LA MORT DE L'EVEQUE PIERRE CAUCHON
Après le procès de Jeanne d'Arc, dont il
est le principal instigateur et acteur, Pierre Cauchon continue à servir avec
un zèle infatigable la cause des Anglo-Bourguignons. Dix après avoir été nommé
au siège épiscopal de Lisieux, il va trépasser soudainement le 18 décembre 1442.
Le dénouement du procès de Jeanne d'Arc
vaut à son principal artisan, l'évêque de Beauvais Pierre Cauchon, l'estime
de ses pairs. "Malgré l'habileté de
ces éprouvés qui se vantent d'avoir reçu révélation de Dieu (...), les prélats
de l'Eglise catholique savent écarter l'infection de ces faiseurs de mensonge
et, entre tous, révérend père en Christ monseigneur de Beauvais",
écrit l'Université au souverain pontife Eugène IV et à l'assemblée des cardinaux. La
condamnation de la Pucelle ne touche pas le peuple, en dehors des habitants
des pays de la Loire, qui ont été témoins de ses exploits guerriers. Ni le roi
Charles VII, ni la Cour, ni les Parisiens ne s'en émeuvent. Ce qui n'empêche
pas Cauchon de prendre ses précautions en se faisant remettre des lettres de
garantie certifiant que le procès a été conduit "saintement,
canoniquement et justement", et que le Gouvernement
anglais s'engage "à soutenir et défendre
les dits juges, docteurs (...), tous autres qui au procès se sont entremis de
quelque manière".
Mais, en juin 1431, l'évêque Cauchon ne
peut reprendre possession de son diocèse de Beauvais, dont il a été chassé au
cours de l'été 1429 et qui est resté très hostile aux Anglo-Bourguignons. Il
ne parvient pas non plus, en raison de l'opposition du clergé local, à se faire
attribuer l'archevêché de Rouen. Il n'est pourtant dépourvu ni de missions
ni de revenus : conseiller du jeune Henry VI d'Angleterre, il touche mille livres
tournois par an. Commissaire du roi, il est chargé de dénouer une querelle entre
les chanoines et le bailli de Rouen. Puis en décembre, il se joint au cortège
royal qui se rend à Paris et, le 16 du même mois, assiste aux cérémonies qui
font Henry VI "roi de France". En 1432, Xénon de Castiglione, titulaire
du siège épiscopal de Lisieux, est nommé à Bayeux. Pierre Cauchon lui succède
et, en vertu de ses nouvelles fonctions, se voit attribuer le manoir de l'hôtel
Saint Cande, où l'hôtel de Lisieux, résidence des évêques de Lisieux à Rouen.
Le prélat partage désormais son temps entre sa demeure rouennaise et son diocèse.
Juriste hors pair, il est consulté à propos de litiges complexes et poursuit
ses ambassades au nom du roi d'Angleterre. En 1433, l'infatigable évêque
se trouve à Calais, où se négocie la libération du duc Charles d'Orléans, cousin
du roi Charles VII, prisonnier en Angleterre depuis de longues années. En 1435,
il assiste au concile de Bâle puis, au cours de l'été, au congrès de paix d'Arras.
L'année suivante, il se rend à Honfleur et à Gravelines. Alors que s'annonce
la fin de la domination anglaise sur le continent, il participe à tous les pourparlers
qui tentent de mettre un terme à la guerre de Cent Ans.
Le 18 décembre 1442 au matin, à l'hôtel
de Lisieux où séjourne l'évêque voyageur, la lueur des flambeaux ne s'éteint
pas et une agitation inhabituelle règne. La nouvelle ne tarde pas à se répandre
en ville : Pierre Cauchon est mort. Alors qu'il venait de se lever et qu'un
de ses serviteurs lui faisait la barbe, il s'est brusquement effondré. L'éminent
prélat s'est éteint à l'âge de soixante et onze ans, sans avoir assisté à l'effondrement des
ambitions anglaises sur le royaume de France. Lors de funérailles en grande
pompe, on lui réserve tous les honneurs dus à son rang. Sa dépouille est exposée
dans l'une des grandes salles de l'hôtel de Lisieux; son catafalque est entouré
de cierges qui brûlent jour et nuit; des dizaines de messes sont dites pour
le repos de son âme. Chanoines et chapelains de la cathédrale de Roeun célèbrent
l'office funèbre en l'église Saint Cande le Vieil. Puis les ecclésiastiques,
les notables et le bon peuple forment un cortège impressionnant et accompagnent
l'évêque jusqu'au bac. Là, le cercueil est déposé sur la barque du passeur,
tendue de drap noir, sur laquelle il traverse la Seine. Des portes de Lisieux,
les dignitaires de sa cité épiscopale conduisent le défunt à la cathédrale Saint
Pierre, où est célébré un second office funèbre. Le dernier voyage de Pierre
Cauchon se termine à la chapelle de la Vierge, où est inhumé ce théologien et
juriste éminent qui a employé son talent et sa conviction à servir la cause
à laquelle il est resté fidèle sa vie durant, celle des Anglo-Bourguignons.
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