CHARLES VI LE FOL, LES PERSONNALITES
Isabeau
de Bavière
LES SOMPTUEUSES FETES DE LA REINE ISABEAU
Charles VI marque 1389, la première année de son règne personnel, par de grandes et fastueuses cérémonies. Après les fêtes de mai à Saint Denis, durant lesquelles le roi a célébré la chevalerie, c'est, en août, l'entrée à Paris de la reine Isabeau de Bavière, puis son couronnement et son sacre. Une semaine de réjouissances inoubliables
Charles VI vient d'avoir vingt ans et
de prendre le pouvoir. Le 3 novembre 1388, il a remercié ses "chers
oncles", qui ont gouverné la France depuis la mort de son père,
Charles V, huit ans auparavant. L'équipe à laquelle il a confié les affaires
du royaume a immédiatement entrepris d'immenses réformes. Le roi, lui, va
faire la fête. On aurait cependant tort d'interpréter les fastueuses
festivités qui inaugurent son règne personnel comme une marque de futilité.
Charles VI a un objectif politique. Il veut conquérir les coeurs. Sa jeunesse
et sa beauté sont des atouts pour obtenir l'obéissance de ses sujets non par
la force, mais par la grâce. Ses sévères conseillers sont parfaitement
d'accord avec lui (la monarchie repose sur un consensus) et ils soutiennent
toutes ses opérations de "relations publiques". Celle qu'il
réserve aux Parisiens sera grandiose. Le couronnement de son épouse Isabeau de
Bavière en fournira l'occasion.
La "joyeuse entrée" de la reine dans la capitale est prévue
pour le 22 août, un dimanche. Le cortège se forme à Saint Denis. Isabeau
porte l'habit royal, une robe de velours bleu brodée de lys d'or qui a été
achetée à la duchesse Blanche d'Orléans, fille du dernier roi capétien,
Charles IV le Bel. Elle est assise dans une litière couverte, entourée par les
princes des fleurs de lys (les ducs de Touraine, de Bourbon, de Bourgogne et de
Berry) et par Guillaume de Bavière, un Wittelsbach comme elle. Derrière la
reine vient, à cheval, la nouvelle duchesse de Touraine, Valentine Visconti.
Les Parisiens ne connaissent pas encore la belle Milanaise qui vient juste
d'épouser Louis, le frère du roi. Italienne par son père, elle est aussi
française par sa mère, Isabelle, fille de Jean II le Bon et tante de Charles
VI. Cette entrée solennelle est aussi un peu la sienne. Suivent les autres
dames, dans des chars peints ou sur des palefrois.
Le cortège s'ébranle à midi et suit un chemin tracé par le protocole. Au carrefour de La Chapelle, les seigneurs de l'Empire le rejoignent. Puis c'est une haie d'honneur formée par les représentants de la ville, vêtus de vert, et les gens du roi, habillés de rose. La procession entre dans Paris par la porte Saint Denis. Des étoffes de soie, des tapisseries, des draps d'or ont été tendus sur les façades des maisons. Des estrades ont été dressées, où l'on va jouer des mystères. Le cortège s'arrête de place en place pour assister à ces représentations théâtrales. La foule se presse pour admirer les décors, les artistes et les astucieuses machineries. Il fait presque nuit quand un funambule portant deux cierges allumés apparaît sur une corde tendue entre une des tours de Notre Dame et une haute maison du pont Saint Michel. L'évêque de Paris et le clergé attendent Isabeau de Bavière sur le parvis de la cathédrale. Devant le maître autel, le prélat, aidé des quatre princes de fleurs de lys, place la couronne sur la tête de la reine. Puis, à la lueur des torches, le cortège gangne le palais où attend le roi. Un banquet et un bal clôturent cette longue journée.
Le lendemain, c'est le sacre à la Sainte Chapelle. Après la messe, on retourne au palais où sont donnés un banquet et un spectacle. A cinq heures, le couple royal regagne l'hôtel Saint Pol. Il y aura encore un souper et un bal. Isabeau ne s'y montre pas, épuisée sans doute par ces cérémonies et par la chaleur de ce mois d'août. Il est vrai qu'elle est enceinte et qu'elle accouchera moins de trois mois plus tard. Le mardi, les fêtes continuent. Les bourgeois de Paris viennent offrir des cadeaux au roi, à la reine et à Valentine Visconti. L'après-midi débutent les joutes, qui vont durer jusqu'au vendredi. Charles VI y prend part avec fougue. Il reçoit le prix, décerné par les dames et les hérauts, du "mieux joutant de tous". Les fêtes s'achèvent le vendredi soir par un dernier souper offert aux dames et aux damoiselles. Des chevaliers combattent sous les yeux des convives, qui comptent les points. Ces fêtes sont un succès. Les Parisiens ont, sans réserve, donné leur consentement à leur roi de vingt ans.
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