MARIE TOUCHET
A l'automne
1566, Charles IX, longtemps moqué pour son peu d'inclination pour les dames,
tombe éperdument amoureux de Marie Touchet. Bien que huguenote et malgré la
reine mère, Catherine de Médicis, la jolie et sage Orléanaise restera pendant
sept ans et demi la favorite du roi.
A l'automne 1566, Charles IX a seize ans lorsqu'il rencontre,
au cours d'une chasse près d'Orléans, la jolie Marie Touchet. La jeune fille,
d'origine flamande et d'un an la cadette du roi, est de modeste extraction.
Son père, Jean Touchet, lieutenant de bailliage, est un simple magistrat de
la ville. Dès le premier regard, entre les deux jeunes gens l'amour fait des
étincelles. Réputé timide auprès des dames, Charles n'a jusqu'à présent connu
aucune aventure sérieuse. Les méchantes langues de la Cour le soupçonnent même
de ne pas avoir d'inclination pour le beau sexe. Mais, à madame de Montpensier,
qui s'étonne de sa chasteté, le roi aurait rétorqué que
"s'il se mettait un jour à coqueter, il donnerait tant d'exercice à toutes
les dames qu'elles se repentiraient d'avoir éveillé le lion qui dormait"! Néanmoins,
fort contrit par la remarque, Charles s'est senti obligé de conter fleurette
de-ci, de-là, mais sans jamais nouer de véritable liaison amoureuse. Jusqu'à
ce que, tombé sous le charme de Marie, il se sente pousser des ailes : le soir
même de leur rencontre, le voilà qui charge Charles de Gondi, seigneur de La
Tour et maître de sa garde robe, de convaincre la jolie blonde d'aller le retrouver
dans sa chambre.
Bien qu'engagée avec le frère de l'évêque de Valence,
Marie rejoint le roi. Peut-elle se permettre de refuser ses faveurs? Ce joli
brin de fille "avait le visage rond, le front plus
bas que haut, le nez d'une juste proportion, la bouche petite et le bas du visage
admirable", rapporte la chronique. Un portrait brossé par le peintre
François Clouet la représente bien en chair, la poitrine opulente et les épaules
magnifiques. Pour ne rien gâter, elle était aussi "fort
érudite, spirituelle, enjouée". Pour permettre à Marie Touchet
de suivre la Cour dans tous ses déplacements, Charles IX demande à sa soeur
Marguerite de la faire entrer à son service comme femme de chambre et, à Paris,
l'installe dans une résidence particulière. Conquis, le jeune roi s'adonne
au jeu de la séduction et de l'amour courtois. A sa belle il remet un billet
avec une seule phrase : "Je charme tout".
Et explique que c'est là une anagrame de son nom, composée par le poète Dorat;
qu'importe s'il y manque le "i" de Marie... Peu à peu, la favorite,
qui a rompu avec son promis, s'attache au roi et prend son rôle très au sérieux.
De religion protestante, n'est-elle pas la preuve vivante que catholiques et
réformés peuvent fort bien s'entendre? Si elle ne réside pas à la Cour, elle
y paraît de plus en plus souvent au fil des mois et y affirme une discrète influence.
Au point que Catherine de Médicis finit par en prendre ombrage.
La reine mère considère que, bien que d'origine modeste,
et ne constituant donc pas à priori une menace pour la famille royale, "l'Orléanaise
ne doit plus avoir la première place dans les affaires du royaume"
: Charles doit prendre légitimement femme. Le 26 novembre 1570, le roi épouse
donc Elisabeth d'Autriche, fille de l'empereur Maximilien. Les noces, célébrées
à Mézières, sonnent pour un temps le glas de sa liaison avec Marie Touchet.
Mais c'est compter sans Cupidon... Les mois passent et Charles se languit.
Il a beau être marié (et bien marié, puisqu'il trouve sa jeune épouse fort à
son goût), il n'oublie pas pour autant sa maîtresse et, chaque fois qu'il le
peut, court la rejoindre à Orléans où elle s'est retirée. Partagé entre une
épouse respectable et une favorite respectée, la vie suit son cours, paisible.
Jusqu'à la Saint Barthélemy... Après les massacres auxquels il ne s'est pas
opposé, le roi restre prostré pendant des semaines. Ses nuits, dit-on, sont
"peuplées de cauchemars". Inquiète, Catherine
de Médicis décide de faire revenir Marie à la Cour, espérant que la jeune femme
pourra redonner le goût de vivre à son fils. Elle voit juste. En juin 1573,
au château du Fayet, dans le Dauphiné, la favorite accouche d'un "gros
braillard de fils", appelé Charles comme son père, lequel n'en aura
pas d'autre et le légitimera. Jusqu'à sa mort, en mai 1574, le roi éprouvera
un amour profond et sincère pour la douce et sage Marie Touchet. Après quelques
mois de deuil, celle-ci épousera le comte François de Balzac d'Entragues. Elle
lui donnera deux filles, mais n'oubliera jamais son tendre et royal amant.
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