LES NOCES DU COMTE D'ARTOIS ET DE MARIE THERESE DE SAVOIE

En ce 16 novembre 1773, Louis XV marie son troisième petit-fils. Charles Philippe, comte d'Artois, va convoler avec la princesse Marie Thérèse de Savoie. Aussi joli coeur et avide des plaisirs de la Cour que son épouse est timide et effacée, le futur Charles X montre sa déconvenue avant même la fin des noces.

Contrairement à d'autres mariages princiers, celui du comte d'Artois n'a pas été négocié longtemps à l'avance. Le jeune Charles Philippe, âgé de seize ans, a tout d'abord été promis à Louise Adélaïde, la charmante fille du prince de Condé. Mais ce dernier a mécontenté Louis XV en se mêlant d'un problème opposant des magistrats et le roi. Bien qu'il ait fait amende honorable, le souverain a décidé de trouver un autre parti au cadet de ses petits-fils. Lequel en est fort marri. Mais les désirs du roi sont des ordres. Comme son frère Provence avec Marie Joséphine, le comte d'Artois convolera avec une princesse de la puissante Maison de Savoie, Marie Thérèse.

Le 16 octobre 1773, à Turin, la demande officielle en mariage est promptement faite et aussi promptement acceptée. Huit jours plus tard, le mariage par procuration est célébré. Le 4 novembre, la nouvelle comtesse d'Artois, âgée de dix sept ans, arrive en France. De village pavoisé en cité en liesse, Marie Thérèse de Savoie entame le périple rituel qui lui permet de découvrir son nouveau pays. Le 14 novembre, conformément au cérémonial nuptial de la Cour de Versailles, le carrosse de la princesse fait étape en forêt de Fontainebleau, dans la clairière où il est d'usage que les jeunes mariés de la famille royale se rencontrent pour la première fois. En présence du roi, du dauphin Louis et de Marie Antoinette, du comte et de la comtesse de Provence, Marie Thérèse fait solennellement sa révérence. Sans faux pas, Louis XV la relève et l'embrasse affectueusement, avant de la confier à Charles Philippe, désormais son époux.
Le 16 novembre, l'union de Charles Philippe d'Artois et de Marie Thérèse de Savoie est célébrée avec faste au château de Versailles. Le banquet de noces se déroule dans le nouvel Opéra, inauguré trois ans plus tôt, à l'occasion du mariage du dauphin Louis et de Marie Antoinette. C'est la favorite de Louis XV, la comtesse du Barry, qui s'est occupée de former la Maison du jeune couple, de pourvoir la corbeille de noces, de veiller à l'organisation et au bon déroulement des festivités. Pendant le repas, le protocole, qui ne prévoit de sièges que pour les membres de la famille royale, lui impose de se tenir debout. Dans sa spectaculaire robe de satin blanc aux reflets argentés, fièrement campée en face du roi, affrontant avec hauteur les regards de l'assemblée, elle parvient cependant à éclipser toutes les dames présentes. Et ce n'est certes pas Marie Thérèse (elle fait montre d'emblée d'un effacement total aggravé d'un mutisme obstiné) qui pourrait rivaliser avec sa beauté et sa gaieté.

Le mémorialiste Louis de Bachaumont n'est guère sensible à ces joutes féminines. Il est davantage frappé par le mécanisme admirable du surtout de table, oeuvre du machiniste Arnault. "Le milieu était une rivière qui a coulé pendant tout le repas avec une abondance intarissable; son cours était orné de petits bateaux et autres décorations des mouvements d'une rivière, et les bords représentaient tout ce qui peut les rendre agréables".
Après le festin, les invités assistent à la représentation d'Ermelinde et au défilé de quatre cents grenadiers à cheval sur la scène de l'Opéra. Puis, les mariés ouvrent le bal traditionnel. Chacun ne peut alors que constater une triste évidence. La comtesse d'Artois danse sans plaisir et sans aucune grâce. Charles Philippe, beau garçon et grand amateur de jolies femmes ne peut s'empêcher de montrer quelque impatience devant cette épouse qui se meut sans aucune élégance, n'a aucun talent pour la conversation et ne peut même pas faire office de bel ornement. Lui qui était si enthousiaste à la perspective de convoler avec la pétillante princesse de Condé remâche son désappointement. De son côté, Marie Antoinette a beau faire de son mieux pour tenter d'égayer sa nouvelle belle-soeur, elle se heurte à la plus entière réserve. Après les festivités, le futur Charles X quitte Versailles pour aller se consoler à Paris auprès de sa maîtresse, la blonde Rosalie Duthé. Les courtisans, incorrigibles mauvaises langues, en font aussitôt un bon mot : "Le prince ayant eu une indigestion de gâteau de Savoie vient prendre Duthé à Paris".

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