L'HERITAGE REBELLE ET LIBERAL DU FUTUR LOUIS PHILIPPE

Depuis les déboires de Louis XIII avec son jeune frère, le duc Gaston, les rois de France éprouvent une angoisse atavique devant la lignée des Orléans. Mais, en ce 6 octobre 1773, Louis XV ne s'inquiète pas de la naissance du petit duc de Valois. Pourtant, l'héritier des Orléans quccédera à trois de ses petits-fils et montera sur le trône sous le nom de Louis Philippe, roi des Français.

Louis Philippe naît à Paris, au Palais Royal, le 6 octobre 1773. Le petit duc de Valois est le fils aîné du duc de Chartres, qui héritera du titre de duc d'Orléans en 1785 et deviendra, sous la Révolution, Philippe Egalité. Pour l'instant, le père du futur Louis Philippe professe des idées libérales, en accord avec les mouvements philosophiques de son temps. Malgré des allures et un train de maison de gentilhomme fortuné, le duc aime à jouer au bourgeois éclairé. Il est ouvert aux changements qui s'anoncent, dans ses convictions comme dans ses entreprises, n'hésite pas à faire des affaires et du commerce, chose alors inhabituelle, voire choquante, chez lzs princes. Il faut dire aussi qu'il comploté contre le roi son cousin. Sa Maison forme un clan à part au sein de la famille royale. Chez les Orléans, depuis les révoltes de Gaston contre son frère aîné Louis XIII, on est volontiers frondeur. Louis XIV s'est bien gardé de réveiller chez son frère, Philippe d'Orléans, d'éventuels appétits de pouvoir. Pourtant, c'est le fils de celui-ci, prénommé également Philippe, qui est devenu régent de France à la mort du Roi Soleil. Comme ses ancêtres et si tel est son destin, l'enfant qui vient de naître aura son rôle à jouer dans la succession au trône. Et dès le berceau, Louis Philippe y sera préparé.

La Maison d'Orléans possède une fortune immense et jouit de rentes considérables. Les duchés d'Orléans, de Chartres et de Valois lui appartiennent de droit, ainsi que le château de Saint Cloud et le Palais Royal. Le sang royal du jeune duc de Valois est encore renforcé, quoique de façon "détournée", par celui de sa mère : la duchesse Adélaïde née Bourbon Penthièvre, arrière-petite-fille de Louis XIV et de sa maîtresse, madame de Montespan. Le duc Louis Philippe Joseph l'a épousée en 1769, en dépit de l'opposition de Louis XV, qui voyait d'un mauvais oeil cette union déplacée et consolidant encore la fortune du clan des Orléans.
La duchesse Adélaïde est une mère douce et pieuse. Elle donnera à son aîné deux frères et une soeur. Mais elle n'a guère l'occasion de s'occuper de l'éducation de sa progéniture. Au grand dam de la Cour et du Tout Paris, son époux a confié cette tâche importante à sa maîtresse, la comtesse de Genlis. En 1770, à l'âge de vingt quatre ans, celle-ci est entrée au service des Orléans comme dame d'honneur de la duchesse. Sept ans plus tard, elle est devenue la gouvernante de la petite princesse Adélaïde. En 1782, Louis Philippe a neuf ans lorsque son père aggrave le scandale en nommant sa chère et ambitieuse Stéphanie Félicité "gouverneur" de tous ses enfants, fille et fils compris. Une femme pour élever des princes du sang! Celà ne s'est jamais vu au sein de la noblesse de France, où les garçons sont éduqués en hommes et par des hommes. Pourtant, madame de Genlis prend ses fonctions avec tout le sérieux qui la caractérise.

La comtesse de Genlis a des théories arr^étées sur l'éducation à donner à des princes en cette fin du XVIIIème siècle. Elle a beau être femme, ses décisions sont des ordres impératifs. Elle se comporte avec une mâle autorité, qu'elle sait adoucir, toutefois, d'une touche maternelle. Elle veut donner à ses élèves une formation complète, tant intellectuelle que physique, afin d'en faire des êtres complets et, selon les préceptes de Diderot, épris de démocratie et de nouveauté. Pour les superviser exclusivement, elle installe les petits princes au pavillon de Bellechasse, dans l'actuel VIIème arrondissement de paris, que le duc d'Orléans a fait spécialement bâtir sur ses directives. Elle les soumet à des cours de latin, de grec, de sciences, de physique. Elle a beau être secondée par les abbés Guyot et Lebrun, elle seule préside à l'organisaton des journées et ses pensionnaires doivent effectuer, lors de "récréations utiles", des travaux manuels, vannerie, menuiserie, reliure, céramique et même patisserie.
Levée à six heures, couchée à dix, la fratrie des jeunes Orléans ne perd pas une miette de temps, ni de savoir. Elle parle allemand avec le jardinier, anglais avec le valet de chambre, italien et espagnol avec son "gouverneur". Madame de Genlis fait créer une ferme dans le parc de Saint Leu pour initier ses protégés à la nature mise en vogue par Jean Jacques Rousseau, à l'agriculture et au jardinage. Mais elle sait aussi retenir l'affection des enfants qui l'appellent souvent "maman"...

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