LE PRINCE NOIR, UN REDOUTABLE CHEVALIER
L'ambitieux, cruel, extravagant
prince de Galles, fils aîné d'Edouard III d'Angleterre, est l'un des
chevaliers les plus prestigieux de la guerre de Cent Ans. Couvert de gloire et
d'honneurs, le Prince Noir connaîtra sa seule défaite face à la mort, qui, le
8 juin 1376, le privera du trône d'Angleterre
Edouard, prince de Galles,
occupe une place particulière à la Cour d'Angleterre. Fils aîné du roi, il
en est l'héritier et, à ce titre, fait l'objet d'une attention toute
particulière. Né en 1330, des amours adolescentes d'Edouard III d'Angleterre
et de la reine Philippa de Hainaut, "the boy" comme aime l'appeler son
père, est un enfant choyé, protégé, appelé au plus grand destin. Il fête
à peine sa première année qu'il est déjà question de le marier avec l'une
des filles du roi de France, Philippe VI. Ironie du sort qui fera bientôt du
prince de Galles l'un des pires ennemis de la dynastie des Valois. En attendant,
l'enfant est promu duc de Cornouailles, titre spécialement créé à son
intention, et vit dans l'ombre bienveillante de son père qui n'hésite pas à
le nommer, lorsqu'il guerroie en France, "gardien" du royaume.
A l'âge de quinze ans, Edouard est un adolescent ambitieux, déjà virtuose au
maniement de l'épée et dont les rêves sont peuplé de chevaliers, de tournois
et d'exploits. Mais bientôt l'occasion de se frotter enfin au combat se
présente. Les Flamands se révoltent contre leur comte et leur meneur, Jacques
van Artevelde, qui décide, par pure félonie, d'offrir le comté au prince
Edouard, qui n'en demandait pas tant.
Le 12 juillet 1345, l'armée anglaise, commandée par le roi Edouard III,
débarque en Normandie. A peine le prince de Galles a-t-il touché terre qu'il
est fait chevalier et que son père lui confie une troupe. Mais comment faire
ses armes quand l'ennemi reste introuvable? Sans doute en affûtant ses talents
sur les malheureux Normands qui voient déferler l'Anglais sur leur "pays
gras et plantureux". Le jeune Edouard inaugure là ses razzias, laissant sa
"meute" piller et massacrer sans scrupule ni souci de l'éthique
chevaleresque. Ses basses oeuvres accomplies, l'armée anglaise rebrousse
chemin, oubliant les Flamands qui finissent par assassiner van Artevelde.
L'année suivante, le prince Edouard poursuit son apprentissage à Crécy, où
il commande un corps de troupe que son père a prudemment placé en retrait; ce
qui ne plaît guère au jeune chevalier qui meurt d'impatience d'en découdre et
porte fièrement l'armure noire qui lui vaudra le surnom de "Prince
Noir". A vingt cinq ans, comptant bien prouver à tous qu'il n'a point usurpé sa
devise ("Avec courage, je sers!"), il va prendre son destin en mains.
En octobre 1355,
sans raison apparente, autre que son appétit de gloire et de puissance, le
Prince Noir lance une audacieuse chevauchée en Languedoc. Avec 7 000 hommes, il
y sème la terreur et ne laisse sur son passage que ruines et désolations.
Toulouse, Carcassonne et Narbonne sont pillées, les bourgeois sont rançonnés,
le peuple impitoyablement massacré. Le Prince Noir ne se contente pas de ce
butin facile, il attend son heure de gloire. Elle arrive neuf mois plus tard, au
cours d'une nouvelle chevauchée. De Bergerac, le prince remonte vers le Berry
et la Touraine. Mais cette fois-ci, le roi de France, Jean le Bon, qui n'a pas
réagi l'année précédente, est bien décidé à arrêter l'Anglais. Les
adversaires vont s'affronter, le 19 septembre 1356, près de Poitiers. C'est un
échec cuisant pour les Français et le roi est fait prisonnier. Le Prince Noir
exulte. Il tient son triomphe, même s'il a dû verser 100 000 écus aux Gascons
qui lui ont livré Jean le Bon.
"Magnifique, fastueux, hautain et sévère",
le Prince Noir est alors au sommet de la gloire. Il y ajoute la puissance, en
juillet 1362, lorsque son père le fait duc d'Aquitaine. Son autorité s'étend
sur un territoire couvrant près d'un tiers du royaume de France. Pourtant, son
pouvoir est fragile et ses finances sont lourdement grevées par un fastueux
train de vie et d'exorbitantes dépenses de campagnes. Pour remplir les caisses,
il décide, en violation des franchises et privilèges locaux, d'assujettir
l'Aquitaine à l'impôt. C'est le signal de la révolte et nombreux sont les
Gascons qui font appel au roi de France. Charles V saisit l'occasion et
confisque le duché, en 1369. C'est la rupture et la reprise de la guerre. Mais
le Prince Noir n'est plus ce fier chevalier, parlant haut et fort. La maladie le
mine et il est le plus souvent alité en sa résidence d'Angoulême. En janvier
1371, affligé par la mort de son fils aîné, tué alors qu'il saccageait
Limoges, le prince de Galles regagne l'Angleterre, en litière. Les cinq années
qui lui restent à vivre ne seront qu'une longue et douloureuse agonie, qui
prendra fin le 8 juin 1376.
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