JACQUES COEUR, GRAND
ARGENTIER DU ROYAUME
Arriviste, ambitieux, homme
d'affaires redoutable, Jacques Coeur a su s'imposer à la cour du roi Charles VII, en
devenant l'indispensable argentier du royaume. Mais ce bourgeois parvenu, qui mène grand
train, se brûlera les ailes, grisé par sa réussite et persuadé que le pouvoir de
l'argent, souvent manipulé de façon illicite, le met au-dessus des lois.
Pour avoir confondu les finances du
royaume et les siennes propres, Jacques Coeur, comme Nicolas Fouquet deux siècles
plus tard, se heurtera à son roi, jaloux de sa fulgurante ascension et de son immense
fortune.
Né à Bourges en 1395, Jacques Coeur, fils d'un pelletier de la ville voit le destin
frapper à sa porte lorsqu'en 1418, le futur Charles VII décide de s'installer avec sa
cour dans la capitale du Berry. Deux ans plus tard, il fait un beau mariage en épousant
Marcée de Léodepart, petite-fille du maître des monnaies de la ville. Introduit ainsi
dans les milieux financiers et à la cour, son zèle et sa grande intelligence en font
vite un interlocuteur de premier plan. En 1429, nommé fermier des monnaies, il profite de
ce poste pour émettre 300 marcs d'argent au-dessous du titre et garder la différence.
Condamné pour malversation, le roi qui a deviné tout l'intérêt qu'il pourrait tirer de
ce génie des affaires, le gracie et lui offre sa confiance. Jacques Coeur organise
alors, sur une grande échelle, le commerce avec le Levant où il se rend lui-même en
1433. En 1435, il est nommé maître de la Monnaie de Bourges et en 1439 , grand argentier
du roi. Il devient ainsi le principal pourvoyeur de fonds dont Charles VII a besoin pour
mener ses guerres.
Annobli en 1441, il est chargé par le roi, qui en a fait son commissaire royal, de
collecter les gabelles dans le Languedoc et d'installer le parlement de Toulouse. Il
utilise ses facultés dans des entreprises commerciales et industrielles, donne une vive
impulsion à l'exploitation des mines du Beaujolais et du Lyonnais. Autant de secteurs
dont il retire d'énormes bénéfices. Il acquiert vite une fortune colossale, déploie un
luxe royal, fait construire des maisons dans la plupart des grandes villes du royaume. Le
roi le traite comme un prince et le comble de ses faveurs tout en fermant les yeux sur ses
abus. Car Charles VII sait que son protégé, introduit dans son Conseil Royal, est un
homme dévoué aux intérêts de la patrie. N'a-t-il pas mis à la disposition de la
couronne tous ses trésors pour hâter la conquête de la Normandie sur les Anglais?
Jacques Coeur fait montre d'un faste inouï. Ses fêtes sont réputées et la belle
Agnès Sorel, maîtresse du roi, se fait fournir par lui des étoffes délicates et des
draps fins. Il devient même son exécuteur testamentaire.
Mais le pouvoir sans limites de ce
bourgeois fait des envieux. Les Grands du royaume et même le roi lui doivent des sommes
astronomiques que Jacques Coeur consigne scrupuleusement dans ses registres. La
noblesse cherche à le perdre en l'accusant de racheter pour rien des terres à ceux que
la guerre a ruinés, les moines l'accusent de vendre des armes à l'Egypte et les
bourgeois eux-mêmes estiment qu'il a "empoigné toute la marchandise de ce royaume". Sans oublier les rumeurs qui en font l'amant d'Agnès Sorel. Le roi, comme il l'a
fait avec Jeanne d'Arc, prouve une fois de plus son ingratitude en le faisant arrêter en
juillet 1451 pour avoir empoisonné Agnès Sorel, morte l'année précédente. Mais s'il
est lavé de cette dernière accusation, Jacques Coeur est poursuivi pour
détournements de biens et de malversations. Torturé (il n'avouera rien) et emprisonné
au château de Poitiers, il est condamné à verser la somme astronomique de 400 000
écus. Charles VII, le versatile, en profite pour s'emparer de ses biens et va même
jusqu'à prendre ses lits à belles étoffes pour les distribuer à ses maîtresses ! En
1454, l'ancien Argentier s'évade et trouve refuge auprès du pape Nicolas V qui le prend
sous sa protection. Calixte III qui monte sur le trône pontifical quelques mois plus tard
lui confie une flotte pour combattre les Turcs. Il meurt lors de cette expédition dans
l'île de Chio, en 1456.
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