FRANCOIS 1ER, LES ARTS ET LES SCIENCES
LE SEJOUR DE BENVENUTO CELLINI EN FRANCE
En 1540, après de multiples mésaventures dans son pays natal, où il est recherché comme voleur et criminel, l'artiste florentin Benvenuto Cellini ne doit son salut qu'à l'invitation de François 1er. Au cours des quelque cinq années de son séjour en France, il exercera ses talents d'orfèvre et de sculpteur, mais ne saura modérer les élans de son tempérament fantasque.
Accusé d'avoir dérobé plus de quatre
vingt mille ducats de joyaux au pape Clément VII lors du sac de Rome
en 1527, Benvenuto Cellini a été emprisonné à la
forteresse Saint Ange, d'où il s'est évadé, avant d'être
rattrapé, blessé et condamné à mort. Il ne doit
la vie sauve qu'à l'amitié d'Hypollite d'Este, cardinal de Ferrare
et fils de Lucrèce Borgia, qui, agissant au nom de François 1er,
lui transmet une invitation à venir en France. Car Cellini, malgré
sa réputation non usurpée d'aventurier, est avant tout un grand
artiste. Né en 1500 et issu d'une famille florentine d'architectes et
de musiciens, il s'est spécialisé dans l'orfèvrerie, contre
l'avis de son père, et s'est établi à son compte. Condamné
pour coups et blessures, il a dû quitter sa ville natale pour Rome, où
il s'est rendu coupable de multiples délits.
A son arrivée
en France, en 1540, l'artiste italien est royalement traité : François
1er le dote d'une confortable pension et l'installe avec ses deux compagnons,
Ascanio De Mari et Paolo Romano, dans l'hôtel du Petit Nesle, sur la rive
gauche de la Seine, face au Louvre.
La première commande du souverain consiste en de monumentales statues en argent représentant les dieux et les déesses, candélabres destinés à éclairer sa table à Fontainebleau. Seul un Jupiter, "aussi grand que le roi", sera achevé, et malheureusement fondu pour des raisons financières, quelque vingt ans plus tard, lors des guerres de Religion. Cellini commence également à travailler à une fontaine ornée d'une statue colossale, à deux bustes de bronze et à plusieurs vases d'argent, aujourd'hui disparus. Lorsque François 1er lui demande une "belle salière", il se souvient de celle qu'il a réalisée à Rome pour Hyppolite d'Este qui lui avait commandé "une salière qui sortit de l'ordinaire". Il avait exécuté un modèle de cire représentant l'union de la Terre et de l'Océan, où une nef susceptible de recevoir une grande quantité de sel était placée dans la main de la figure masculine de l'Océan. Il soumet ce projet au roi, qui, enthousiasmé, l'invite à se metre immédiatement à l'ouvrage; mais en soulignant qu'il désire que l'objet soit en or massif! Le souverain ordonne à son trésorier de compter à l'orfèvre mille écus d'un bon poids pour lui permetre de commencer son travail. Benvenuto Cellini consacre plusieurs heures par jour à ce qui va devenir son chef-d'oeuvre : sur un socle d'ébène se font face deux statuettes, de Neptune et d'Amphitrite, surmontant tout un peuple grouillant de monstres et de créatures marines et terrestres, parmi lesquelles on reconnaît l'éléphant fleurdelisé inspiré par le profil de Françis 1er. Lorsque l'ouvrage lui est remis, le roi est enchanté et ne peut se rassasier de le contempler. Son petit-fils, Charles IX, fera don à l'archiduc Ferdinand, en 1570, de cette salière hors du commun, que l'on peut aujourd'hui admirer au Kunsthistorisches Museum de Vienne.
En 1542, Cellini se lance dans la sculpture mnumentale
avec la commande d'une porte en bronze de plus de six mètres destinée
à la Porte Dorée du château de Fontainebleau. Il dessine
un bas-relief semi-circulaire sculpté d'une nymphe entourée par
les animaux de la forêt et reposant sur deux satyres. Il n'aura le temps
de réaliser que la nymphe, qui sera source d'inspiration pour tous les
sculpteurs français de l'époque, tant la pose allongée
et étirée au-delà du réel est réussie. En
1555, ce magnifique bronze sera donné par Henri II à sa maîtresse
Diane de Poitiers et intégré au portail d'entrée du château
d'Anet, où (ayant intégré les collections du musée
du Louvre), il est désormais remplacé par un moulage.
Mais
au cours des quelques années de son séjour en France, l'artiste
a fini par se rendre odieux par mille intrigues et de continuelles récriminations
: même le roi s'est lassé de ses frasques. En 1545, son talent
est concurrencé par celui du Primatice, son compatriote et rival. Par
ailleurs, soupçonné d'avoir détourné de l'argent,
il quitte Paris pour Florence, où il entre au service de Cosme 1er de
Médicis. Cest là qu'il meurt, à l'âge de soixante
et onze ans, couvert d'honneurs et après une vie mouvementée,
qu'il s'est complu à décrire (sans épargner personne, sauf
François 1er) dans une piquante autobiographie.
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