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LE LICENCIEMENT DE LA GARDE NATIONALE
Le 29 avril 1827, en passant en revue la
Garde Nationale, Charles X va offrir à la milice bourgeoise de la capitale l'occasion
de manifester son mécontentement à l'égard su ministère, très impopulaire, du
comte Jean Baptiste de Villèle. Face à ces protestations, qui émanent pourtant
d'une minorité, le roi réagira brutalement, en ordonnant le licenciement immédiat
de la Garde.
Le maréchal Nicolas Charles Oudinot, commandant
de la Garde Nationale, a proposé à Charles X de passer en revue la milice de
la capitale, ce que le roi n'a encore jamais fait depuis son accession au trône,
en septembre 1824. Les ministres, qui n'ont pas été consultés, s'effraient :
une telle initiative pourrait se retourner contre eux. Mais il est impossible
de reculer, car la presse a déjà annoncé la revue pour le 29 avril. Par ailleurs,
les journaux de l'opposition ont appelé au calme et les craintes du Gouvernement
ne sont peut être pas fondées.
Vingt mille gardes nationaux ont pris possession
du Champ de Mars, où se presse une foule de spectateurs. Solennel, le roi les
passe en revue. Au milieu des "Vive
le roi!" et des acclamations, on distingue des "Vive
la Charte!", "Vive
la liberté de la presse!", mais aussi "A
bas les ministres!", "A
bas les Jésuites!" Ces cris hostiles ont beau être
le fait d'une minorité, Sa Majesté en est fort mécontente. "Je
suis venu ici pour recevoir des hommages et non des leçons",
assène-t-elle à un homme sorti du rang pour mieux se faire entendre. Cependant,
à la fin de la revue, Charles X se retire soulagé : devant les inquiétudes de
ses ministres, et notamment celles du comte Jean Baptiste de Villèle, le président
du Conseil, il s'attendait à pire! Mais l'incident n'est pas clos. Alors que
leur calèche stationne près de l'Ecole Militaire, les belles filles du roi,
la duchesse d'Angoulême et la duchesse de Berry sont conspuées : "A
bas les jésuitesses!", "Vieille
guenon!" Un peu plus tard, lorsque la troisième légion
de la Garde Nationale, sur le chemin de retour vers son casernement, passe sous
les fenêtres du ministère des Finances, où se trouve Villèle, la musique cesse
soudainement. Brandissant leurs armes, les gardes crient comme un seul homme
: "A bas Villèle!",
"A bas les ministres!"
Le soir même, le président du Conseil est convoqué par le roi. "C'était
pour me consoler et me garantir de toutes résolutions contraires au désir qu'il
avait de me garder à son service que le roi m'avait fait appeler",
rapporte-t-il dans ses Mémoires.
Charles X revient sur les événements de
la journée, sur les cris de colère lancés lors de la revue, sur les insultes
dont les princesses se sont plaintes. Le président du Conseil raconte : "Eh
bien, me dit-il, que me conseilleriez vous de faire? Sire, lui dis-je, dissoudre
ce soir même, avant la fermeture des bureaux du Moniteur, la Garde Nationale
de Paris; donner l'ordre au maréchal de service près de votre personne de relever
à quatre heures du matin, demain, tous les postes occupés par la Garde Nationale
en les remplaçant par des troupes de ligne; et s'en rapporter à cette mesure
de force et de justice pour prévenir les suites de la tentative la plus ambitieuse
de révolution depuis le commencement du règne de Votre Majesté".
Le ministre grossit l'importance des faits : seuls quelque 5% des gardes ont
manifesté leur hostilité au Gouvernement. Certes, les insolences envers les
princesses ne peuvent rester impunies, mais frapper le corps tout entier pour
quelques coupables est un châtiment disproportionné. C'est également une erreur
politique, car les sympathies libérales de la milice parisienne sont avérées.
Cependant, dans la nuit, le sort de la Garde Nationale est scellé. Certains
ministres protestent contre la brutalité maladroite de la mesure. Pour ne pas
y être associé, le duc de Doudeauville, ministre de la Maison du Roi, démissionne.
Le licenciement de la Garde Nationale touche d'abord au plan matériel tous ceux
qui venaient d'acquérir un équipement neuf à l'occasion de la revue. Mais surtout,
en signifiant à la bourgeoisie parisienne qu'elle est tenue pour ennemie du
régime, il va contribuer à accroître l'impopularité de Villèle et à creuser
encore le fossé entre le Gouvernement et la classe moyenne. Devant les devantures
des boutiques parisiennes, des uniformes de la Garde Nationale sont exposés,
assortis de la mention "Habit à vendre, fusil à garder". Des
fusils qu'on ressortira lors des journées révolutionnaires de juillet 1830.
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Charles X, chef d'Etat
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