LE CONNETABLE DE MONTMORENCY ET LE CHATEAU D'ECOUEN
Le connétable Anne de Montmorency, l'un
des hommes les plus puissants du royaume, entend faire de son château familial
d'Ecouen une demeure princière, digne de son pouvoir et de sa richesse. A partir
de 1555, il va confier les travaux de restauration à l'architecte Jean Bullant
et, pour la décoration, faire appel aux artistes les plus renommés et talentueux
de son temps.
Ami d'enfance du roi François 1er, le connétable
Anne de Montmorency est l'un des personnages les plus riches et les plus puissants
du royaume. Tombé en disgrâce en jullet 1541, il s'est vu contraint de quitter
la Cour et s'est installé sur son domaine d'Ecouen, situé au nord de Paris,
à l'est de la forêt de Montmorency. Collectionneur passionné et grand mécène,
il a décidé de mettre cette période d'inactivité forcée à profit pour faire
reconstruire et restaurer la forteresse médiévale de ses ancêtres avec un faste
et une richesse dignes de rivaliser avec la magnificence des demeures royales
de la vallée de la Loire. Situé sur une butte dominant la plaine de France de
quelque cent cinquante mètres, le vénérable château d'Ecouen appartient depuis l'an mille
à la famille des Bouchard de Montmorency, dont est issu le connétable. Restauré
à la fin du XIIème siècle, sous le règne de Philippe Auguste, il se présente
sous la forme d'un quadrilatère constitué de quatre ailes encadrant une grande
cour carrée.
A partir de 1538, un premier architecte,
Pierre Tâcheron, fait élever quatre pavillons d'angle à la place des anciennes
tours médiévales. En 1555, Anne de Montmorency s'adresse à Jean Bullant, un
jeune architecte promis à un brillant avenir, qui va donner à Ecouen un nouveau
caractère et en faire une des réalisations les plus exemplaires de la Renaissance
classique française. Bullant met tout de suite en oeuvre le goût du grandiose
qui sera sa marque au cours de sa future carrière. Il ajoute à la façade sud
un avant corps doté d'un portique monumental inspiré du Panthéon de Rome et
destiné à abriter les célèbres Esclaves sculptés par le grand maître
italien Michel Ange, qui appartiennent aux collections du connétable (ils sont
aujourd'hui conservés au musée du Louvre). Il réalise également deux autres
portiques : l'un pour l'aile nord, l'autre pour l'entrée du château, où trône
une statue équestre du propriétaire des lieux. Pour la décoration intérieure,
Montmorency fait appel aux artistes les plus renommés et les plus talentueux
de son temps. Le peintre Jean Clouet exécute des dessins, Jean Goujon des sculptures,
Léonard Limosin et Pierre Raymond de magnifiques émaux peints. Masséot Abaquesne,
potier d'origine italienne installé à Rouen, éclaire les sols avec des pavements
colorés, décorés de formes géométriques, de guirlandes de fruits, d'emblèmes
et de devises. Pour l'ornementation des jardins, le céramiste charentais Bernard
Palissy conçoit une étonnante grotte enrichie de nombreux moulages d'après nature.
Partout, le duc Anne fait apposer la marque
de son rang et de ses hautes fonctions à travers la représentation de ses armes
"d'or à la croix de gueules cantonnées de seize alérions d'azur",
accompagnées de son chiffre, "A.M." et de l'épée dressée, symbole
de la connétablie. Ces emblèmes apparaissent gravés dans la pierre, sculptés
sur les lambris et les poutres, peints sur les frises murales, les plafonds,
les sols et au-dessus des cheminées. On les retrouve jusque dans l'ornementation
des vitraux et des serrures de portes. Les cheminées révèlent des décors
spectaculaires, dont les sujets bibliques sont pour la plupart tirés de l'Ancien
Testament et traités comme des tableaux très colorés, encadrés d'arabesques,
d'angelots, surmontés de cartouches et de pièces de cuir découpé rappelant les
compositions créées par François 1er à Fontainebleau par les grands artistes
italiens Le Primatice et Le Rosso. Mais le connétable Anne de Montmorency
n'a guère le temps de profiter des fastes de sa demeure princière. Rentré en
faveur en 1547, après la mort de François 1er et l'avènement d'Henri II, il
suit la Cour dans ses nombreux déplacements, quand il n'est pas sur les champs
de bataille, à la tête des armées de Sa Majesté. Lorsqu'il trouvera la mort,
en novembre 1567, ayant succombé à ses blessures à la suite de la bataille de
Saint Denis, il n'aura effectué que quelques brefs séjours en son château d'Ecouen.
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