|
LA REACTION AU POUVOIR
Après avoir renvoyé le ministère du comte
de Martignac, Charles X se tourne vers l'un de ses fidèles, le prince Jules
Auguste de Polignac, qui partage toutes ses "vieilles idées". Nommé
le 8 août 1829, le Gouvernement formé par ce réactionnaire ultraroyaliste va
immédiatement susciter l'hostilité de la Chambre des députés et de l'opinion.
Le 4 août 1829, Charles X a renvoyé le
ministère modéré du comte de Martignac. Considérant que son devoir lui dicte
d'appliquer sa propre politique et persuadé que le pays l'entend bien ainsi,
il a, contre l'avis des députés, chargé le prince Jules Auguste de Polignac
de former un ministère "suivant son
coeur". Mais la désignation du nouveau ministre des
Affaires Etrangères et Chef du Gouvernement, ainsi que le choix des hommes,
parmi les plus impopulaires du royaume, dont il s'entoure vont apparaître aux
yeux de l'opinion publique comme une provocation. Fils de madame de Polignac,
la favorite de Marie Antoinette, qui a quitté la France avec ses parents dès
juillet 1789, est en quelque sorte le symbole de l'émigration. Depuis toujours
proche du roi (on l'a même soupçonné d'être son fils adultérin), dont il partage
toutes les idées réactionnaires, il appartient à l'extrême droite du parti ultra.
Il confie le ministère de l'Intérieur à l'ultra royaliste François de la Bourdonnais,
l'homme de la Terreur blanche, qui a réclamé "des
fers, des bourreaux, des supplices" pour ceux qui
se sont ralliés à Napoléon pendant les Cent Jours. Le ministère de la Guerre
échoit au comte Louis de Bourmont, un ancien chouan qui, à Waterloo, a abandonné
le camp français pour passer à l'ennemi.
Nommé par ordonnance royale le 8 août 1829,
le Gouvernement Polignac suscite immédiatement la défiance et l'hostilité de
la Chambre des députés et de l'opinion. La presse se déchaîne : "Ainsi
le voilà encore une fois brisé ce lien d'amour et de confiance qui unissait
le peuple au monarque! Voilà encore une fois la Cour avec ses vieilles rancunes,
l'émigration avec ses préjugés, le sacerdoce avec sa haine de la liberté qui
viennent se jetre entre la France et le roi (... Qu'avons nous fait pour que
notre roi se sépare de nous? (...) Malheureuse France! Malheureux roi!",
lance le Journal des Débats le 10 août. Quelques jours plus tard, le
quotidien revient à la charge : "Coblence,
Waterloo, 1815, voilà les trois principes, voilà les trois personnages du ministère
(...). Prenez nos haines d'il y a trente ans, nos douleurs et nos inquiétudes
d'il y a quinze ans, tout est là, tout s'y est donné rendez vous pour insulter
et irriter la France". Polignac souhaite pronfondément
restaurer une monarchie autoritaire, voire d'Ancien Régime, mais, ancien ambassadeur
à Londres, où il a montré des talents de diplomate, et marié à une anglaise,
il est coupé de la réalité de la vie politique française et des réactions de
ses contemporains. Déconcerté par une opposition dont il n'a pas soupçonné la
force, il fait à la tribune des débuts médiocres. Présomptueux, sûr de sa réussite,
il est prêt à affronter une Chambre hostile jusqu'à la dissolution pour imposer
sa politique et celle de Charles X.
"J'ai mes vieilles
idées, je veux marcher avec elles", affirme le roi,
qui a toute confiance en son "cher Jules". Face à ce pouvoir réactionnaire,
l'opposition de gauche pressentant le Coup d'Etat, s'organise, conspire. Une
autre opposition, monarchiste, se dessine autour du duc d'Orléans, le futur
Louis Philippe. Officiellement nommé Président du Conseil en novembre, le prince
de Polignac n'entend cependant pas abolir la Charte. Echouant à préparer la
nouvelle session des Chambres comme à épurer l'administration, il semble se
préoccuper moins de politique intérieure que des affaires extérieures. Il confirme
un rapprochement entre la France et la Russie, ce qui lui vaudra le soutien
du tsar Nicolas 1er pour lancer l'expédition d'Alger au printemps 1830. Pendant
ce temps, l'opposition se déchaîne. Adolphe Thiers, Auguste Mignet et Armand
Carrel attaquent violemment la politique de Charles X et vont jusqu'à suggérer
: "Gardons le régime et changeons
le roi". A la Bourse, les valeurs baissent. L'hiver
particulièrement rigoureux paralyse l'économie et aggrave la misère du peuple.
Après des négociations avec Méhémet Ali, le vice-roi d'Egypte, le Gouvernement
décide, fin janvier 1830, d'intervenir en Algérie. Mais de glorieuses opérations
militaires à l'extérieur suffiront-elles à faire oublier les difficultés intérieures?
Sans doute Charles X et Polignac l'espèrent-ils, qui n'attendent plus que l'ouverture
de la session parlementaire, le 2 mars 1830, pour obliger la Chambre à se soumettre.
Le plus de la fiche
© 2002-2003 cliannaz@noos.fr
|