CHARLES VII LE VICTORIEUX, LES
PERSONNALITES
Jeanne d'Arc
LE "PROCES" DE POITIERS
A Chinon, le dauphin Charles, le futur Charles VII, vient de rencontrer Jeanne d'Arc, qui affirme être envoyée à son secours par le Seigneur Dieu. La jeune bergère de Domrémy semble honnête et sincère, mais, pour éviter toute supercherie, le souverain souhaite qu'elle soit entendue par un aéropage d'ecclésiastiques, réuni à Poitiers le 14 mars 1429. Au cours de ce premier "procès", la Pucelle convaincra ses "juges" de la laisser passer à l'action.
Poussée par ses "voix", Jeanne
d'Arc a quitté son village de Domrémy avec pour "mission" de bouter
les Anglais hors de France et de faire sacrer le dauphin Charles, le futur Charles
VII. A Chinon, le 8 mars 1429 (ou, selon certaines sources, le 25 février),
elle a rencontré le souverain et semble l'avoir convaincu de sa loyauté.
Elle
a été interrogée par des gens d'Eglise, mais par précaution et pour éviter toute
supercherie, "le roi, une fois entendu
le rapport de ceux qui avaient été délégués à l'examiner, voulut qu'à nouveau
Jeanne aille à la ville de Poitiers, et y soit encore une fois examinée",
rapporte le duc Jean d'Alençon, qui va devenir un fidèle compagnon d'armes de
la Pucelle.
A Poitiers, Jeanne est logée chez Jean
Rabateau, avocat au parlement de Paris, qui a rejoint les rangs du dauphin deux
ans plus tôt. Elle est prête à se soumettre de bon coeur au tribunal d'experts
réunissant des prélats de haut rang et des théologiens qui ont fui la capitale
depuis qu'elle est passée sous l'influence des Anglo-Bourguignons, tels maître
Regnault de Chartres, l'archevêque de Reims, qui préside le Conseil du roi,
Pierre Seguin, spécialiste des Saintes Ecritures, frère Seguin, doyen de la
faculté de théologie de l'université de Poitiers, maître Jean Lombard, professeur
de théologie sacrée à l'université de Paris, et maître Guillaume Aymeri, frère
prêcheur et professeur de théologie sacrée. Dès le 14 mars 1429, l'enquête est
menée fort sérieusement par les ecclésiastiques qui, au cours des trois semaines
suivantes, vont multiplier les interrogatoires.
Jeanne répond en toute liberté,
avec une netteté, une simplicité, un humour qui enchantent ses interlocuteurs.
Pourquoi est-elle venue à Chinon?, demande maître Jean Lombard. Sans hésiter,
elle répond que "quand elle gardait
les animaux une voix s'était manifestée à elle qui lui dit que Dieu avait grande
pitié du peuple de France et qu'il fallait que Jeanne vînt en France. Entendant
cela Jeanne s'était mise à pleurer; alors la voix lui dit qu'elle allât à Vaucouleurs,
elle trouverait là un capitaine qui la conduirait avec sûreté en France et près
du roi, qu'elle ne craignît point. Elle avait fait ainsi, elle était venue vers
le roi, sans aucun empêchement", rapporte frère Seguin,
très impressionné par la grande piété de cette "simple bergerette".
"Tu as dit que la voix
te dit que Dieu veut libérer le peuple de France de la calamité dans laquelle
il est. S'il veut le délivrer, il n'est pas nécessaire d'avoir des gens d'armes",
remarque maître Guillaume Aymeri. "En
nom Dieu, les gens d'armes batailleront et Dieu donnera victoire",
affirme Jeanne. "De cette réponse,
maître Guillaume fut content", souligne frère Seguin.
Celui-ci insiste en demandant en quelle langue parlent les voix. La Pucelle
le moque gentiment en répliquant qu'elles s'adressent à elle en une langue meilleure
que le parler limousin dont il use! Croit-elle en Dieu? renchérit frère Seguin. "Oui, mieux que lui-même", lui assène la jeune fille. L'ecclésiastique n'est pas
encore convaincu : "Dieu ne voulait
pas qu'on crût en elle, à moins que quelque chose n'apparût, grâce à quoi il
semblerait qu'on pouvait croire en elle". Mais Jeanne
précise qu'elle ne fait pas de miracles, ce qu'elle veut, c'est prendre les
armes : "En nom Dieu, je ne suis pas
venue à Poitiers pour faire signe; mais conduisez moi à Orléans; je vous montrerai
que je suis envoyée". Elle ajoute que les Anglais
seront défaits et le siège devant Orléans levé, que la ville sera libérée, le
roi consacré à reims et Paris remise en son obédience. "Tout
cela, je l'ai vu s'accomplir", relatera plus tard
frère Seguin.
Jeanne ne convainc pas seulement les doctes experts, elle les
séduit. Emerveillés par ses réponses, données dans un langage plein de naturel
et de saveur, les prélats concluent : "En
elle [...] on ne trouve pas de mal, mais seulement du bien, humilité, virginité,
dévotion, honnêteté, simplicité". Ils rendent compte
au dauphin Charles de leurs conclusions et s'affirment d'avis que, "attendu
la très grande nécessité et le péril" où se trouve
la ville d'Orléans, "le roi peut s'aider
d'elle et l'envoyer à Orléans". Jeanne d'Arc peut
enfin passer à l'action.
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