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LA MORT DE TALLEYRAND, PRINCE DIPLOMATE
Le 17 mai 1838, le prince Charles
Maurice de Talleyrand Périgord s'éteint en son hôtel Saint Florentin, à Paris.
Témoin et acteur d'une époque troublée, survivant de l'Ancien Régime et de la
Révolution, de l'Empire et de la Restauration, le vieux diplomate a tout vécu,
tout vu. Aujourd'hui, âgé de quatre vingt quatre ans, il s'apprête à négocier
sa dernière ambassade...
Au matin du 17 mai 1838, en l'hôtel Saint Florentin, Charles
Maurice de Talleyrand Périgord se meurt des suites d'une infection de la région
lombaire. Une opération a été tentée, sans anesthésie. Le malade l'a supportée
courageusement, mais la fièvre n'en a pas diminué pour autant. A quatre vingt
quatre ans, le prince à l'intelligence lucide, qui a su ménager tous les régimes,
se prépare à la mort comme à une dernière manoeuvre diplomatique.
Talleyrand a tout orchestré : ses adieux au monde, son
testament, ses Mémoires à publier trente ans après sa disparition. Lui
qui a été évêque d'Autun, député du clergé, défroqué, marié, prince de Bénévent,
plusieurs fois ministre des Affaires Etrangères, qui a su composer avec tous
les régimes, qui s'est ménagé l'oreille des révolutionnaires, de Napoléon, de
Louis XVIII, de Charles X et de Louis Philippe, ne renie rien de ses actions
passées. Il lui reste cependant une dernière formalité à régler... Pour avoir
demandé la nationalisation des biens du clergé, prêté serment à la Constitution
civile du clergé, sacré les premiers prélats assermentés et vécu en laïc, Talleyrand
a été condamné par le pape Pie VI. Sa très chère, très pieuse nièce et légataire
universelle, la duchesse Dorothée de Dino, l'a convaincu de mourir religieusement,
c'est-à-dire après avoir obtenu le pardon de Rome. Le malade a soigneusement
préparé le mea culpa qu'on exige de lui. Depuis des mois, il en peaufine
la procédure, avec son ami l'abbé Dupanloup, directeur du séminaire de Saint
Nicolas du Chardonnet, et l'archevêque de Paris, monseigneur de Quelen, qui
a promis à son prédécesseur, le cardinal de Talleyrand Périgord, de sauver l'âme
de son neveu.
A six heures du matin, en présence de sa famille, de l'abbé
Dupanloup, de son fidèle serviteur Hélie, de ses amis, le prince consent enfin
à ce que sa nièce lise publiquement le texte qu'il a plusieurs fois remanié.
"Je suis arrivé, au terme d'un grand âge et d'une grande expérience, à
blâmer les excès du siècle auquel j'ai appartenu et à condamner franchement
les graves erreurs qui ont troublé et affligé l'Eglise catholique, apostolique,
romaine, auquelles j'ai eu le malheur de participer..." En conclusion,
le prince assure au pape Grégoire XVI qu'il a fait sa "soumission
entière à la doctrine et à la discipline de l'Eglise..." Talleyrand
est ainsi en paix avec sa conscience pour recevoir une dernière visite : celle
du roi Louis Philippe, venu rendre un ultime hommage à celui qui a été son ambassadeur
à Londres jusqu'en 1835. A trois heures de l'après-midi, après s'être confessé
et avoir reçu l'extrême-onction, Charles Maurice de Talleyrand Périgord rend
son dernier soupir. Le 22 mai, on lui fait des obsèques en grande pompe. De
l'hôtel Saint Florentin à l'église de l'Assomption où doit être célébrée la
messe basse, le cortège funèbre est suivi par une foule immense, des membres
de la Maison du roi, des diplomates, des pairs de France, les autorités militaires,
civiles et ecclésiastiques. En septembre, conformément aux dernières volontés
du défunt, la dépouille du prince des diplomates est transférée dans son domaine
adoré de Valençay et inhumée dans la crypte de la chapelle Saint Maurice.
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