FRANCOIS 1ER, CHEF D'ETAT

 

L'AFFAIRE DES PLACARDS
(1534)

Le mouvement religieux initié par Luther contre l'Eglise de Rome est en train de changer la face de l'Europe. Les partisans de la Réforme font des adeptes en France. D'abord le jeune roi François 1er, favorable à une relative liberté d'expression, a créé le Collège de France pour lutter contre l'obscurantisme de la Sorbonne et sa docilité au pape. Ensuite les luthériens s'enhardissent et se font plus nombreux.

Au Quartier Latin les étudiants s'affrontent, on se moleste dans les collèges, si bien que le roi donne au Parlement l'ordre d'enquêter sur la "maudite" secte luthérienne et à ses juges de poursuivre les fauteurs de trouble. Le jeune théologien réformé Jean Calvin se réfugie à Nérac chez la propre soeur du roi, Marguerite de Navarre qui est en effet acquise aux idées nouvelles. Le roi de France est dans une situation inconfortable. Il a marié son fils Henri, le futur Henri II, à Catherine, la nièce du pape Médicis qu'il veut ménager. Mais il envoie le cardinal Du Bellay négocier avec les princes protestants allemands.
Du Bellay va rencontrer le confident de Luther qui répond clairement aux questions doctrinales posées par le roi de France qui rêve encore de réconcilier les deux grands courants de la chrétienté, tout en refusant le désordre dans son royaume. Or, dans la nuit du 17 au 18 octobre 1534, des affichettes (qu'on appelle des "placards") sont collées contre la porte même de la chambre du roi à Blois. Leur texte est d'une violence inouïe : "Articles véritables sur les horribles, grands et insupportables abus de la messe papale". L'auteur du pamphlet nie la présence réelle du corps du Christ dans l'hostie, ridiculise les rites de l'église, qualifie de diabolique le thèse de la transsubstantiation (le pain sacré n'est plus du pain, mais le corps du Christ) et invite Dieu à détruire les "idolâtres papistes". Le même texte est affiché à Paris, Amboise, Orléans.
Le scandale est énorme et le roi ulcéré. Ce texte n'est pas l'oeuvre d'un illuminé mais l'expression d'un complot parfaitement organisé qui implique des familiers du roi puisque le "sacrilège" a été affiché en pleine nuit sur sa propre porte. Le roi est bafoué chez lui.

Le rédacteur du texte est vite identifié. C'est un pasteur lyonnais, Antoine Marcourt, qui s'est réfugié en Suisse. La répression est instantanée, les intellectuels sont les plus violemment frappés. Des dizaines de bûchers sont allumés dans tout le royaume pour brûler les "hérétiques". Calvin s'échappe de justesse et gagne Strasbourg, terre d'Empire qui échappe aux bourreaux du roi. François 1er, dans sa rage, va même jusqu'à interdire l'imprimerie qu'il a tant contribué à développer. Quand il se calme, c'est pour soumettre tous les livres à la censure.
Le 21 janvier 1535, il participe à la plus grande procession jamais organisée à Paris. Tête nue, vêtu de noir, le cierge à la main, il chemine derrière ce saint sacrement dénoncé par les placards. Pour la circonstance, les prêtres ont sorti l'essentiel des reliques que Luther qualifie de superstitions : la couronne d'épines, une goutte de sang du Christ, une goutte de lait de la Vierge. Après la messe, six hérétiques sont brûlés devant le parvis de Notre Dame. Le roi déclare : "Je veux que ces erreurs soient chassées de mon royaume et ne veut excuser personne; si mes enfants en étaient entachés, je voudrais moi-même les immoler". Il ordonne que la procédure d'appel soit supprimée pour les réformés qui sont condamnés avant même d'être jugés. Il menace : "Que chacun fasse son devoir".
Jadis, le sang des martyrs était une "semence de chrétiens". Cette fois encore des cendres des martyrs protestants suppliciés renaîtra une véritable religion réformée à la française. L'affaire des placards marque la fin de la tolérance et de la renaissance heureuse. Le roi a fait son choix, il a beau être l'allié du Grand Turc, il ne sera pas celui de Luther. La France des Valois restera catholique et romaine.

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