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INGRES
En
1840, la présentation au Palais Royal du tableau Antiochus et Stratonice,
réalisé par le peintre Jean Auguste Dominique Ingres, soulève l'enthousiasme
général. Le grand poète et critique d'art Charles Baudelaire va jusqu'à écrire
que cette oeuvre "eut étonné Poussin",
artiste du XVIIème siècle qui reste la référence absolue en matière de peinture
française.
Jean Auguste Dominique Ingres est né en 1780 à Montauban,
où son père, sculpteur, a encouragé sa vocation et son talent précoce. En 1797,
il est entré dans l'atelier du célèbre peintre révolutionnaire Jacques Louis
David, à Paris, où il s'est rapidement fait remarquer. Prix de Rome en 1801,
avec Les Ambassadeurs d'Agamemnon, il n'a pu se rendre qu'en 1806 en
Italie où, ses oeuvres étant mal reçues en France, il est resté jusqu'en 1824.
Puisant son inspiration chez Raphaël et Nicolas Poussin, Ingres, par sa prise
de position comme défenseur de la tradition néoclassique et son goût pour une
peinture "réaliste", heurte les esprits romantiques de son temps.
Il va lui falloir bien des années, durant lesquelles il multiplie les scènes
d'histoire, les peintures d'inspiration orientaliste ou médiévale et les portraits
qui lui permettent de vivre de son art, avant d'être enfin reconnu.
Mal aimé en France, Ingres passe une grande partie de
sa carrière en Italie, où il reçoit néanmoins des commandes de ses compatriotes,
comme Le Voeu de Louis XIII, peint en 1824 pour la préfecture de Montauban.
Cette oeuvre lui vaut un grand succès. Il devient membre de l'Institut et ouvre
un atelier à Paris. Il y reste jusqu'en 1834, année où son Martyre de Saint
Symphorien est vivement critiqué. Il postule alors pour le poste d'administrateur
de la Villa Médicis à Rome, où, jusqu'en 1841, il se consacre à l'enseignement.
Il fait restaurer l'illustre maison dont il a la charge, en fait décorer les
jardins, y préside à la construction d'une galerie d'architecture. Son comportement
exemplaire lors d'une grave épidémie de choléra lui attire le respect de tous
ses élèves. En outre, il organise des soirées musicales où il tient la partie
de violon, car, plus jeune, il a été le deuxième violon de l'orchestre du Capitole
de Toulouse, une passion pour un instrument qyu sera à l'origine du proverbial
"violon d'Ingres"! Mais le peintre n'abandonne pas son art pour
autant. Il dessine (parmi les quelque 4 000 de ses oeuvres réunies au musée
de Montauban, la plupart sont des dessins), exécute de nombreux portraits, sacrifie
à la mode orientaliste dans des tableaux tels que La Grande Odalique,
aujourd'hui conservée au musée du Louvre. Peu avant son départ pour Rome, le
duc Ferdinand d'Orléans, le fils aîné de Louis Philippe, lui a commandé un tableau
destiné à faire pendant à une oeuvre de Paul Delaroche représentant l'assassinat
du duc de Guise, aujourd'hui au musée Condé à Chantilly.
Le sujet, Antiochus et Stratonice est tiré de La
Vie de Démétrius, de l'écrivain grec de l'Antiquité Plutarque : Antiochus,
fils de Seleucus, roi de Syrie au IIIème siècle avant Jésus Christ, se meurt
d'amour pour sa jeune belle-mère Stratonice; il est déjà presque mort lordque
le médecin Erasistrate perçoit la cause de son mal en découvrant son émoi en
présence de la femme aimée. Pour cette composition à quatre personnages, le
peintre réalise de nombreuses esquisses, reprend jusqu'à 35 fois le mouvement
des bras d'Antiochus repoussant le médecin venu l'examiner. Fidèle à son habitude,
il sollicite ses proches : son épouse pose pour lui; les bras de son élève,
le jeune peintre Hyppolite Flandrin, servent de modèle à ceux d'Antiochus. Achevé
en 1840, le tableau est aussitôt livré au commanditaire et, présenté au Palais
Rpyal, reàoit un accueil triomphal. Fort satisfait, le duc d'Orléans écrit aussitôt
à Ingres pour lui demander de faire son portrait. D'abord réticent, car cela
l'oblige à revenir à Paris pour les séances de pose au palais des Tuileries,
le peintre se laisse vite convaincre par son modèle, un homme très populaire.
Ce portrait, terminé en avril 1842, connaît un immense succès et de nombreuses
répliques en sont commandées. Une demande qui s'accroît avec la mort tragique
du prince au mois de juillet. Dès lors, définitivement installé à Paris,
Ingres est comblé d'honneurs et, n'en déplaise à la critique, cumule les commandes
officielles.
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