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ZOE DU CAYLA : L'AMIE DE COEUR DE LOUIS XVIII
Louis XVIII se sent triste et fatigué.
En ce mois de février 1820, il a perdu son neveu, le duc de Berry, sauvagement
assassiné par le fanatique Louvel, et il a dû se séparer
du chef du Gouvernement, Elie Decazes, son cher favori. En proie à des
crises de goutte de plus en plus fréquentes, le "roi sans jambes",
comme il se surnomme lui-même, passe le plus clair de son temps dans son
fauteuil. Heureusement, Zoé, la belle comtesse du Cayla, son amie de
coeur, est là, auprès de qui il peut s'épancher.
La comtesse Zoé du Cayla a vingt cinq ans et règne
sans partage dans le coeur du vieux souverain, de quarante ans son aîné.
Il y a deux ans que Louis XVIII a rencontré sa belle amie. Frivole et
volage, celle-ci vivait séparée d'un mari lassé de ses
infidélités, et qui demandait la garde de leurs deux enfants.
Pour ne pas perdre ses petits, Zoé avait demandé audience au roi.
Louis XVIII, autant touché par les accents sincères de la mère
que séduit par le charme de la femme, avait tranché en sa faveur.
Après avoir demandé à Elie Decazes, alors ministre de l'Intérieur,
de régler le problème, il avait confié à la comtesse
qu'elle serait toujours la bienvenue chez lui. C'est ainsi qu'a débuté
une amitié que le destin s'est hâté de favoriser.
En février 1820, après la mort de son neveu, le duc de Berry,
Louis XVIII a été contraint de se séparer de son cher Elie
Decazes, "qui a glissé dans le sang", selon le mot de l'écrivain
Chateaubriand, et que les ultras rendent responsables de l'assassinat du duc.
Depuis lors, désespéré, le roi se languit d'une présence
amie, d'une oreille attentive à laquelle se confier. Il se souvient de
la charmante comtesse du Cayla et la fait appeler.
Bientôt, les visites de Zoé se font plus longues
et plus fréquentes. Les ultras s'en réjouissent car la comtesse,
qui a été recommandée auprès du roi par l'un des
leurs, Sosthène de La Rochefoucauld, est sensible à leur cause.
Bien en Cour, elle pourra peut-être les servir utilement! La comtesse
n'a pas pour seul atout ses formes plantureuses. Elle a aussi connaissance d'un
secret qu'elle va négocier avec autant de diplomatie que de délicatesse.
Elle est la fille d'Antoine Omer Talon, un magistrat détenteur de documents
confidentiels pouvant se révéler fort compromettants pour le roi.
En 1789, Talon, lieutenant civil du Châtelet, a recueilli les déclarations
du marquis de Favras concernant la conspiration menée par le comte de
La Châtre en vue d'éliminer Louis XVI et de confier la régence
à son frère, le comte de Provence. Ce dernier, qui règne
désormais sous le nom de Louis XVIII, n'aurait aucun intérêt
à voir relancer cette affaire, qui n'a jamais été totalement
éclaircie. Heureusement, le procès verbal des aveux de Favras
n'a pas été divulgué. Talon, qui a été agent
secret au service de Provence, a gardé le secret. A sa mort, en 1811,
il a légué les précieux documents à sa fille. Celle-ci
les a donnés au roi, qui s'est empressé de les brûler. Depuis
lors, Louis XVIII et la belle et habile comtesse sont liés par une reconnaissance
réciproque.
Fin 1820, Zoé du Cayla devient la favorite officielle
de Louis XVIII. Elle est reçue au palais trois fois par semaine, de trois
heures à cinq heures de l'après-midi. Lors de ces entrevues, nul
n'est admis dans le cabinet du roi. Une fois, pourtant, le rituel immuable est
bousculé par le chancelier Dambray, qui frappe à la porte....
A quoi le roi répond : "Entrez, Zoé". L'anecdote
déchaîne les cancans des courtisans, qui baptisent le pauvre conseiller
du sobriquet de "Cru.... Zoé"!
A la Cour, les mauvaises langues vont bon train, accusant la comtesse de n'accorder
son "amitié" au roi que pour mieux servir ses intérêts.
Et les cadeaux dont Louis XVIII la couvre ne sont pas pour faire taire les jaloux.
Ainsi cette Bible dont toutes les illustrations sont protégées
par des billets de mille francs faisant office de papier de soie. En la lui
offrant, Sa Majesté a galamment précisé : "Si
vous tombez dans l'adversité, vous trouverez dans ce saint livre un soulagement
efficace". On glose de même à n'en plus finir sur le
petit sac en velours vert que porte Zoé en sortant de chez le roi et
qui serait plein de pièces d'or. Mais intéressée ou pas,
la favorite comble son bienfaiteur. Attentive à ses petites misères
et à ses grands tracas, elle s'informe de sa santé, le fait rire,
lui conte des histoires amusantes. Pour Louis XVIII, cette compagne pleine de
sollicitude vaut toutes les maîtresses. Et leur véritable amitié
amoureuse va illuminer les dernières années du souverain.
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