LIEUTENANT GENERAL DU ROYAUME (Eté 1544)
Au cours de l'été 1544, l'avance du roi
Henry VIII d'Angleterre en Picardie et celle de son allié l'Empereur Charles
Quint en Champagne font peser une lourde menace sur Paris, dangereusement proche
du front. Malade, François 1er se résout à nommer le dauphin, le futur Henri
II, lieutenant général et à le charger de défendre la capitale.
L'alliance conclue entre le roi Henry VIII d'Angleterre
et l'Empereur Charles Quint prévoit que les Anglais envahiront la Picardie et
les Impériaux la Champagne, puis que les deux armées convergeront vers Paris. L'Empereur
a obtenu le soutien militaire et financier des princes allemands lors de la
diète de Spire. Le 1er juillet 1544, son allié Ferrante Gonzague, vice-roi de
Sicile, a repris le Luxembourg, conquis Commercy et Ligny, proclamant que l'objectif
de la coalition est de démembrer la France, mais aussi de combattre un "tyran
allié des Turcs". Dès le 8 juillet, Gonzague met le siège devant
Saint Dizier, où l'Empereur le rejoint avec le reste de ses troupes. Du côté
anglais, deux armées sont lancées à l'attaque de la Picardie : l'une, sous la
direction du duc de Norfolk, assiège Montreuil sur Mer, l'autre, commandée par
le duc de Suffolk, investit la place de Boulogne. Le 14 juillet, Henry VIII
traverse la Manche et prend la tête des opérations devant Boulogne, au grand
dam de Charles Quint, qui le voit s'enliser en Picardie alors que l'objectif
est de prendre Paris! Mais le roi d'Angleterre ne s'interesse guère à la capitale
et veut juste s'emparer des environs de Calais.
La résistance héroïque de Saint Dizier brise l'élan des
Impériaux, qui tentent de couper court au harcèlement des Français en s'emparant
de leur base arrière de Vitry en Perthois. Lors de la capitulation de Saint
Dizier, le 17 août, Charles Quint se sent obligé de tenir Conseil pour décider
s'il poursuit sa marche sur Paris car la saison est déjà bien avancée. Finalement,
il pousse jusqu'à la Marne, aux environs de Châlons. A Jalons, sur l'autre rive,
l'armée française lui fait face, commandée par le dauphin. L'incendie de
Vitry a montré aux Français l'extrême gravité de la situation. Malade, François
1er n'a malheureusement pas toutes ses forces pour réagir pleinement devant
la menace. Il se résigne à remettre la défense du royaume entre les mains du
dauphin Henri, en le nommant lieutenant général du royaume. Aussitôt, celui-ci
rejoint l'armée royale en Champagne, dans la vallée de la Marne. Face à l'ennemi,
il dispose de 30 000 hommes de pied et 8 000 cavaliers. Il est secondé par le
comte d'Enghien, qui, au printemps, a été victorieux à la bataille de Cérisoles
et qui brûle toujours d'en découdre, ainsi que par ses favoris Charles de Brissac
et Jacques d'Albon de Saint André. Craignant qu'un siège de Châlons ne soit
aussi difficile que celui de Saint Dizier, Charles Quint refuse l'affrontement
direct et préfère s'emparer d'Epernay, base d'approvisionnement des Français.
Son avance est alors foudroyante : il brûle Château Thierry et prend Soissons.
A Paris, désormais dangereusement proche de la ligne de
front, c'est la panique. Le 9 septembre, le dauphin décide de barrer la route
aux Impériaux à La Ferté sous Jouarre et à Meaux. Est-il vraiment à la hauteur
de sa tâche de défenseur du royaume? Des observateurs étrangers s'étonnent de
l'inertie du roi et ne parlent même pas du dauphin, tel ce Vénitien : "Qui
eût jamais pensé que les Français laisseraient un libre cours à l'invasion et
lui permettraient de dévaster le pays!" Alors que la capitale
semble perdue, les troupes de l'Empereur, qui n'ont pas reçu leur solde, commencent
à se débander. De son côté, Henry VIII refuse de combattre pour Paris. Quant
à la reine Eléonore d'Autriche, la seconde épouse de François 1er, elle intervient
en invitant l'Empereur, son frère, à entamer des pourparlers. Charles Quint
accepte de négocier une trêve : il ne peut de toute façon assurer le financement
de la guerre au-delà du 25 septembre. Une paix est conclue le 16 septembre,
et le traité définitif est signé le 18 à Crépy en Laonnois. François 1er renonce
à la Savoie et au Piémont, et promet d'aider Charles Quint contre les Ottomans.
Mais il n'a nullement l'intention de tenir ses engagements... Pour l'heure,
il est libre de regrouper ses forces contre Henry VIII, et il envisage de s'attaquer
à Boulogne dès le printemps 1545. L'accord doit en outre être scellé par le
mariage du duc Charles d'Orléans, le fils cadet du roi, avec la fille ou la
nièce de l'Empereur, qui recevra en dot le duché de Milan. Ce qui n'est pas
pour satisfaire le dauphin Henri, d'autant qu'il a le sentiment qu'on lui a
volé une victoire qu'il croyait possible. Il y voit une fois de plus la main
de son ennemie, la duchesse Anne d'Etampes, la maîtresse du roi, et proteste
officiellement contre le traité.
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