SA MORT
Victime de la tuberculose, le duc François d'Anjou meurt
le 10 juin 1584 à Château Thierry. Avec le fils cadet d'Henri II et de Catherine
de Médicis disparaît l'héritier présomptif du trône de France et le seul héritier
direct d'Henri III, qui n'a toujours pas d'enfants.
Au mois de mars 1584, la santé de Monsieur, le duc François
d'Anjou, s'est dégradée à tel point que la reine-mère Catherine de Médicis,
qui s'apprêtait à lui acheter une maison à Saint Germain en laye, a remis son
projet à plus tard pour accourir à son chevet à Château Thierry. L'évolution
du mal a été foudroyante. Soumis à de terribles poussées de fièvre, le prince
est aussi victime de graves saignements de la bouche et du nez. Autant pour
se rassurer que pour savoir comment soulager le plus jeune de ses fils atteint
de tuberculose, Catherine de Médicis écrit à Marc Miron, médecin du roi, détaillant
par le menu l'état du malade.
La reine-mère ne ménage ni sa peine ni son temps : quand
elle ne s'occupe pas de son fils avec dévouement, elle prie pour son rétablissement.
Epuisée, elle profite d'une rémission de la maladie pour regagner la Cour. Mais,
le 26 avril, un courrier lui apprend que le duc a été "assailli
d'une effusion de sang (...) à laquelle il a eu beaucoup de peine à résister".
Le lendemain, une autre missive annonce que "Dieu
a commencé à lui rendre un peu de sa santé et a si bien continué que les médecins
le tiennent en meilleur état qu'il n'a été depuis le commencement de sa maladie".
Ne sachant plus à quel saint se vouer, la reine-mère est accablée par l'angoisse,
mais ne renonce pas à garder espoir. Début mai, elle est de retour à Château
Thierry. Le malade semble aller mieux et, surtout, il ne souffre plus. Un miracle
serait-il possible? Catherine de Médicis veut y croire. Mais à peine est-elle
repartie pour Saint Maur que lui parvient la mort du duc François d'Anjou. Monsieur
s'est éteint le 10 juin 1584; loin de sa mère, qu'il chérissait maladivement,
et de son frère, le roi Henri III, qu'il haïssait et jalousait tant. En ses
derniers instants, il a été assisté par le seul frère Berson. Dans son testament,
daté du 8 juin, il ne s'est recommandé ni à la Vierge ni aux Saints, mais à
sa foi dans la rédemption du Christ, ce que d'aucuns interprètent comme un signe
discret d'approbation de la Réforme protestante. Par ailleurs, il lègue au roi
de France la ville de Cambrai, qu'il a enlevée aux Espagnols près de trois ans
auparavant. Gêné par ce "don", qui risque de troubler ses relations
avec Philippe II d'Espagne, Henri III renonce à la succession et la transfère
à Catherine de Médicis sous forme d'héritage privé. Bien que peu affligé par
la mort de son frère, il veille à ce que les funérailles revêtent un caractère
grandiose, ce qui lui permet d'exprimer son goût démesuré pour le cérémonial
et pour le macabre. Puisque lui-même n'a pas d'enfant, c'est son cadet
qui était l'héritier présomptif de la Couronne, et il tient à ce que lui soient
rendus les honneurs dus à son rang.
Le corps de Monsieur est transporté à l'église Saint Magloire,
au coeur du faubourg Saint Jacques. Dans la nef tendue de draperies noires et
illuminée par une multitude de cierges, son effigie, parée du costume ducal,
repose sur un lit de parade. Le 24 juin, Henri III, la reine Louise de Lorraine
et Catherine de Médicis viennent se recueillir. Puis le roi, vêtu d'un long
manteau de velours, encadré par les archers de sa garde portant le deuil, s'avance
solennellement pour verser l'eau bénite sur le cercueil. C'est ensuite au tour
de l'assistance (princes, gentilshommes et dames de la Cour, officiers et dignitaires)
de rendre un dernier hommage au défunt. Le lendemain, en grande pompe, le
cortège funèbre se met lentement en marche vers Notre Dame de Paris. Il est
si imposant qu'il lui faut cinq heures pour arriver à la cathédrale. En tête
de la procession défilent les membres des corps constitués, les chevaliers de
l'ordre du Royal Saint Esprit, les évêques et les ambassadeurs, les conseillers
du Parlement, les échevins et nombre de grands seigneurs. Vient ensuite le catafalque,
encadré par deux cents pauvres tenant chacun un flambeau à la main et suivi
des vingt trois crieurs de la ville agitant leur clochette. Partout, les archers,
armés de bâtons noirs, contiennent la foule qui se presse avec curiosité. Enfin,
à la demande du roi, sur chaque maison bordant le trajet brûle une torche ardente. Le
27 juin 1584, Monsieur est inhumé dans la crypte de la rotonde des Valois dans
la basilique de Saint Denis. Un à un, ses officiers déposent à l'entrée du caveau
les armes, les éperons, les gantelets et le bâton de commandement symboles de
sa puissance. Avec la disparition prématurée du duc d'Anjou va s'ouvrir une
grave crise dynastique : Henri III n'ayant plus d'héritier direct, son successeur
le plus proche est le roi protestant de Navarre, qui régnera sous le nom d'Henri
IV.
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