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DECAZES, FAVORI DE LOUIS XVIII Devenir
le favori du roi est la position la plus convoitée du royaume, et ce depuis
l'avènement de la monarchie. Elie Decazes est sans doute le favori le plus chéri
de tous. Louis XVIII, sans enfant, lui a donné toute sa confiance et lui voue
une affection proprement paternelle. Il le considère tout simplement comme son
fils, le seul et le préféré.
En ce début 1820, le véritable passion
paternelle qui lie Louis XVIII à Elie Decazes est à son comble. Le roi a une confiance
sans borne en celui qu'il a successivement nommé ministre de l'Intérieur et président
du Conseil. Louis est âgé de soixante cinq ans, veuf et sans enfant. Il éprouve, pour ce brillant
et ambitieux juriste de quarante ans plus qu'un attachement. C'est un fils spirituel, auquel il
se fie aveuglément. Curieux couple que le vieux souverain fatigué et malade et le
fringant Elie, distingué, élancé et bouillonnant d'énergie. Ambitieux, habile,
intelligent et diplomate, Decazes a tout de suite su s'y prendre pour retenir l'attention
du souverain. Ce bel homme, descendant d'une vieille famille de Guyenne, est un esprit
brillant qui use volontiers de son pouvoir de séduction. Il a conquis le souverain par
son assurance, son naturel et sa faconde de bon Girondin et d'avocat.
Dès 1815, le roi Louis XVIII nomme
Decazes, en remplacement de Fouché, préfet de police. Depuis, l'ascension du favori a
été foudroyante. Intronisé pair de France en 1818, il succède, à la fin de cette
même année, au duc de Richelieu comme ministre de l'Intérieur. En novembre 1819, il
accède au poste de président du Conseil. Mais Decazes est surtout la conseiller
principal de Sa Majesté, son confident indispensable. Très vite, Louis XVIII s'adresse
à son indispensable favori en lui donnant du "mon cher
enfant". Le roi accorde à Decazes une confiance sans réserve et fait preuve
à son égard, au-delà de l'estime et de l'amitié, un amour quasiment paternel. Chaque
jour, aux Tuileries, le souverain attend et espère. Une visite, un message d'Elie; et
voilà le vieil homme heureux. Il faut dire que le roi est bien seul, au milieu de ses
courtisans et de ce qui lui sert de famille. Son frère, Monsieur, le comte d'Artois
(futur Charles X) est en désaccord constant avec lui. Ses neveux, les ducs d'Angoulême
et de Berry le déçoivent aussi par leur opposition systématique. La faveur de Decazes
déchaîne la fureur des ultraroyalistes, au service desquels l'écrivain Chateaubriand a
mis son talent et sa plume acérée. Les idées modérées du favori, reflet des tendances
libérales, déplaisent. Decazes ose faire voter une loi pour libéraliser la presse. Il
veut "royaliser la nation et nationaliser la royauté".
Ses détracteurs le traitent "d"huissier gascon"
et parfois de "parvenu roturier".
Mais ces réactions n'ont aucun effet sur
les sentiments de Louis XVIII. Il a marié Elie à une riche jeune fille de seize ans,
Egédie de Sainte Aulaire, alliée à la noblesse allemande, et se prend de passion pour
toute la famille. Il la couvre de cadeaux, demande à être parrain du premier-né, et
écoute toujours aussi attentivement son "fils adoré". Chacun pense que le
véritable roi de France s'appelle Decazes.
Les événements se précipitent le 14 février 1820. Alors que le carnaval bat son plein,
le duc et la duchesse de Berry sortent d'un bal à l'Opéra. Le duc escorte sa femme vers
leur voiture. Soudain il est mortellement agressé. L'assassin, le fanatique Louvel, est
aussitôt arrêté. Decazes accourt sur les lieux du drame, puis s'en va réveiller le roi.
Dès lors, les dés sont jetés. Le favori, en tant que ministre de l'Intérieur jugé
trop permissif, va porter la responsabilité de la mort du duc de Berry. Dès le
lendemain, les ultras en profitent pour exiger sa destitution. La Chambre des Députés
s'enflamme, réclamant sa mise en accusation comme "complice
d'assassinat". Le futur Charles X et son fils s'en mêlent. On supplie Louis
XVIII de le renvoyer pour "empêcher de nouveaux crimes".
A son corps défendant, le roi se voit contraint de céder à ces multiples pressions. Le
18 février, Decazes présente sa démission. Le 26, tout est fini. Il quitte Paris pour
son domaine de la Grave en Gironde. Mais les sentiments de Louis XVIII n'ont pas changé. "Je t'aime et je t'aimerai toujours", écrit-il à son
fils putatif.
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