers daguerréotypes, les deux hommes tentent de lancer une souscription qui permettrait de tirer un bénéfice financier de la découverte tout en la rendant publique; en vain.

Fin décembre 1838, Daguerre se décide à montrer ses images à François Arago, scientifique réputé, astronome à l'Observatoire de Paris et secrétaire perpétuel de l'Académie des Sciences, et envisage de lui vendre son invention. Arago commence par expérimenter le daguerréotype en prenant une photographie du boulevard du Temple : convaincu de son intérêt, il en rend compte le 7 janvier 1839. Finalerment, après avoir été divulgée, l'invention de Daguerre ne donnera pas lieu à l'achat d'un brevet et sera exploitée au bénéfice de l'Etat, au lieu d'être vendue à bon prix à l'étranger! Le 15 juin, après qu'Arago s'est chargé de négocier le contrat avec le ministère de l'Intérieur, le roi Louis Philippe signe un projet de loi accordant une rente viagère de six mille francs à Daguerre et de quatre mille francs à Isidore Niepce, à titre de récompense nationale. A la Chambre, le vote se termine dans la liesse générale. "Possédé par un seul, le procédé resterait longtemps stationnaire et se flétirait peut-être; devenu public, il grandira et s'ameliorera du concours de tous", explique le physicien Louis Gay Lussac. "Sa réussite tient à ce que tout ce que l'image renferme se trouve reproduit dans les plus minutieux détails avec une exactitude et une finesse incomparables", précise Arago.
Le 21 août, Daguere publie son manuel d'instruction intitulé Historique et Description des procédés du daguerréotype et du diorama. Quelques jours plus tard, il réalise une première démonstration publique devant des scientifiques et des journalistes. Malgré la reconnaissance unanime de ses contemporains et l'extraordinaire succès dont jouit sa découverte, l'inventeur, ruiné en janvier 1839 quand son diorama est détruit par un incendie, finira ses jours dans la pauvreté.

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