LES REFORMES FINANCIERES ET ECONOMIQUES DE CHARLES VII
En 1440, le royaume de France, en guerre
depuis plus d'un siècle contre l'Anglais, est exsangue, ruiné, dépeuplé. Charles
VII va tenter de le relever en menant une ambitieuse politique de réformes.
Celle-ci va débuter par un sévère assainissement des finances et conduire à
un spectaculaire renouveau économique.
Les impôts, directs ou indirects, rentrent
très mal dans les caisses de l'Etat. Leur levée donne toujours lieu à d'âpres
discussions avec les représentants des états généraux ou provinciaux. Le conflit
avec l'Angleterre et la menace permanente des Ecorcheurs, ces compagnies de
soldats de fortune, soudards en quête de butin, ont jusque-là fourni au roi
des arguments incontestables pour faire voter des subsides "pour
le fait de la guerre".
L'impôt, resté ponctuel par principe, ne
permet pas d'engager des réformes à long terme. Pourtant, dès 1436, et malgré
les protestations des états, Charles VII obtient le rétablissement des aides.
Cet impôt, originellement dû par le vassal à son suzerain, va peu à peu porter
sur l'essentiel des produits de consommation courante, comme la gabelle sur
le sel, et se pérenniser. Le roi se garde bien de souffler mot du nouveau principe
de régularité des aides, qu'il entend établir et justifier par la mise sur pied
et l'entretien de l'armée permanente qu'il a créée par l'ordonnance de 1439. L'impôt
direct suit le même chemin. La taille royale se substitue à la taille seigneuriale,
redevance due par le paysan au seigneur en échange de sa protection. En 1442,
Charles VII peut tranquillement affirmer qu'il "n'est
pas besoin d'assembler les trois états pour mettre sus les tailles, car ce n'est
que charge et dépense au pauvre peuple qui a payé les frais de ceux qui y viennent". Les
finances du royaume régulièrement alimentées, il faut encore en réformer l'administration,
pour le moins opaque, sinon frauduleuse. L'ordonnance de septembre 1443, qui
réorganise le budget, fait obligation aux grands officiers de l'Hôtel royal
de tenir des registres détaillés, soumis au contrôle de la chambre des Comptes.
L'assainissement se prolonge dans les provinces, où une véritable purge écarte
nombre de prévaricateurs, de receveurs et d'officiers des Finances (tels que
l'évêque Guillaume de Champeaux, général des Finances du Languedoc, dont les
biens sont saisis) qui ont profité de leur charge pour s'enrichir sur le dos
des contribuables.
Charles VII profite des trêves de Tours,
signées en 1444, pour engager toute une série de réformes destinées à relancer
l'activité économique et le commerce, mis à mal par de longues années de conflit.
A partir de 1445, les grandes foires de Champagne sont relancées. Dans tout
le royaume apparaissent de nouveaux rendez-vous commerciaux. Une ordonnance
interdit aux négociants d'exporter leurs marchandises à Genève avant de les
avoir présentées à Lyon, dont le roi veut favoriser l'essor de la foire, récemment
créée. Charles VII accorde ou confirme par ailleurs de nombreux privilèges
et exemptions fiscales aux villes qui s'emploient à reconstruire leurs infrastructures.
C'est le cas de Narbonne, à laquelle sont abandonnées les recettes d'un impôt
sur le sel afin qu'elle puisse financer la reconstruction des vingt sept ponts qui enjambent
l'Aude. Progressivement, l'activité renaît. Le Languedoc devient un grand
centre d'exportation drapière vers l'Espagne. Les régions entre Saône et Rhône
travaillent le lin et le chanvre. Dans tout le pays, le commerce des grains,
du vin, des cuirs et des peaux, du sel, des outils en fer et des vases en étain
est florissant. Grâce à Jacques Coeur, le commerce maritime est relancé. L'homme
d'affaires devenu ministre du roi crée une compagnie des "Galées de France"
qui, depuis Montpellier et Aigues Mortes, et sans intermédiaires italiens, ouvre
les voies du commerce méditerranéen vers l'Orient. Enfin, Charles VII souhaite
accélérer le repeuplement des campagnes. Partout, on fait l'inventaire des terres
et on dresse l'état des droits. Des ordonnances imposent que les propriétaires
spoliés de leurs domaines rentrent légitimement dans leur bien. Aux paysans
qu'ils veulent s'installer sur leurs fiefs, les seigneurs concèdent des baux très
avantageux incluant la réduction des redevances. De Bretagne on émigre vers
le Bordelais et le pays de Caux. Des Limousins et des Berrichons s'installent
dans l'Angoumois et la Picardie.
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