HENRI II, LES ARTS ET LES SCIENCES

 

GERMAIN PILON

Esquisse pour le gisant du roi de Henri II (Saint-Germain-en-Laye, 1519 - Paris, 1559), de Germain Pilon, étude probablement exécutée pour le gisant en marbre du monument funéraire du roi commandé par Catherine de Médicis pour la rotonde des Valois érigée dans l'abbaye de Saint-Denis , collection du musée du Louvre à Paris

En 1559, Catherine de Médicis commande pour la basilique de Saint Denis un monumental tombeau, où elle  souhaite être inhumée au côté de son époux, qui vient de mourir. Lorsque le travail est enfin achevé, en 1570, elle est saisie d'émotion en découvrant l'oeuvre du sculpteur Germain Pilon : sur la pierre tombale, le roi gît pauvre et nu, la tête rejetée en arrière, dans une expression d'abandon total.

Après la disparition tragique d'Henri II, mortellement blessé lors d'un tournoi au cours de l'été 1559, Catherine de Médicis commande un monument destiné à abriter le coeur de son époux à l'église du couvent des Célestins à Paris, alors que, selon la coutume, le corps du défunt reposera à la nécropole royale de Saint Denis. La reine fait appel à Germain Pilon, sculpteur officiel de la Cour depuis 1558, qu'elle charge également d'exécuter les principales sculptures de son futur tombeau, à la basilique de Saint Denis, sous la direction de Francesco Primatice, le grand artiste italien venu en France à la demande de François 1er.
Né vers 1525 à Paris, Germain Pilon est le sculpteur le plus important du royaume. Il a appris son métier auprès de son père, André Pilon, et a développé un style tout à fait personnel. Son sens du volume et du contraste et son talent particulier pour les portraits pleins de vie lui valent d'être souvent sollicité pour réaliser des monuments funéraires ou des statues de dévotion, commandés par la famille royale mais aussi par une large clientèle de particuliers.

Désespérée par la perte de son époux, Catherine de Médicis veut lui témoigner son attachement en commandant un grand tombeau royal, qui doit prendre place dans une nouvelle chapelle accolée à l'abbaye de Saint Denis et connue sous le nom de "retonde des Valois". Il s'agit d'un important mausolée, où la reine souhaite être inhumée aux côtés de son époux et de ses fils.
La réalisation de ce gigantesque projet sera retardée par les guerres de Religion, qui embraseront le pays durant toute la seconde moitié du XVIème siècle. Le monument sera démoli au début du XVIIIème siècle, et il n'en reste aujourd'hui que le grand tombeau royal à deux étages.
Pilon est chargé par le Primatice de l'exécution de nombreuses sculptures. Il réalise ainsi les Vertus et les "orants" (personnages en prière) qui ornent la sépulture d'Henri II, ainsi qu'un Saint François en extase, un Christ ressuscité et une Vierge de douleur. Mais ce sont les célèbres gisants, ou "transis", en marbre du roi et de la reine qui révèlent l'excellence de son art. La tradition de représenter ainsi les souverains remonte au Moyen Age, et l'artiste étudie avec attention le travail de ses prédécesseurs, tels Jean Juste et Guido Mazzoni, à qui l'on doit les gisants de Louis XII et d'Anne de Bretagne. Toutefois il ne se contente pas d'observer et apporte à l'oeuvre sa touche personnelle. Evitant les détails macabres, comme les incisions d'embaumement de Louis XII, il rend avec un réalisme frappant le relâchement total de la mort.

Des deux gisants à demi-nus d'Henri II et de Catherine de Médicis, celui de la souveraine a certainement posé un délicat problème à l'artiste. Comment en effet transposer les traits d'une personne vivante, qui est de surcroît la reine et la commanditaire de l'oeuvre? Le sculpteur a surmonté la difficulté en concevant un gisant aux contours ronds et idéalisés, suffisamment émouvant pour plaire à son auguste modèle.
Toutes les oeuvres réalisées par Germain Pilon pour la chapelle funéraire des Valois révèlent une habileté extraordinaire, un art empreint de naturel et de sensibilité. Les qualités du sculpteur s'expriment jusque dans les détails des vêtements et des bijoux, dans la grande liberté de mouvement des personnages.
En 1570, une fois le travail terminé, Catherine de Médicis ressent une réelle émotion à la vue de son gisant et de celui de son époux qu'elle décide de passer de nombreuses autres commandes à celui qui deviendra son sculpteur préféré. Germain Pilon fait preuve d'un remarquable sens de la psychologie, à l'égard de ses modèles comme de ses commanditaires, ce qui lui vaut un regain d'enthousiasme de la part des riches particuliers. L'une de ses dernières oeuvres, parmi les plus célèbres, est le gisant de Valentine Balbiani, épouse du chancelier de France René de Birague, qui figure aujourd'hui dans les collections du musée du Louvre. Cette terrible représentation du corps décharné de la défunte laisse percevoir la richesse d'effets dramatiques que l'artiste a délibérément évités dans le gisant de la reine Catherine.

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